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Paul Mattick, La Révolution fut une belle aventure (Des rues de Berlin en révolte aux mouvements radicaux américains 1918-1934), L’échappée, coll. « Dans le feu de l’action », 2013, 192 p., 17 €.

Né à Berlin en 1904, le jeune ouvrier berlinois Paul Mattick adhère à 14 ans à la Frei Sozialistiche Jugend – une organisation à gauche de la social-démocratie – et encore adolescent participe avec enthousiasme aux tentatives révolutionnaires qui suivent la fin de la Première Guerre mondiale dans les rangs du KAPD – un parti communiste conseilliste non inféodé à Moscou – échappant de peu à la mort à plusieurs reprises. Il vit alors au jour le jour et participe aux cercles d’avant-gardes artistiques et littéraires qui fleurissent durant cette période.

Avec le reflux, il décide de tenter sa chance aux États-Unis en 1926 où il s’établira jusqu’à sa mort en 1981. Là aussi ouvrier d’usine, il adhère au syndicat révolutionnaire IWW et s’engage dans le puissant mouvement des chômeurs qui suit la crise de 1929. Celui-ci s’organise sous la forme de conseils : ce sera, dit-il, « la plus belle période de ma vie » (lire l’extrait ci-dessous). Avec le New Deal, la révolution n’est plus à l’ordre du jour et Mattick se consacre à des travaux théoriques afin de démontrer, à l’encontre de Keynes et à la suite de Marx, que ce dernier a découvert « la contradiction interne au système de production capitaliste » qui « porte en lui le germe de sa désintégration ».

Ce témoignage exceptionnel, servi par une belle édition, éclaire un courant politique méconnu qui participa aux luttes pour changer le monde par en bas au profit du plus grand nombre.

 

(merci à Charles Jacquier pour l’introduction et l’extrait)

 

Le mouvement des chômeurs

La dernière grande grève menée par les IWW s’est déroulée en 1927 dans le Colorado.1 Ils comptaient à ce moment-là 20 000 membres, dont 500 à Chicago.Ce fut un échec qui amorça le déclin de l’organisation. Par la suite, l’activité des wobblies s’est effondrée, surtout dans les grandes villes.

Pour ma part, j’ai fait tout mon possible pour que ce syndicat puisse survivre au moins sur le plan idéologique. Je pensais qu’il fallait élargir les débats en abordant des points qui, d’habitude, étaient passés sous silence. Les IWW avaient, en effet, une vision essentiellement syndicaliste qui se limitait aux questions concernant telle ou telle grève. Ils considéraient, par exemple, la politique internationale comme une question secondaire.

J’ai connu dans les IWW beaucoup de gens merveilleux et je m’y sentais à l’aise. Bien qu’étant en Amérique, j’avais l’impression de me trouver à nouveau dans l’AAU et le KAPD. Les wobblies étaient vraiment des gens épatants, notamment du fait de leurs origines diverses. Il y avait parmi eux des Suédois, des Danois, des Hongrois… ainsi que des Américains. C’était un monde bigarré, sans mandarins ni bureaucrates. Tout se faisait au jour le jour et la vie y était vraiment agréable. Toutefois, même si nous voulions intervenir socialement, nous ne savions pas toujours comment nous y prendre…

Et puis la grande crise de 1929 est survenue. Ses effets se sont surtout fait sentir à partir de 1930-1931. Des assemblées de chômeurs ont commencé à se constituer, la plupart spontanément, parce qu’ils ne recevaient aucune allocation de soutien. C’est pour cette raison que les chômeurs se rassemblaient chaque jour devant les bureaux d’aide sociale qui n’avaient rien prévu pour eux, contrairement aux miséreux, aux veuves, aux orphelins, etc. C’était une occasion formidable pour nous d’amorcer la discussion. Les chômeurs débattaient aussi fermement entre eux de la marche à suivre. Et certains étaient tellement en colère qu’ils mettaient à sac les bureaux d’aide sociale, tout simplement parce qu’on ne leur donnait rien !

Les membres d’United Workers Party, dont je faisais partie, ont alors proposé d’élire des délégués dans tous les bureaux d’aide sociale afin de constituer un comité à Chicago. L’objectif était de contraindre la ville à prendre en charge les chômeurs. Pour cela, nous menions des actions communes. Malgré notre nombre restreint, les autres organisations, notamment trotskistes, travaillaient étroitement avec nous sur cette question. Il y avait aussi les partisans de Lovestone2 ainsi que plusieurs membres du parti communiste, du Proletarian Party, etc. Nous étions parvenus à une sorte de compromis sur le problème des chômeurs, dans lequel nous mettions de côté la politique partisane. Le mouvement n’était donc pas complètement spontané, même si les émeutiers, ceux qui attaquaient les bureaux d’aide sociale et qui affrontaient la police à coups de fusil, le faisaient en toute autonomie.

La formation d’une organisation de chômeurs était en grande partie due à notre proposition de regrouper les ouvriers sans travail dans une structure commune dont le nom était Workers’Alliance.3 Par son biais, nous avons publié des petits journaux, des tracts, etc.

La période que nous traversions était assez particulière, pas seulement à Chicago, mais dans bien d’autres endroits. Beaucoup de commerçants avaient fait faillite et mis la clé sous la porte. Nous avons pu occuper leurs locaux vides sans trop de difficultés. Après avoir fait sauter les serrures, nous utilisions ces lieux comme salles de réunions. Ensuite, nous y transportions les sièges volés dans les salles de cinéma, qui avaient aussi fait faillite, afin d’organiser conférences et débats. Rien qu’à Chicago, il y avait environ 50 à 60 locaux de ce type qui restaient ouverts jour et nuit pour les chômeurs. Quand ils n’avaient nulle part où dormir, ils pouvaient venir y passer la nuit. Il y avait toujours plein de monde, de sorte que l’organisation des chômeurs était en perpétuelle ébullition.

Peu de temps après, nous avons « récupéré » des machines à imprimer que nous avons distribuées dans les boutiques occupées. Les camarades volaient du papier, du moins ceux qui avaient encore du travail ou qui avaient des liens avec des gens dans les bureaux. Pour avoir de l’électricité, il nous suffisait de faire des branchements sauvages sur les réverbères. Nous shuntions aussi les gazomètres4 pour avoir directement accès au gaz. C’étaient les plombiers au chômage qui s’occupaient de ces tâches plus qualifiées. En plus de la lumière électrique, nous avions ainsi suffisamment de gaz pour cuisiner et nous chauffer, tout cela sans payer.

Les chômeurs et leurs familles parcouraient la ville pour essayer d’obtenir des vivres. Beaucoup d’entre eux crevaient de faim, en particulier les hobos qui n’avaient pas de famille et quasiment aucune attache. Nous allions régulièrement chez les boulangers et les bouchers pour exiger qu’ils nous donnent de quoi nous nourrir. Intimidés, ils nous apportaient de grands sacs pleins de nourriture. Dans les locaux, nous avions mis en place des cantines où l’on cuisinait jour et nuit pour que les chômeurs aient de quoi manger.

Un jour, nous avons distribué un tract d’appel à manifester dans le quartier des affaires de Chicago, surnommé le Loop. À notre grand étonnement, un million de personnes environ sont descendues dans la rue.5 Il y avait une foule absolument gigantesque. La police elle-même n’était pas préparée à cela. Elle avait placé le long des rues un policier tous les vingt pas, mais en cinq minutes ils ont été entourés par les manifestants, de sorte qu’ils n’ont pas pu dégainer leurs revolvers. Ils étaient serrés comme des sardines. Isolés au milieu de la foule, les policiers ont affiché des regards amicaux et n’ont absolument rien tenté bien que des tramways étaient renversés, des voitures incendiées… Ils étaient complètement débordés.

 

La solidarité des chômeurs avec les grévistes

Après ce succès inattendu, nous avons essayé de lancer d’autres actions. La dépression économique n’avait nullement mis fin aux grèves. En effet, les patrons profitaient de la crise pour réduire les salaires. En réaction, les travailleurs, même en petit nombre, se mettaient en grève. Si bien que durant cette période de chômage de masse, il y a eu de grands rassemblements pour défendre les salaires que la bourgeoisie essayait de réduire drastiquement.

La fonction de l’organisation des chômeurs était de fournir des piquets de grève afin d’empêcher que les chômeurs soient utilisés comme jaunes. De cette façon, ils faisaient « grève » avec les ouvriers et tenaient ensemble les piquets de grève. Cette unité était le fruit du lien établi entre chômeurs et ouvriers par la Workers’ Alliance.

La justice et les flics se sont mis à expulser de leur maison les gens qui ne payaient plus leur loyer depuis des mois. Ils ont commencé dans le quartier noir, probablement parce qu’ils s’y sentaient plus forts. Les flics sortaient les meubles dans la rue. S’ils n’avaient pas disparu au bout de trois jours, le service des éboueurs débarquait et les jetait aux ordures au seul motif qu’ils étaient sur la voie publique. Ainsi, les gens qui ne trouvaient pas à se loger ailleurs perdaient non seulement leur logement, mais aussi leur mobilier.

Dès qu’ils ont commencé les expulsions dans le quartier noir, nous y sommes allés pour nous y opposer. Organisés en commandos d’ouvriers blancs, nous nous déplacionslà où elles se déroulaient et remettions dans les maisons les meubles qui avaient été sortis sur les trottoirs. Les gens emménageaient à nouveau chez eux jusqu’à la prochaine expulsion. C’est alors que des fusillades ont éclaté. Pendant que nous étions occupés à rentrer des meubles, les policiers ont commencé à tirer. Quatre Noirs ont été tués, et six ou huit autres blessés. Nous avons alors appelé à une nouvelle manifestation qui a été encore plus énorme que la précédente. Il y avait peut-être plus d’un million de personnes dans la rue. Tout le quartier des affaires était paralysé et la circulation totalement bloquée. Mais la police était très rusée. Elle avait tiré les leçons de la première démonstration de force et compris qu’avec un policier tous les vingt pas, elle ne pourrait rien faire. Les policiers se sont donc placés sur les toits et ont braqué des mitrailleuses sur la rue. Aucun d’eux ne tirait, mais ils mettaient en joue afin de disperser les manifestants au cas où ceux-ci commenceraient à exproprier, détruire ou piller des maisons. Finalement, il n’y a pas eu de fusillade. Mais cela a été vraiment très triste de porter en terre ces quatre morts.

Je ne sais pas exactement comment cela se passait dans les autres villes, mais à Chicago, la police était particulièrement enragée. Dans les parcs où il y avait des rassemblements de plus de 20 000 personnes, les orateurs étaient obligés de grimper dans les arbres. La police arrivait avec un side-car équipé d’une mitrailleuse et commençait à tirer de loin, pour nous faire comprendre qu’il fallait nous disperser.

 

La plus belle période de ma vie

La mort de onze personnes tuées par balle a rendu le conflit encore plus dur et renforcé l’organisation des chômeurs. La municipalité a été contrainte de lâcher de l’argent, de donner des moyens de subsistance aux chômeurs et de suspendre les expulsions. L’État de l’Illinois a également été forcé de prendre sa part de responsabilité en débloquant des crédits pour financer toutes ces mesures. Et lorsqu’il s’est trouvé en faillite, c’est le gouvernement fédéral qui les a prises en charge.

À ce moment-là, nous disposions déjà d’une structure au niveau national. Des organisations de chômeurs, comme celle de Chicago, avaient été créées dans d’autres villes. Et lors d’une conférence nationale des organisations de chômeurs de toute l’Amérique, nous avons pris la résolution d’orchestrer une grande marche sur Washington.

Au sein du mouvement, les chômeurs se posaient évidemment la question de savoir quoi faire de leur temps. C’est ainsi que fut émise l’idée d’organiser des cours. J’ai écrit un petit guide pour expliquer Le Capital, comment le lire et en discuter ensemble de la meilleure façon. Pendant deux ans, nous avons régulièrement donné des cours sur Marx, sur Le Capital, et d’autres textes, qui étaient très appréciés. 80 à 100 personnes y participaient. Plus tard, nous avons lancé le journal Workers’ Alliance6 dans lequel j’écrivais régulièrement, ainsi que d’autres membres de notre groupe. À Chicago et dans les environs, nous étions sans doute ceux qui avions le plus d’influence sur le mouvement des chômeurs. Beaucoup plus en tout cas que le parti socialiste, le parti communiste ou les trotskistes. À Chicago, le hasard a voulu que nous ayons plus de camarades en capacité de militer avec les chômeurs, que les trotskistes et les autres groupes. De fait, nous avons eu beaucoup d’influence lors la conférence du mouvement national des chômeurs de 1933, et nous avons ainsi pu radicaliser son programme.7 L’essentiel, pour nous, était que les travailleurs – ici les chômeurs – agissent de façon indépendante. Ils devaient décider eux-mêmes de ce qu’ils voulaient faire. Nous nous en remettions toujours à eux et ne faisions que des propositions, sans jamais essayer d’imposer une orientation politique particulière. Notre seule influence idéologique sur le mouvement se bornait à celle que nous exercions non pas avec de la propagande de parti, mais en discutant Le Capital de Marx ; ce à quoi ni les sociaux-démocrates ni les communistes ne pouvaient s’opposer. Nous ne faisions pas de propagande pour notre groupe ; nous nous limitions à organiser des discussions politiques.

Les activités différaient complètement selon les villes. À New York, par exemple, le Parti communiste américain était très puissant, tout comme le parti socialiste qui était lui aussi en position de force. Ils pouvaient ainsi mieux manipuler les chômeurs et donner une orientation réformiste au mouvement. Tandis qu’ils tenaient des assemblées, votaient des résolutions et envoyaient des délégations à Washington, nous organisions davantage d’actions directes visant à alimenter les logements en gaz ou en électricité. Le mouvement était massif et spontané. Quand on avait réalisé une action, le bruit se répandait autour de nous et cela se répétait ailleurs. J’entends par spontanée une action démarrée par certains et reprise ensuite par d’autres.

Le mouvement était dominé politiquement par les courants idéologiques existants. Quand les chômeurs rencontraient des communistes, leur vision des choses leur semblait la bonne. Quand ils étaient en contact avec des socialistes, ils acceptaient leur ligne politique. Cela dépendait vraiment de qui était là pour donner aux gens sans conscience politique la première impulsion. Les chômeurs identifiaient leur phraséologie avec leurs propres nécessités, leurs propres besoins. Ne pouvant pas encore s’exprimer par eux-mêmes, ils acceptaient ainsi ces propositions idéologiques pour justifier leurs propres activités.

En comparaison avec d’autres villes, nous avions la chance que le parti communiste soit assez faible à Chicago. Les socialistes étaient principalement des Allemands, et du fait de notre travail dans les associations de formation ouvrière, ils étaient réceptifs à nos critiques vis-à-vis du parti communiste. Ce qui fait qu’ils ne s’opposaient pas à nos propositions. La centaine de membres que nous étions avait ainsi les moyens d’influencer idéologiquement le mouvement à Chicago. Nous avons publié le premier journal des chômeurs qui est devenu plus tard une référence. Nous le distribuions dans différents quartiers où les gens occupaient les locaux. À Chicago, le caractère spontané dumouvement était indissociable de l’idée des conseils. Au sein des IWW se trouvaient des personnes qui avaient participé à la grève générale de Winnipeg en 1919, ils étaient donc familiers de ce type d’organisation puisqu’ils avaient déjà constitué un conseil ouvrier pour l’occasion.

Nous avons connu un vrai succès dans la mesure où, dès ses débuts, le mouvement des chômeurs s’est constitué sous la forme de conseils et a presque pris une ampleur nationale. Le mouvement ne s’est, certes, pas étendu jusqu’à New York ni au reste de la côte est, mais les conseils de chômeurs étaient parfaitement adaptés à la situation. Le parti communiste a envoyé ses deux grands dirigeants, dont Earl Browder, à Chicago, pour essayer de liquider les conseils de chômeurs comme ils l’avaient fait auparavant avec le Chicagoer Arbeiter Zeitung. Cependant, avec le soutien des socialistes et des trotskistes, nous avons réussi à les chasser et à laisser le mouvement se développer sous la responsabilité des chômeurs eux-mêmes.

Tout cela a duré jusqu’en 1933 ou 1934, date à laquelle l’État fédéral a commencé à mettre en place les mesures de la Works Progress Administration.8 La situation explosive était désormais derrière nous et les ouvriers se sont mis à la disposition de l’État. Ils ont trouvé de l’emploi dans les programmes de travaux publics et ont pu ainsi survivre, même avec un niveau de vie assez faible. Ce qui est sûr, c’est que sans le mouvement massif des chômeurs, l’État fédéral n’aurait jamais promulgué ces nouvelles lois et mis en place ces programmes. Les membres du gouvernement avaient vraiment peur que les choses leur échappent. La misère était si générale après deux années de crise économique, qu’il y aurait eu de grandes explosions sociales si la police avait continué les fusillades et les arrestations. Le climat était tellement bouillonnant qu’un mouvement révolutionnaire aurait pu surgir à tout moment. Par exemple, tous les vétérans de la Première Guerre mondiale marchèrent sur Washington lors d’une manifestation qui fut violemment dispersée par le général MacArthur. Lorsque des groupes aussi réactionnaires deviennent radicaux et combattent le pouvoir militaire, c’est le signe que la situation a vraiment atteint un seuil critique.L’intervention de l’État fédéral et toutes ses promesses ont progressivement démobilisé le mouvement. Même s’il restait un petit noyau, qui pendant ces deux années avait développé une certaine conscience et qui se considérait comme une partie de notre organisation, le mouvement de masse, lui, n’existait plus. Nous avons cependant continué à organiser des cours, parler avec les gens, mais cela n’a plus débouché sur des manifestations ni sur des luttes. Tout se jouait désormais sur le plan idéologique.

 

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références

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1 Mattick passe ici sous silence la grande grève des mineurs du Kentucky, à Harlam et Bell Counties, en mai 1930, qui dura deux ans. Cette grève de masse fut marquée par des affrontements sanglants avec les sbires du patronat. Les mineurs auto-organisés s’opposèrent au syndicat (la United Miners Workers Association), pourtant tout récemment implanté dans les mines. Une petite organisation de mineurs, proche des IWW, la Kentucky Miners Defense, fut présente dans la lutte. Mattick écrivit un article sur ce conflit pour le Chicagoer Arbeiterzeitung, mettant en relief la nécessité et l’importance de l’action directe dans la lutte syndicale.
2 Jay Lovestone (1897-1990), un des fondateurs et dirigeant du Parti communiste des États-Unis (CPUSA). Il fut nommé secrétaire général en 1927, alors que le parti était très divisé. En 1928, il prit la décision d’exclure la tendance trotskiste conduite par James Canon. Il fut lui-même expulsé un an plus tard, comme partisan de Boukharine. Lié à des secteurs de la bureaucratie syndicale, il créa alors l’Independent Communist Labor League, groupe actif dans le mouvement des chômeurs des années 1930. Après la guerre, Lovestone et certains de ses amis se rangèrent du côté du capitalisme américain et participèrent activement aux manœuvres de la guerre froide. Lui-même dirigera l’organisation chargée de distribuer des fonds de la CIA aux syndicats anticommunistes sur le plan international.
3 Workers’Alliance of America était un groupe frontiste regroupant des organisations de chômeurs du parti communiste, des trotskistes, du parti socialiste ainsi que des conseils de chômeurs indépendants. À Chicago, les membres de l’United Workers Party, étaient très actifs dans le travail d’organisation et d’agitation.
4 Grand réservoir dans lequel le gaz était stocké.
5 Les chiffres donnés par Paul Mattick sont probablement déformés par sa mémoire. Les estimations oscillent entre 25 000 et 50 000 participants. Mais un nombre beaucoup plus important de personnes étaient sur les trottoirs comme observateurs. Dans Une histoire populaire des États-Unis (Agone, 2002), Howard Zinn mentionne ces mouvements et l’action des conseils de chômeurs à Chicago (Ch. XV. « De l’entraide par gros temps », p. 443-444). Richard Hofstadter et Michael Wallace (American Violence, a Documentary History, Vintage Books, New York, 1971) produisent des documents retraçant ces émeutes et l’action des conseils de chômeurs (p. 172-175).
6 Paul Mattick prend ici quelques libertés avec l’ordre chronologique des faits. Plusieurs conférences ont eu lieu pendant le mouvement des chômeurs. Celle de mai 1933 marque la fin de la période offensive du mouvement, avant que les programmes de l’État fédéral ne commencent à démobiliser la grande masse des chômeurs. Paul Mattick y a participé en tant que représentant du Proletarian Party’s Workers’ Leagueet a écrit de fin 1932 à fin 1933 plusieurs articles dans le Workers League News, la publication associée à cette conférence. Par contre, il semble qu’il n’ait jamais écrit pour le Workers’Alliance. Mattick a cependant pu être en rapport avec des groupes locaux de chômeurs qui, à partir de 1935, ont fait partie du groupe national de Workers’Alliance. Cette organisation était composée de groupes de chômeurs où étaient présents le parti communiste, le parti socialiste, des groupes trotskistes et des groupes indépendants. Même si Workers’Allianceétait dominé par le parti communiste, celui-ci ne l’a jamais totalement contrôlé et les situations variaient selon les régions.
7 Paul Mattick était membre du comité exécutif qui a organisé la conférence. Même s’il était militant actif dans le cadre de la Workers’League (vaguement liée au Proletarian Party), c’est en tant que délégué du Proletarian Party qu’il y participa.
8 La Works Progress Administration (puis Work Projects Administration à partir de 1939), ou WPA fut la principale agence publique de l’État fédéral, créée par l’administration Roosevelt, pour organiser les programmes de travaux publics destinés à employer des millions de chômeurs.