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Dans cet entretien, la philosophe et dramaturge Camille Louis décrit les actions menées par l’association La Casa pour trouver des hébergements dignes accueillant des personnes exilées. Elle revient sur l’inhospitalité étatique, la violence de politiques indignes et la criminalisation des solidarités. À l’opposé, elle déploie une philosophie de l’accueil, fondée sur la réciprocité vraie. Elle n’en ignore pas la difficulté et prend à bras-le-corps cet enjeu crucial : comment faire de l’accueil autre chose qu’une bonté charitable. C’est l’occasion d’évoquer une pratique de l’égalité radicale, qui expérimente concrètement des formes de vie alternatives.

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Camille, tu es dramaturge et philosophe, et tu consacres aussi beaucoup de temps à l’aide aux personnes exilées, réfugiées. Depuis le début du confinement, tu donnes beaucoup de ton énergie, avec l’association La Casa, pour assurer un hébergement digne aux personnes migrantes : accueil de mineurs dans des hôtels, accueil de majeurs dans des appartements laissés vacants en raison même du confinement, grâce à l’hospitalité de leurs occupant.e.s et l’aide de « voisin.e.s bienveillant.e.s ». Peux-tu expliquer cette démarche, sa pratique et ses effets ?

Je vais principalement parler de l’action que j’ai initiée autour des relogements en appartements et qui m’a fait rejoindre le projet de La Casa[1]. Il consiste, originellement, en la création d’un lieu, d’une maison d’accueil autogérée pour des jeunes et des familles exilé.e.s, porté par des associations (Paris d’Exil et la Gamelle de Jaurès) et des militant.e.s pour la défense des mineurs exilés en France, plus particulièrement à Paris. La pandémie et surtout l’annonce du confinement ont fait se reconfigurer le projet et il s’est agi de pouvoir reloger au plus vite celles et ceux qui ne peuvent répondre à l’injonction du « rester chez soi » qu’en restant ou se retrouvant dans la rue.

L’équipe de La Casa s’est donc affairée très rapidement à la recherche de solutions pour les mineurs. Elle en a trouvé une, temporaire, au sein d’un hôtel qui accueille aujourd’hui 14 jeunes et dans la création d’un réseau d’aidants pouvant contribuer à l’apport alimentaire. J’ai eu connaissance de cette action et d’un besoin éventuel d’autres logements, plutôt pour les jeunes adultes et, en réalité, pour tous les exilés qui très vite allaient se retrouver à la rue. J’ai donc lancé un appel, par réseaux, mails, relais de relais, aux personnes qui quittaient la capitale et souhaitaient mettre à disposition leur appartement. J’adressai aussi l’appel aux personnes qui, restant à Paris, auraient envie de s’engager pour accompagner les personnes exilées que nous arriverions à reloger dans un appartement laissé vacant. Beaucoup de personnes se sont manifestées et, aujourd’hui, nous avons réussi à reloger en appartements 56 exilés, ce qui signifie qu’il y a un réseau d’au moins 150 personnes (logeurs/ accompagnants/ référents associatifs) mobilisées pour accueillir le mieux possible, bien que temporairement.

Ce « mieux possible » est important à observer de près afin de ne pas tomber dans la représentation consensuelle d’une « solidarité » évidente, dans laquelle tout le monde aujourd’hui s’engagerait, écoutant ainsi parfaitement l’appel présidentiel du 16 mars. Le projet de La Casa dans ses formes actuelles et dans celles qui suivent, tout comme cette initiative que j’ai prise en charge, sont des compositions qui ne vont pas de soi et demandent moins « un don de soi » qu’une attention politique et un travail permanent de l’égalité. C’est pour cela que je ne parlerai pas de ce que j’y fais comme le « don » de mon énergie mais comme ce qui, en cette situation où nous sommes tenu.e.s à distance de nos terrains de lutte, me permet de tenir et me « donne l’énergie » d’un combat répété mais qui construit des durées.

Ça a été la première question pour moi à l’annonce du confinement : comment continuer à mener nos luttes – les miennes se déroulant en effet beaucoup sur le terrain des exils et des solidarités – quand on ne peut plus ni se rassembler, ni aller sur les lieux où les gestes et les actes vont très vite s’avérer encore plus essentiels qu’en temps dit « normal » (celui-ci en réalité n’est bien souvent rien d’autre que ce temps « d’exception » dont l’État français a fait passer, depuis 2017, beaucoup des principes dans le droit commun) ?

 

Hors confinement, tu expérimentes une forme de nomadisme pour être là où il faut être, en particulier dans les camps, auprès de personnes enfermées dans les assignations à résidence identitaire. À Athènes, au camp de Mória à Lesbos, à Mytilène, ce que tu proposes n’est pas une œuvre humanitaire qui serait hiérarchique et verticale, mais un partage, du commun. Et c’est dans cette expérience que tu puises aujourd’hui la proposition de relogements solidaires…

Depuis 12 ou 13 ans, la nécessité d’aller sur les lieux des combats que je soutiens, me fait circuler entre de nombreux pays et tout particulièrement, actuellement, entre la France, la Belgique et la Grèce où j’essaie de vivre principalement. Mais je n’y arrive qu’à moitié et vis donc en permanence « entre », n’ayant à Paris qu’une minuscule chambre de bonne que j’occupe temporairement. N’ayant pu partir en Grèce pour poursuivre mon travail de création et mes actions militantes auprès des réseaux de solidarité à Athènes et des personnes exilées à Lesbos, c’est à Paris que je me trouvais le 16 mars.

Quand j’ai saisi que nous allions être enfermé.e.s dans nos espaces plus ou moins réduits – un « plus ou moins » qui, aujourd’hui, fait toute la différence entre les vies « sauvées » et les vies condamnées à étouffer dans leur mini logement au sein de tours d’immeubles des quartiers populaires ou à être littéralement piétinées, balayées, comme le furent et le sont les tentes au sein desquelles les personnes exilées sont forcées, non de vivre, mais de sur ou sous vivre – ; quand j’ai réalisé que les actes que nous menons auprès de ces personnes allaient être encore plus limités et que mes jours allaient se transformer en une circulation morbide entre la violence de l’assignation à résidence, des contrôles policiers et des interdictions « d’aller auprès », j’ai décidé de quitter Paris pour un petit village près d’Avignon où je suis née. Non pas pour déserter le terrain des luttes mais, au contraire, voyant que celui qui s’incarne physiquement m’était dérobé, pour trouver coûte que coûte ce terrain d’actions qui puisse inscrire, au plus vite, ses effets. Au plus vite, mais pas que « ponctuellement » et selon ce principe d’exception qui, dans notre état d’urgence devenu, depuis 2015, permanent, doit faire la loi de nos existences et modes d’action.

Ce terrain m’est apparu quasi-immédiatement, on pourrait dire par « intuition » mais à condition d’entendre vraiment ce que dit ce mot. L’« intuitio » n’est ni une « vague idée » ni un « en dehors de la pensée ». C’est une forme de pensée tout aussi légitime que l’est la tant aimée « rationalité » dont elle diffère. Car l’intuition procède non par déduction logique mais sous l’impulsion d’un « choc », d’un « choc du dehors ». Le 16 mars, beaucoup d’éléments se sont entrechoqués en même temps. Au  choc immédiat de cette privation des actions et, justement, des dehors, s’est ajoutée la frappe causée par cette formule barbare de « distanciation sociale ». J’entends forcément cette dernière  depuis cette « pensée du dehors », cette pensée avec le dehors et avec toutes celles et ceux qui sont, depuis bien longtemps, en situation de présence physique mais de mise à distance du social ou de mise au dehors de notre société qui, pour sa « pleine santé » ne « peut accueillir toute la misère du monde ». Vieille formule qui continue de faire loi…

Comment on se « distancie » encore plus quand on est dans cette situation de mise à distance forcée, aux bords de la communauté protégée, aux bords des centres, sur les périphs, sous les ponts, n’importe où pourvu qu’on ne soit pas vu et qu’on ne vienne interrompre la vitalité et la saine-sainte union d’une société « en marche » vers son salut assuré ? Et comment on se distancie du dehors pour rester chez soi tel que l’exige « l’état d’urgence sanitaire », quand chez soi c’est dehors ou même quand le chez soi est aussi une forme de « dehors » ? Car quand on est exilé et qu’on n’est pas dans la rue, on est soit parqué avec d’autres exilés dans un foyer bondé où les mesures sanitaires comme les « interdictions de rassemblement » ne valent plus, soit dans un autre type de foyer, une famille d’accueil par exemple, où l’on n’est jamais véritablement installé.e chez soi, où l’on reste toujours, quoi qu’il en soit, celui ou celle qui vient du dehors et de l’ailleurs.

 

Tu as aussi pleinement conscience des difficultés à faire véritablement « nous » dans l’accueil, à ne pas se placer comme accueillant en position de surplomb. Tout cela n’a rien de lisse ni d’irénique.

Non car même dans cette configuration de l’hébergement solidaire il m’est apparu que les difficultés pouvaient tout aussi  vite arriver. Pas du fait d’un retournement cruel et égoïste des personnes qui accueillent souvent avec beaucoup de soin, mais du simple fait du retournement de situation voulu par la pandémie. Prenons un exemple : en temps normal, un jeune homme qui accueille un ou deux exilés (et parfois plus) est aussi pris dans une vie « sociale » qui le fait sortir et laisser ainsi aux accueillis un peu d’intimité. Inversement, les accueillis qui trouvent dans ces logements un peu de répit dans la série des violences subies quand ils sont dans la rue, sont loin de passer leurs journées à se reposer. Ils doivent sortir, accomplir des démarches multiples, parfois participer aux courses de la maison ou encore, aller aider à une distribution de « Ptits Dejs solidaires » au jardin d’Éole… . Chacun.e peut donc aller et venir. Il y a des circulations et il y a des respirations. Mais quand on doit tous « rester », la situation n’est évidemment pas si simple. Comme elle ne l’est pas pour les familles nombreuses qui sont enfermées actuellement dans des espaces trop petits ou pour les couples qui, ne s’étant jamais autant vus, ne se supportent plus. Sauf que, là, il ne s’agit ni de famille ni de couple : si, exilé, l’on décide de quitter cette situation ou si on nous demande de la quitter parce que « ce n’est plus possible », on est sans ressources aucune, sans autre foyer puisque tous ont vu leurs possibilité d’accueil se réduire ou que ces possibilités semblent surtout des impossibles effrayants en temps de pandémie. Tout ces « à venir » inquiétants sont venus frapper mon esprit d’un même coup. Mais ils ont surtout fait remonter un choc plus ancien qui a grandement informé  cette mise en place intuitive, non pas juste d’un relogement des personnes exilées mais d’une structure permettant logement, accompagnement et, par là, forme d’accueil collective et solidaire. Celle-ci ne correspond ni aux dispositifs caducs « proposés » par les pouvoirs publics ni aux modèles de la famille ou du couple.

Ce choc ancien, c’est celui qui provient d’une longue fréquentation des situations d’arrivées de personnes migrantes dans les villes et villages de citoyen.ne.s installé.e.s. qui, très souvent et en particulier depuis 2015, ont dû réagir en « urgence » face à des situations qu’ils ne connaissaient pas. À Calais, à Mytilène sur l’île de Lesbos, à Athènes, près des villes frontalières en France ou en Espagne, ou encore à Paris et sa banlieue, les personnes qui n’ont pas transformé la « réaction d’urgence » en posture réactionnaire du rejet se sont souvent engagées dans des formes d’accueil improvisées. Vu qu’il n’y avait pas de structure ou seulement des structures défaillantes, elles se sont faites « avec ce qu’on a », c’est-à-dire bien souvent les maisons[2]. Si certain.e.s ont toujours eu en tête que cette solution bricolée ne pouvait se faire qu’en articulation avec l’invention concertée, collective, d’une forme plus structurée d’accueil ; si d’autres, plus en capacité ou en disponibilité de s’engager, accueillaient chez eux mais luttaient en même temps sur le plan politique et juridique pour l’obtention des droits des personnes (je pense à Laurent à Calais, à Thanassis à Mytilène, à Nassim à Athènes, à Quentin à Paris…), d’autres n’ont pas eu le choix ou ont choisi (et c’est plus problématique) de s’organiser seul.e.s, de « faire famille » avec cet autre, de faire comme s’il était le fils, si elle était la fille ou… la seconde partie du couple. Mais quand on a comme projet de vie non pas de s’installer dans ce petit village perdu où on veut nous voir rester, nous adopter, nous épouser…, le « faire famille » n’est pas si évident, tout aussi reconnaissant.e soit-on envers ses accueillant.e.s.

Quand, au sein d’une famille ou d’un couple, les désirs sont contradictoires et qu’il faut « régler entre nous » les différends, on sait bien que les parts du « nous » ne sont pas également distribuées, que l’on soit autorité de la maison, père, mère, enfant ou invité. Les « règlements de comptes » en interne, dans l’opacité des maisons, sans intervention d’un tiers, qu’il soit personnifié ou de l’ordre d’une structure, n’aboutissent pas forcément à des rétablissements de justice partagée. On le sait tous, du fond de toutes nos « familles », on le sait bien. Les surgissements, présentés en ces temps de confinement, comme « nouveaux » et d’exception, des violences conjugales ou qui maltraitent les enfants, on les connaît, au fond, en vrai. On sait que « ça arrive », qu’il n’y a pas de garantie faisant que ça ne déborde jamais, tant dans la colère que dans la fusion, ni de certitude que ça ne dérape pas. Et quand le dérapage est en roue libre, qu’il n’y a plus de limites clairement posées au sein d’un « nous » reconnaissant les différences, le non familier, l’égalité des concernés, ça peut finir très mal. Et ça a fini mal, parfois, peut-être seulement de rares fois mais ce rare suffit à me faire, non pas abandonner la conviction profonde dans nos capacités d’accueillir mais plutôt à ne cesser de les travailler depuis leurs forces comme depuis leurs fragilités. Rester convaincue mais ne pas faire de la conviction une croyance totale, fervente, fascinée et qui fait trop souvent de l’autre un objet de fascination. Préférer à la croyance la confiance qui, pour être telle, ne peut se composer qu’avec « l’autre » enfin reconnu dans son égalité.

 

En ces temps d’« union nationale », d’« union sacrée », tu insistes au contraire sur la nécessité absolue du dissensus, du contretemps. Face à la vie « im-monde » de ce monde, tu plaides pour la nécessaire conflictualité et le refus des passivités, contre la puissante et « terrifiante capacité à tolérer l’intolérable ». Par l’égalité et la confiance, justement. Et ce travail est immense. Il donne aussi l’impression saisissante et parfois écrasante d’être sans fin, tant la demande est grande, à la mesure de l’incurie, de l’indifférence et de la violence cynique des pouvoirs publics. Les situations sont aussi indignes qu’inhumaines. Comment, face à cette infinie violence, ne pas en venir à l’épuisement et à l’arrêt du combat ? Comment inscrire ces actes dans la durée ?

L’organisation du consensus autour de l’hospitalité se fait en plusieurs niveaux et a plusieurs visages. Trop souvent on se contente de la représentation binaire qui met, face à l’État structurellement raciste et excluant, les accueillants intrinsèquement bons et bienveillants. Qu’il y ait beaucoup de bonnes intentions, je n’en doute pas. Pour autant je doute que l’on soit d’emblée paré et parfait dans nos manières d’accueillir « chez nous ». Il y a une irréprocité au cœur de l’hospitalité et le reconnaître n’aboutit pas forcément à la délégitimer mais plutôt à la politiser, à en faire un travail permanent du commun qui nous engage collectivement comme subjectivement. Le dissensus commence ici, dans la capacité à faire trembler la solide et trop unifiée représentation que l’on a de nous-mêmes comme fondamentalement ouvert.e.s à l’autre. L’autre est toujours problématique et c’est ce qui fait la vitalité des rencontres comme la morbidité des exclusions. Reconnaître l’autre, faire avec l’autre relève toujours d’une composition, d’une invention de relation où se mêlent gain et perte. Pour se relier, il faut accepter de perdre un peu de son sol assuré, perdre un peu de ce qui nous appartient en propre et reconnaître, comme le dit Rilke, que « perdre aussi nous appartient ». Mais ce n’est pas simple. Reconnaître la complexité permet cependant de l’embrasser, de la travailler comme une matière et c’est un peu ça qui se fait dans la forme plurielle que l’on a choisie pour cette organisation des accueils en appartements.

C’est  une sorte de constellation de confiances qui s’est mise en place avec les logements  prêtés, accompagnés et reliés. Il y a du pluriel, du tiers et de l’altérité partout. Je ne me l’étais pas formulé si clairement quand j’ai doublé « intuitivement » l’appel aux préteurs d’appartements, d’un appel aux potentiels accompagnants mais je vois en effet que c’est tout sauf un hasard qui a permis un tel fonctionnement. Le mode d’accueil s’est dès le départ fait sous une forme  au moins triple (logeur/ logé et ceux que j’appelle voisin.e bienveillant.e) et en lien avec « moi », non de manière intime et familière (très peu des personnes engagées dans l’initiative sont des ami.e.s ou des proches) mais en tant que liée à l’association La Casa, que j’ai complètement intégrée depuis et dont les autres membres s’occupent davantage, en cette période de confinement, du logement des mineurs dans un hôtel. Il y a toujours « un.e en plus » ce qui est en effet le propre du principe d’égalité tel que peut le concevoir Jacques Rancière. Tout aussi proche me soit sa pensée, ce n’est pas en pensant à lui, ni en pensant à une autre conceptualisation de l’égalité que j’ai conçu cette forme plurielle d’accueil. C’est seulement depuis une pensée « en situation » qui, tout en étant provoquée par une série de chocs, se prolonge dans des compositions, non pas de formes urgentes de survie, mais de formes de vie partagée. Car celles-ci, pour être soutien des vies désirables et rempart aux vies tuables, repose justement sur une toute autre temporalité : celle de la durée.

La conception de la durée ou de la « pérennité » de ces actions est concomitante à leur mise en place comme à la confiance que j’y place. Et elle est inhérente à ce qui en fait à mon sens la dimension politique en tant que  capacité à instaurer et à instituer un monde commun qui ne soit pas « comme Un » mais fondamentalement pluriel. Pour ce monde là, « l’Union nationale » n’a aucun sens, pas plus que la « communion » nécessaire entre « moi » et « l’autre » auquel je devrais tout donner, duquel je devrais tout accepter. Dans ces configurations-là, l’autre est à nouveau nié dans sa singularité, il n’est que « l’Autre », jamais cet autre-ci avec lequel j’ai telle affinité, tel désaccord ; avec lequel je peux débattre, négocier, me disputer. Or c’est sur fond de dispute et de conflictualité travaillée que ce monde commun se compose en durée et continuité, bien plus qu’il ne s’impose en bloc et en Unité retrouvée. De la même manière, ce que l’on nomme « actions solidaires » sont des actes qui se mettent au travail d’un possible « ensemble » : celui-ci n’est pas donné de fait et, pour qu’il advienne, chacun.e doit œuvrer, aidant.e comme aidé.e, accueillant.e comme accueilli.e. C’est quand cette co-action disparaît qu’il y a très souvent épuisement, « écrasement ». Les « aidants » mentionnent leurs actes dans le registre du sacrifice,  du  « pur don de soi » et… on entend pas beaucoup les « aidés ». On entend encore moins la manière dont ils sont aussi les aidants des autres, ne serait-ce qu’en rompant la solitude d’un quotidien ou en ramenant, dans des vies sinistrées comme elles peuvent l’être chez certain.e.s habitant.e.s de villes oubliées et villages reculés, un peu de ce souffle du dehors. Ces attitudes sacrificielles me frappent, continuent de me choquer moins dans le sens de l’indignation qui devrait s’ensuivre – et dont le registre me semble tout aussi inefficient politiquement que celui du sacrifice – que dans celui du heurt, de la blessure et de ce qui devrait s’ensuivre sous la forme de « l’intolérer », de ce verbe qui continue cruellement de manquer au point de nous faire « tolérer l’intolérable »[3]. L’intolérable violence des pouvoirs publics mais aussi l’intolérable archaïsme d’un ensemble de réactions que la situation d’urgence fait émerger. On peut voir en ce moment ces réactions tant dans la panique des réserves à faire au supermarché, que dans les formes que prennent très concrètement les « gestes barrières » qui semblent reproduire, au sein de toute ville, la violence des gestes frontières déployées par l’Europe policière. Mais je les note aussi dans les postures que prennent à nouveau – comme dans ces précédentes situations d’urgence que provoquèrent le trop grand nombre d’arrivées – certaines « âmes pures » qui préfèrent au travail collectif et partagé, l’embrassement total d’un chemin de croix au bout duquel elles sont certaines de pouvoir « sauver leur protégé ». Oui, là il y a « écrasement » sous le lourd fardeau dont on ne cesse de se plaindre comme pour mieux l’exposer. Mais il y a surtout reproduction des inégalités entre « sauveur » et « sauvé ».,

 

Dans la postface à Noir inconnu de Sylvain George, tu écris : « Il est devenu bien difficile de parler d’hospitalité en Europe, pas seulement parce que les polices des États membres en annulent ou en criminalisent les gestes mais aussi parce que, sous ce terme, semble bien (trop souvent) se manquer la réciprocité de la relation d’égalité. On accueille “chez nous’’ dans ce “chez nous’’ constitué et dont, parfois, par générosité, on ouvre les portes à l’autre en quête de notre bonté. Plus que d’hospitalité, c’est de charité qu’il faudrait ici parler tout comme il faudrait que nous osions “nous’’ parler de ce que nous ne pouvons que manquer en confondant les deux. Mais cela demanderait d’accepter de trembler un peu dans nos installations – matérielles et symboliques – et de faire de “notre accueil’’, non plus une propriété privée et privilégiée mais une question. »

En effet on ne parle pas beaucoup de ces dimensions-là mais les dérives qui s’y produisent m’inquiètent régulièrement. On peut convertir l’inquiétude en souci et en soin : soigner nos solidarités, les travailler et les renforcer face à ce que l’on voit se mettre en place de manière non plus inquiétante mais terrifiante. Je songe ici à la nouvelle forme d’« hygiénisme » par laquelle l’État français invite à se protéger « du dehors » et laisse ouverte la voie à une réaction générale de protection archaïque quant à celles et ceux qui viennent  du dehors et que l’on aimerait voir y rester. Combien d’appels, de tribunes ont été publiées depuis le début du confinement contre la violence des démantèlements, la cruauté des forces de l’ordre qui lacèrent les tentes, coupent les points d’eau et forcent du même coup les exilés à boire l’eau du canal ? On parle partout de lutte contre la contamination de la nation et on contamine presque volontairement celles et ceux qu’on refuse d’en voir faire partie. Tout le monde donne son avis sur les mesures nécessaires à la non-propagation du virus et personne ne réagit, si ce n’est les mêmes associations et militant.e.s, quant à la non-fermeture de ce que l’on force à devenir, malgré les protestations et paroles politiques très puissantes de leurs occupants, de véritables parcs à propagation. Je pense ici aux CRA[4]. Certaines des personnes qui continuent d’être envoyées dans ces centres, condamnés par le Défenseur des droits lui-même, sont précisément celles que la France ne peut tout simplement plus « mettre dehors ». Les frontières étant fermées, les accords de Dublin sont comme « suspendus » ou plutôt réinjectés au dedans. Même principe que pour le passage des gestes frontières aux gestes barrières puisque le dehors lointain n’est plus une option, on va ramener le dehors tout près mais en le « frontiérisant » : c’est le sens même des centres fermés. Ceux-ci sont dans « nos villes » mais ils sont placés dans le même régime d’invisibilité que les gestes tout aussi violents par lesquels, ces derniers mois, on a mis des exilés dans des avions vers la Grèce. Au début du confinement, plusieurs exilés étaient retenus dans les zones d’attente des aéroports. À Orly, quelqu’un est resté quatorze jours. Quatorze jours[5] ! Les associations sont parvenues à faire libérer ces personnes mais, malheureusement, comme pour la mise en liberté de certains détenus, les deux ont abouti à un nouvel enfermement. Dans les CRA. Là où l’on tient bien fermé cet en dehors que l’on ne veut intégrer. Radical en dehors de l’humanité et des vies à sauver.

Hygiène et « entretien » des vies niées ou consumées : cela peut se passer indéniablement du côté de l’inhospitalité étatique mais cela peut aussi arriver quand est préférée à la fabrique d’une communauté politique, cette sorte de communion-consomption qu’on instaure avec l’autre. Ce risque du « trop proche » qui transforme l’accueil en intégration puis en absorption est au cœur de la notion d’hospitalité, non comme son stigmate ou sa malédiction mais plutôt comme la marque de son impossible résolution « de fait ». Le travail permanent de l’hospitalité se traduit pour moi  dans les termes de la fabrique de solidarité et d’égalité radicale, plus que dans ceux de l’accueil de l’autre par celui qui a un chez soi installé. À moins qu’il soit en mesure de faire trembler ce « chez soi » et ses structures pour qu’elles se convertissent en reconstruction d’un « chez nous ». Un chez nous hétérogène, pluriel du dedans où l’on agit ensemble pour le bien de tous qui est le bien de chacun. Il n’y a pas d’antériorité des places donnant à certains la capacité de l’accueil contrairement à d’autres. Chacun peut être l’un ou l’autre, accueillant ou accueilli, et ce qui diffère sont les manières de faire ce commun, les manières d’agir, ce qui, contrairement à l’hospitalité, continue d’être criminalisé : la solidarité.

À l’inverse des propos obscènes du président d’un pays qui fait de la solidarité un délit mais se permet d’en appeler aujourd’hui à elle au même moment où il la transforme en « exception » – c’est parce que nous sommes en « urgence sanitaire » que la solidarité deviendrait nécessaire – nos solidarités, nos puissances solidaires qui composent ce monde d’égalité radicale ne sont telles qu’à condition de penser et travailler leur pérennité. C’est dans ce nouage d’actes et de durées, que l’on peut instituer ce monde-là, ce « monde d’après » pour lequel nos institutions existantes sont complètement obsolètes, à commencer par les institutions juridiques comme le rappellent les avocats militants (Arié Alimi, Raphaël Kempf, Anis Harabi[6]).

 

As-tu rencontré sur tes terrains d’actions les éventuelles prémisses d’un monde autre, un monde fait en commun avec les autres ?

Je suis très influencée par ma fréquentation des réseaux de solidarités en Grèce et par la façon dont, très vite, ils se sont nommés comme « institutions alternatives ». Alors que certain.e.s continuent de discréditer la solidarité en la réduisant à une sorte de palliatif des manques de l’État qui permettrait à ce dernier de continuer son incompétence et son déni face aux besoin des personnes (exilées ou non), les structures solidaires mises en place là-bas ont très vite su montrer que leur travail dépassait de loin le périmètre borné par les balises de ce que l’on peut exiger et obtenir de l’État. Elles ont réussi à s’émanciper de la centralité de l’État, en construisant des formes d’institutions civiles capables de soutenir la forme de vie collective que l’on souhaite et non celle que l’on est en droit (restreint) de demander. Les relations qui tissent les espaces solidaires sont toujours travaillées dans le sens d’une  réciprocité et d’une égalité comme elles l’étaient par exemple dans l’occupation de l’Hotel City Plaza à Athènes. Celui-ci était bien plus que ce qui le qualifiait en premier : un lieu d’hébergement pour les familles exilées. Il a su être un lieu de vie collective où chacun.e était considéré.e comme «  sujet de ses propres revendications » et participait tant à la cuisine, à la tenue du café qu’aux AG y compris celle qui a décidé de fermer le lieu en se donnant pour ce faire la durée d’un an, temps nécessaire à ce que chaque cas soit bien traité en termes de relogement, déplacement… Les militant.e.s qui ont initié le projet d’Hotel City Plaza agissaient à la fois sur fond d’une confiance en l’égalité souhaitée, actée dans les pratiques, et sur celui d’une  reconnaissance de l’indépassable non-égalité qui sépare le militant grec et l’exilé en regard du droit grec. Ils et elles se refusaient ainsi à  prendre un squat qui se foutrait des éventuelles descentes de police en disant que « nous on sera là pour vous protéger, pour vous sauver » parce qu’ils et elles savaient très bien que les suites d’une arrestation ne seront jamais les mêmes pour un.e citoyen.ne et un sans papier… Veiller les uns sur les autres exige la reconnaissance des différences de situation et l’espérance active, activée au présent en un horizon d’égalité radicale. Les structures grecques de solidarité ont su faire de celle-ci une pratique en tous points politique comme elles ont su ainsi se doter de ces institutions alternatives. Institutions qui diffèrent de celles avec lesquelles nos démocraties semblent surtout trahir dans une impunité toujours plus grande le demos – qui n’est tel qu’à condition d’être divers – et son pouvoir. Institutions qui altèrent le consentement à l’intolérable état de fait. Institutions qui aèrent, mettent du souffle, de la respiration, du possible dans nos formes de vivre ensemble.

Et parler d’institutions c’est encore parler de durée. Instituer c’est d’abord « donner de la durée aux expériences » comme le dit Merleau-Ponty, et ça ne commence pas par la formule, ça commence en effet par l’expérience, par cette composition des rapports entre éléments hétérogènes. Les expériences profondes, celles qui bouleversent en nous mettant en rapport avec le différent dans une dynamique de co-composition, sont rares. Elles ne sont pas données et encore moins en ce moment où tout est encore plus fait pour que l’on ne se rencontre pas, pour que le pluriel n’existe pas. Cette peur paranoïaque qu’a l’État de la rencontre improbable n’est pas neuve et pas juste le résultat de « l’urgence sanitaire ». Elle est à l’œuvre tant dans la criminalisation des solidarités envers les personnes exilées que dans la violence par laquelle les « forces de l’ordre » démantèlent les camps comme les lieux d’expérimentations d’autres formes de vie (les ZAD ou récemment les cabanes qui ont fait jaunir les ronds-points). Elle trouve son point d’achoppement dans cette « distanciation sociale » qui n’a fait que renforcer les démantèlements de lieux comme les destructions de formes de vies autres ou de vies des « autres » : c’est si lisible quand on y pense. Puisque c’est si ancien et si ancré, il faut que nos résistances anticipent aussi du côté des durées. « Prendre de vitesse la catastrophe » c’est certes tenter dès maintenant des expériences de vivre ensemble qui ouvrent des « après » potentiels, mais c’est aussi très concrètement prendre conscience du temps qu’on a et du temps qu’il nous faut pour agir sans nous épuiser, sans nous brûler, sans se faire écraser.

C’est cette compréhension du temps à soigner ou du temps qui soigne « avant qu’il ne soit trop tard » – avant que l’on n’ait plus le temps d’autre chose que d’envoyer tout un peuple aux urgences qui n’y étaient pas préparées – qui a configuré en grande partie l’action des appartements . La petite organisation qu’on a mise en place a veillé à ces formes de responsabilité suffisamment partagées pour ne mettre personne en situation de devoir « donner tout son temps » au risque de ne pas bien faire, bien « protéger » ou bien sauver… fantasmatiquement. Il a fallu le temps de converser avec chaque personne qui se manifestait à moi pour accompagner, pour jouer ce rôle de voisin.e bienveillante. Puis il a fallu imaginer avec chacun.e une organisation particulière du temps, en articulation avec la spécificité de chaque logement. Car  certain.e.s hébergent un sans papier, d’autres trois demandeurs d’asile, d’autres une jeune femme déboutée de la CNDA ou d’autres encore deux réfugiés « dublinés » qui, jusqu’à présent, ne se connaissaient pas et à qui on a proposé de cohabiter. Ils ont appris à se connaître, à « négocier » entre eux cet espace partagé et à s’apparaitre mutuellement, ainsi qu’aux yeux des bienveillant.e.s qui ne sont pas intervenu.e.s dans cela, comme des acteurs responsables de cette cohabitation. Les référents que nous sommes ne se présentent ni comme des gardiens ni comme des garants mais comme des interlocuteurs, des « un en plus ». Chacun reste auteur et acteur de son temps et, par appels réguliers de logeur à logé, de voisin à logeur, de logés à référents d’une association telle que Paris d’Exil avec laquelle nous collaborons beaucoup pour tout cela, on arrive à transformer cette privation d’espace commun en occupation politique et solidaire des temps communs. De vrais temps qui ne sont communs qu’à condition de respecter les temporalités de chacun.

On a gagné du temps de plusieurs façons, en amont et en aval. Cela me et nous donne confiance dans nos capacités à faire durer le commun qui s’est créé là. Nous sommes tous très conscients que, à partir du 11 mai, les choses vont changer : les hébergeurs vont rentrer, les logés savent, dès le début, que sans doute ils n’auront pas d’autres options que de retourner à leur situation précédente qui pour beaucoup est la rue ou la cage d’escalier d’un foyer bondé. Les accompagnant.e.s pourraient décider de retourner eux aussi à leur « temps » d’avant, celui des activités, des affaires courantes, des rythmes d’un travail qui structurent majoritairement nos jours et nos nuits. Pourtant, quelque chose s’est ouvert et est en désir de continuer. La Casa a depuis longtemps le projet d’un lieu pérenne pensé originellement pour accueillir celles et ceux qui n’ont absolument aucune autre solution de la part des pouvoirs publics : les jeunes en recours. Elle cherche ce lieu activement d’autant plus que bientôt il ne sera plus possible de financer les chambres des 14 jeunes à l’hôtel. Mais la nature et fonction de ce lieu ont été reconfigurées par l’événement et la durée du confinement. Nous avons pu rencontrer, auprès de certains logés, un désir de responsabilité et d’investissement dans ce qui pourrait être un lieu collectif autogéré, tout comme le désir que la majorité des 150, 160 personnes engagées – en tant que logeurs, référents, voisins bienveillant.e.s… nous ont manifesté de continuer à accompagner les personnes y compris pour le suivi des démarches juridiques et administratives. Aujourd’hui il nous semble donc possible d’imaginer la prise d’un lieu accueillant mineurs et majeurs qui en ont formulé le projet, dans un principe d’autogestion assumé par un collectif composé des exilé.e.s résident.e.s dans le lieu, de ce réseau des bienveillances ainsi que des collaborateurs que nous avons en termes d’avocats, de médecins et psychiatres, d’enseignants solidaires. Nous cherchons le lieu activement mais nous savons que « nous sommes là » et nous y sommes en étant bien plus nombreuses et nombreux qu’il y a un mois. L’expérience a créé une durée, il nous faut à présent trouver la spatialité.

Incarner cela dans un lieu, dans cette grande Casa cosmopolitique, ce n’est pas rêver naïvement à un havre de paix. C’est plutôt tirer l’expérience des formes de conflictualité productives telles qu’elles peuvent nous être enseignées par les exilés eux-mêmes. Car ce sont eux qui, aujourd’hui, dans des lieux comme le camp de Mória, parviennent à organiser des formes de vie collective grâce à des négociations menées à plus de quinze communautés[7]. Ce sont eux qui, du fond de l’immonde où l’Europe policière les renvoie, font tenir des mondes pluriels et communs à la fois. Et ce sont eux qui peuvent nous apprendre comment faire monde ici dans nos villes saccagées par les démantèlements répétés de « nos espaces communs ». Composer un autre chez nous, ouvert, dans l’expérience de cette possible Casa, permet d’aller, certes localement mais peut-être aussi plus directement, plus expérimentalement, dans la mise en place des institutions civiles, alternatives et politiques dont le monde d’après que nous voulons a besoin.

« Anticiper la catastrophe », c’est aussi anticiper ce qui peut venir « après » en ramenant « l’après » dans le maintenant. C’est-à-dire travailler dès à présent très concrètement, très méticuleusement et donc peut-être  très « petitement » (à l’échelle d’un lieu plus qu’à celui d’un nouveau programme de société) à l’élaboration des formes d’expériences de vies autres, de vies avec les autres qui, en avance, sont déjà en train de durer dans l’après. Ainsi, peut-être sommes- nous en train de composer non pas juste l’après de la catastrophe mais ce de quoi la catastrophe sera le nom : la chute et la fin (cata) du chant (strophe) d’un néolibéralisme triomphant qui, ici et là, semble perdre pied. Il perd « son monde », autrement dit, puisque dans ses pratiques im-mondes de décomposition, démantèlement, destructions, il a perdu le monde depuis longtemps, il perd la main mise sur cet autre monde commun qui lui a échappé. Ce monde-là s’expérimente actuellement, « petitement » des appartements solidaires aux circuits alimentaires permettant l’autonomie, en passant par d’autres pratiques de soin partagé. Et, dans ce monde-là, la régularisation des sans-papiers[8], la fermeture des CRA ou encore l’annulation des accords de Dublin ne seront plus des demandes mais juste des états de faits à expérimenter.

 

Propos recueillis par Ludivine Bantigny.

Pour soutenir La Casa : https://www.helloasso.com/associations/paris-d-exil/collectes/la-casa-projet-d-hebergement-post-confinement-avec-paris-d-exil?

 

Notes

[1]
https://www.facebook.com/lacasaparis.asso/  et pour son devenir actuel: https://www.helloasso.com/associations/paris-d-exil/collectes/la-casa-projet-d-hebergement-post-confinement-avec-paris-d-exil?

[2] Je renvoie, en lien avec tout ce que je vais dire sur ce point, au texte essentiel de Marie Cosnay : « Dans nos maisons » https://www.cairn.info/revue-monde-commun-2019-2-page-146.html

[3] Ce qu’a si bien pensé le philosophe Jean Borreil dans son ouvrage au titre parlant La raison nomade .

[4]   https://www.gisti.org/spip.php?article6370 ; https://www.gisti.org/spip.php?article6369

[5]    http://www.anafe.org/spip.php?article560

[6]  Voir notamment pour Arié Alimi: https://www.dalloz-actualite.fr/node/responsabilite-des-decideurs-publics-en-periode-de-crise-sanitaire#.XqQI0mQza2x ; https://lundi.am/La-justice-penale-sous-etat-d-urgence-sanitaire

[7] Je renvoie ici à ce que je pouvais dire de cette incroyable leçon politique que savent nous donner les personnes exilées, leçon pour le monde depuis l’im-monde des camps : https://blogs.mediapart.fr/edition/la-jungle-et-la-ville/article/270220/mytilene-au-coeur-de-la-contradiction-europeenne-1. On pourra aussi écouter une correspondance avec Marie Cosnay, « Au bout du compte, des vies » : https://soundcloud.com/user-445049199/au-bout-du-compte-des-vies-porte-voix-3/s-q6vrBylYbff? et https://soundcloud.com/user-445049199/au-bout-du-compte-des-vies2eme-volet-porte-voix-8

[8]
https://blogs.mediapart.fr/pour-la-regularisation-definitive-des-sans-papiers/blog/200420/lettre-ouverte-au-president-de-la-republique-pour-la-regular

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