Lire hors-ligne :

Le Coran et la Bible contiennent des affirmations concernant les mœurs (esclavage, place de la femme, homosexualité, etc.) ou les sciences naturelles (Terre créée en 6 jours et centre du monde, homme fabriqué à partir de la glaise, etc.) qui, lues avec les connaissances et une conscience modernes, apparaissent barbares ou d’une ignorance absolue[1]. Mais c’est une vision anachronique.

Pour les athées, il n’y a (évidemment !) pas de miracle. Ces livres pré moyen-âgeux reflètent les savoirs, coutumes et croyances des sociétés primitives qui les ont vu naître. Il est donc naïf de vouloir en extraire quelque chose comme la libération des femmes, la théorie de l’évolution des espèces, l’âge ou le mouvement de la Terre, concepts totalement étrangers à ces époques.

En revanche, pour les croyants, comme ces livres ont été inspirés – voire dictés – par Dieu, « ils ne peuvent pas mentir ». Ils échappent en quelque sorte à leur déterminisme socio-historique. Il y a  donc là un vrai un miracle. Alors, soit :

– Ce que les scientifiques pensent aujourd’hui vrai est faux et sera démenti demain. La science est  partielle, fragile et fluctuante, pas la vérité révélée.

– Le Livre saint contient bien sûr la vérité, mais elle est cachée et nous devons apprendre  à la lire.

Ou toute combinaison de ces deux attitudes.

La première attitude est celle des « créationnistes ». La seconde, plus subtile, débouche sur les diverses « lectures » de la Bible ou « contextualisations » du Coran. Par exemple, selon ces croyants non littéralistes – ceux qui refusent une lecture au premier degré -, les sectes évangéliques nord américaines ou Ben Laden témoigneraient d’une « mauvaise » lecture de ces ouvrages de référence qu’on pourrait combattre au nom des mêmes textes, mais « bien » compris.

 

Je vais d’abord faire un bref récit de l’évolution des positions des religions monothéistes qui se revendiquent de la Bible ou du Coran vis à vis de la science, et des savants vis à vis des textes sacrés. Je développerai en particulier l’argumentation suivie par Galilée avant son procès ; je montrerai qu’elle n’a rien perdu de son actualité.

 

Une parenthèse d’abord : les prêtres de toutes ces religions disent maintenant que la Bible ou le Coran ne sont pas des livres de Science et même (plus récemment, Cf Finkelstein) que ce ne sont pas non plus des livres d’Histoire. Ce n’est pas du tout ce qu’on disait jadis (sans parler du procès fait à Galilée,en 1633, jusqu’au milieu du XIX ème siècle, la papauté reprenait le récit biblique mot à mot, le grand Cuvier également.). [Raconter comment Buffon en 1751 a du capituler sur son évaluation non catholique de l’âge de la Terre devant la faculté de théologie en déclarant ensuite avec humour « qu’il préférait être plat que pendu », puis l’histoire de Champollion, baptisé contre son gré de « sauveur de la chronologie biblique » et son refus de porter le chapeau … de Cardinal offert par Léon XII]. Le problème est que les Livres sacrés contiennent, peut-être à leur corps défendant, des affirmations de Science et d’Histoire et qu’il faut composer avec. Si elles étaient fausses, pourquoi croire au reste ?

 

Le fait qu’il faille une certaine dose d’interprétation aux Livres sacrés est commun aux grands penseurs chrétiens, juifs et musulmans, en tout cas jusqu’au XII ème siècle pour ces derniers , fin de l’âge d’or arabe : le Coran « incréé » détrônant le Coran « créé ». Je pourrais multiplier les citations de saint Augustin (chrétien), Maïmonide (juif) ou Averroes (musulman).  Tous reconnaissent la coexistence d’un Livre de la Nature et d’un Livre sacré, œuvres du Seigneur. Dieu pouvant tout sauf la contradiction, ces deux Livres ne peuvent s’opposer. Il y a alors le travail gigantesque de milliers de docteurs de la foi, de rabbins et autres Savants qui vont écrire les modes d’emploi des textes sacrés ; ce seront les livres des Pères de l’Église pour les chrétiens, le Talmud pour les juifs et la Sunna pour les musulmans. Notons que la taille de ces divers commentaires est plusieurs milliers de foi celle des textes commentés. Pour les mécréants – qu’il ne faut pas écouter -, rien de surprenant : il est extrêmement long de « démontrer » que deux et deux ne font pas quatre…

 

Un remarque que je crois importante. Il existe un passage continu entre la foi du charbonnier pratiquée par des centaines de millions de fidèles et une vision sophistiquée « à la Spinoza » ou  « à la Galilée », c’est-à-dire très loin de tout anthropomorphisme, partagée par des intellectuels. Ce passage est indispensable : sans la foi des premiers[2], les seconds n’existeraient pas ou auraient un rôle marginal. La tradition de toutes les grandes religions monothéistes a été de limiter de fait ou de droit cette deuxième approche aux seuls milieux éclairés : le vulgum pecus  risquerait d’y perdre la foi. Les réactions  de Benoît XVI ou des fondés de pouvoir musulmans pour étouffer ces « modernisations » de leur église se nourrissent de cette tradition. Comment s’opère ce passage ? Il n’y a pas de doute que, pour tous les croyants, le puissant charme poétique qui imprègne les textes sacrés permet d’établir un rapport entre les lecteurs au premier degré et les intellectuels. Après tout, les liens fondés sur un imaginaire ou des sentiments partagés sont au moins aussi effectifs que ceux fondés sur la froide raison. Il faut ajouter, avant d’examiner les problèmes d’interprétation, les problèmes de la langue elle-même. Jusqu’au XVIII ème siècle, les traduction de la Bible en langue vulgaire étaient interdites (mais pas chez les protestants) ; le Coran incompréhensible pour les ¾ des musulmans qui ne sont pas arabophones – rappelons-le – est en arabe littéraire archaïque, donc très difficile d’accès. D’où la nécessité des intermédiaires…

 

Comment interpréter ? Citons Averroes, qui est typique de la démarche de tous ces commentateurs autorisés :

« Nous disons même plus : il n’est point d’énoncé de la Révélation dont le sens obvie [Direct, premier, évident. Vient du latin ‘ sur le chemin ‘ ; a donné obvious en anglais] soit en contradiction avec les résultats de la démonstration, sans qu’on puisse trouver, en procédant à l’examen inductif de la totalité des énoncés particuliers du Texte révélé, d’autre énoncé dont le sens obvie confirme l’interprétation, ou est proche de la confirmer. »

Cela veut-il dire qu’en cas de besoin et pourvu qu’une assertion suffisamment vague écrite par ailleurs le confirme, on puisse faire dire à une sourate le contraire, ou en tout cas autre chose que ce qu’elle semble affirmer ?

Seulement les contradictions avec les connaissances scientifiques balbutiantes de l’époque étaient mineures, il s’agissait surtout de contradictions internes au texte (Comment pouvait-il y avoir de jours avant la création du Soleil tournant autour de la Terre ? Comment Dieu pouvait-il demander aux hommes de tuer Caïn s’il n’y avait que ses parents ?) et d’anthropomorphisme trop marqué (Dieu avait-il un corps, pouvait-il se mettre en colère, vouloir se venger, etc. ?).

À la Renaissance, avec Galilée (début du XVII ème siècle) les contradictions vont devenir explosives. La Bible affirmait la fixité de la Terre[3], je cite, vue son importance :

« 10.12  Alors Josué […]parla à l’Éternel dit en présence d’Israël :

‘Soleil, arrête-toi sur Gabaon,

Et toi, lune, sur la vallée d’Ajalon ! 

10.13. Et le soleil s’arrêta, et la lune suspendit sa course,

Jusqu’à ce que la nation eût tiré vengeance de ses ennemis.

Cela n’est-il pas écrit dans le livre du Juste?

Le soleil s’arrêta au milieu du ciel,

Et ne se hâta point de se coucher, presque tout un jour. »

 

Quant à Galilée, il défendait mordicus le modèle de Copernic qui prétendait la Terre comme les autres planètes en mouvement autour d’un Soleil fixe. L’affaire était d’importance : n’oublions pas que le dominicain Giordano Bruno avait été longuement torturé puis brûlé vif en 1600, notamment pour avoir soutenu cette opinion. [Raconter l’histoire de la statue de Giordano Bruno érigée en 1849, puis détruite par Pie IX, reconstruite en 1889, malgré Léon XIII menaçant de quitter Rome en cas d’érection  ; en 1929 aux accords du Latran, Pie XI reprit espoir, mais Mussolini refusa…]. La Bible n’était peut-être pas un livre de Science, mais l’Église catholique l’a superbement ignoré jusqu’à la fin du XIX ème siècle. 

 

La question de savoir si la Terre est réellement immobile et centre de l’Univers ouvre une bataille cruciale qui va opposer l’Église catholique à Galilée. Comme beaucoup de batailles historiques, elle a souvent été décrite comme une image d’Épinal où un camp arriéré et inculte s’opposait à un génie incompris et solitaire incarnant le progrès.

C’est une vision naïve parce que, dans une large mesure, ce fut un combat mené au sein de l’Église elle-même, avec l’acceptation par tous de sa règle du jeu – la Bible comme parole divine, donc incontestable : jusqu’au XVIII eme siècle, les savants (les intellectuels) étaient tous croyants, voire hommes d’Église, mais bien sûr avec des responsabilités différentes. Par ailleurs, Galilée était loin d’être isolé ou ignoré (à ce propos, se méfier de tous les incompris scientifiques qui se réclament de Galilée !). À l’égal de Kepler, il était honoré comme un des meilleurs mathématiciens de son temps. Il a  longtemps été le protégé de bien des prélats et en particulier de Maffeo Barberini, le futur pape Urbain VIII, qui le fera néanmoins condamner en 1633.

La critique nécessaire de cette vision naïve ne doit cependant pas faire oublier qu’il s’est bien agi d’un tournant historique dans la façon de penser la connaissance. Galilée explique dans un passage célèbre du Saggiatore (1623) :

« La philosophie est écrite dans ce livre gigantesque qui est continuellement ouvert à nos yeux (je parle de l’Univers), mais on ne peut le comprendre si d’abord on n’apprend pas à comprendre la langue et à connaître les caractères dans lesquels il est écrit. Il est écrit en langage mathématique. »

C’est une rupture avec l’idée dominante que le livre de la nature était écrit en langage biblique que les savants se devaient d’interpréter (de justifier ?). Galilée se moque de ceux qui pensent « chercher la vérité ni dans le monde, ni dans la nature, mais […] dans la confrontation des textes ». En 1610, tombe la première condamnation de la doctrine de Copernic, jugée :

« stupide et absurde, et fausse en philosophie, et formellement hérétique, car elle contredit explicitement, et en de nombreux paragraphes, les sentences de l’Écriture Sainte, lue selon le sens propre des mots et l’interprétation commune des saints Pères et des théologiens. »

En 1633, c’est maintenant la condamnation explicite de Galilée pour avoir contrevenu à cet interdit et, sous la menace de torture, l’abjuration du vieil homme.

Quelle a été la défense de Galilée ? Pour lui, chaque fois que la raison et l’expérience semblent contredire le Livre Saint, c’est qu’on l’aura à tort interprété littéralement, sans comprendre qu’il avait été écrit pour être compris de gens à l’époque ignorants. Les « erreurs » qu’on croit y déceler font en quelque sorte partie d’une pédagogie divine inévitable aux temps de Moïse mais le devoir des savants modernes, sous peine de ridiculiser les Écritures, est de ne pas en rester prisonnier. Voilà pourquoi Dieu – bien qu’infaillible – a jugé bon d’écrire ainsi. Quant aux commentaires des saints Pères allant dans le sens de l’interprétation littérale, il faut reconnaître – malgré tout le respect qu’on leurs doit – qu’il étaient des ignorants. Lactance, tout Père de l’Église qu’il était, ne croyait-il pas la Terre plate ?

« On m’objecte que tous les Pères, en commentant les passages des Écritures relatifs à cette question, s’accordent à les interpréter selon le sens le plus simple, en s’attachant à la pure signification des mots, et que par conséquent il n’y a pas lieu de leur attribuer un autre sens ou de modifier l’interprétation commune, puisque cela reviendrait à accuser les Pères d’inadvertance ou de négligence.  En guise de réponse, je dis que je reconnais le respect qui est dû aux Pères et qui n’est pas sans raison, mais j’ajoute que nous pouvons leur trouver une excuse toute prête : s’ils n’ont jamais interprété les Écritures dans un sens différent de celui qui résonne dans les mots utilisés pour aborder ces questions, c’est parce que l’opinion de la mobilité de la Terre était à leur époque totalement ensevelie et que non seulement personne n’en discutait par écrit ni la soutenait, mais qu’elle ne faisait même pas l’objet d’un débat. »

En ce qui concerne cependant « le salut de l’âme », comme il est peu probable qu’aucune expérience mette jamais en défaut le Livre Sacré, Galilée juge plus sage d’en conserver le sens littéral :

« Voilà pourquoi aux articles qui concernent le salut et le fondement de la foi, articles dont la solidité est telle qu’elle ne court jamais le risque d’être ébranlée par aucune doctrine valide et effective, il serait sans doute hautement recommandable de ne pas ajouter d’autres articles de foi sans nécessité. »

S’agit-il de prudence, ou de concession de Galilée vis-à-vis d’une affirmation qui n’engage à rien ? On n’ose parler d’insolence…

En quoi Galilée se démarque-t-il des  commentateurs  qui l’ont précédé et de pas mal de ceux qui vont le suivre, notamment musulmans ? Il ne considère pas les « deux Livres » comme des points de départ symétriques. Je cite : 

« Si on demande par où l’on doit commencer pour s’assurer de sa fausseté [de la doctrine de Copernic], s’il faut partir de l’autorité des Écritures ou bien de la réfutation des   démonstrations et des expériences des philosophes et des astronomes, je réponds qu’il faut commencer par le lieu le plus sûr et qui est le moins propre à provoquer un scandale. Ce qui veut dire qu’il faut commencer par les raisons naturelles et mathématiques. Car, si les raisons qui prouvent la mobilité de la Terre se révèlent être fallacieuses […] »

on aura alors, pour notre savant florentin, prouvé que la simple lecture du Livre Saint était suffisante et tout va bien,

« […] mais si ces raisons [du mouvement de la Terre] devaient se révéler vraies et nécessaires, aucun préjudice n’aura pour autant été porté à l’autorité des Écritures. »

La conclusion est évidente :

« Par conséquent, commencer par les arguments rationnels est une voie sûre dans tous les cas. »

 

 

 

En bref, Galilée, à la différence des tous les autres :

 

1-Distingue soigneusement les affirmations fausses de Dieu infaillible, – mais commises  à des fins pédagogiques – de l’erreur due à l’ignorance des docteurs de la foi, qui, hommes de leur époque, en répètent une lecture au premier degré.

 

2-N’hésite pas à contredire tel ou tel verset de la Bible sans l’appui d’un autre ni de l’autorité d’un dignitaire reconnu. 

 

Cette attitude ne bride pas la science. C’est, pour moi, la seule tenable pour les croyants des temps modernes qui ne veulent pas l’ignorer.

 

Quelles ont été les positions de l’Église ?

 

Sur Galilée

Contrairement à une légende, Galilée n’a pas été réhabilité. La difficulté pour comprendre la position du Vatican tient à ce que toutes les déclarations papales sur Galilée, comme sur tous les autres sujets,  prétendent être en continuité[4] : chaque pape se réfère positivement au précédent.  Comment, dans ces conditions, adorer ce que l’on a – presque – brûlé ? Il s’agit donc plus exactement de glissements progressifs. On ne saisit l’évolution de l’Église qu’en sautant plusieurs papes. En nette contradiction avec Urbain VIII (en 1633), le pape Jean-Paul II (en 1992) apprécie le théologien, mais se méfie du physicien, puisque Galilée, à son époque, ne pouvait pas prouver la mobilité de la Terre, comme Bellarmin[5] l’avait si justement affirmé. Pour Jean-Paul II, je cite : il y eut un « tragique malentendu » et  « les torts étaient partagés ». La démonstration de la mobilité de la Terre qui utilisait l’argument des marées était fausse, et donc l’Église a eu raison de la refuser ; par contre son interprétation des Écritures était novatrice et finalement salutaire pour l’Église.

Il est vrai que l’argument des marées a joué un rôle important pour notre physicien et il était faux, mais ce n’était pas le seul argument. Surtout c’est cette (re)lecture du procès de Galilée qui est anachronique :

L’Église ne s’est pas opposée à Galilée sur la base de ses erreurs en physique[6], mais bien parce qu’il a défendu la primauté de la démarche aujourd’hui caractérisée de scientifique sur la démarche obscurantiste, c’est-à-dire fondée sur le Texte sacré et l’autorité des anciens  (Aristote et les Pères de l’Église).

À l’époque, personne n’avait vu la faute de Galilée : il n’y a qu’à lire in extenso les cinq pages d’attendus de la condamnation, nulle part n’est évoqué une quelconque faute de raisonnement, seul le refus de l’autorité des saints Pères est invoqué.

 

Plus généralement sur la Science

Disons deux mots sur une certaine évolution de l’Église : très schématiquement, on peut distinguer une Église rationnelle, en tout cas à partir du bas Moyen Âge (XIII ème siècle), s’appuyant sur Aristote, puis une Église antirationaliste (antiscientiste ?) jusqu’au XX ème siècle. Voici des extraits de Providentissimus Deus, Lettre encyclique, donnée à Rome, près de Saint-Pierre, le 18 novembre de l’année 1893 :

 

DE SA SAINTETÉ LE PAPE LÉON XIII

« Maintenant, nos adversaires principaux sont les rationalistes, […] Or, il est trop évident, qu’autant les sciences naturelles sont propres à manifester la gloire du Créateur gravée dans les objets terrestres, pourvu qu’elles soient convenablement enseignées, autant elles sont capables d’arracher de l’esprit les principes d’une saine philosophie et de corrompre les mœurs lorsqu’elles sont introduites avec des intentions perverses dans de jeunes esprits. […] Les livres entiers de l’Ancien et du Nouveau Testament, dans toutes leurs parties, […] doivent être regardés comme sacrés et canoniques. L’Église les tient pour sacrés et canoniques non parce que, rédigés par la seule science humaine, ils ont été ensuite approuvés par l’autorité de ladite Église; non parce que seulement ils renferment la vérité sans erreur, mais parce que, écrits sous l’inspiration du Saint-Esprit, ils ont Dieu pour auteur’. »

 

On n’est pas très loin ici d’une Bible qui, comme le Coran, serait incréée, c’est-à-dire constituée des paroles de Dieu.

 

L’Église de Jean-Paul II est plus subtile. Elle peut aller jusqu’à se revendiquer des travaux modernes d’Isabelle Stengers, d’Ilya Prigogine, d’Edgar Morin, de la mécanique quantique, de la théorie du chaos, voire des théorèmes de Gödel pour justifier, avec l’onction des plus grands savants, l’inintelligibilité de ce bas monde par la seule science. En effet on ne voyait jadis aucune contradiction entre la connaissance de la nature (la physique) et le Livre ; la vérité étant une, tout devait concourir à l’admiration de l’œuvre du Seigneur. Las ! les progrès de la science vont rendre cette concordance moins évidente, d’où la lutte contre « le scientisme borné ». Mais, Dieu soit loué ! le salut va venir des sciences elles-mêmes lorsqu’elles vont – apparemment – remettre en cause l’horrible déterminisme matérialiste. Jean-Paul II dans un catalogue à la Prévert, en tout cas, difficile à suivre pour un scientifique, affirme :

 « Les mathématiques n’ont cessé d’être perfectionnées, aussi aujourd’hui la topologie permet d’écrire des modèles mathématiques qui permettent de rendre raison des phénomènes vitaux ; des philosophes de la nature comme Edgar Morin ou Prigogine et Stengers le montrent avec éclat. Si les ruptures avec l’aristotélisme sont déjà anciennes puisqu’elles commencent dès la Renaissance, un autre pas a été franchi en biologie au cours de ces dernières années. Les modèles issus de la science de l’information et de la cybernétique décrivent le devenir. Les modèles cybernétiques introduisent la téléonomie et renouent avec la finalité. Les équations de la thermodynamique montrent une tendance naturelle vers l’ordre et donnent sens aux expressions telles que ordre par fluctuation, ordre à partir du chaos, car des interactions sont mises en œuvre selon des lois rigoureuses exprimées dans le langage mathématique. Le devenir est ainsi saisi par la science mathématisée. »

Notons maintenant, comme déjà signalé, un certain retour en arrière de Benoît XVI, que ce soit sur le procès de Galilée ou le darwinisme. Il n’a, de son point de vue, pas tort ; la religion ne doit pas chercher à être aimable, mais « vraie » : à force de vouloir coller au siècle, la religion risque de s’y dissoudre.

 

J’ai davantage développé les relations entre la science et l’Église catholique plutôt qu’avec les religions protestantes, juives ou musulmanes. Pour une raison simple : cette première a une représentation officielle appuyée sur une hiérarchie bien contrôlée, avec papes et sous-papes : cardinaux, évêques tirant par délégation leur légitimité de saint Pierre. Elle est structurée comme une Internationale (contre révolutionnaire). Il est donc relativement facile d’en suivre l’évolution. Rien de tel chez les autres religions ; par exemple Luther et Calvin, pères fondateur du protestantisme, ont condamné bien avant le Pape le système de Copernic, puis, silence et on verra très vite pléiade de savants protestants adhérer, sans problème à la doctrine maudite. Citons ce joli passage de Kepler, protestant, contemporain de Galilée :

« Sans doute la langue de Dieu est-elle quelque chose d’important, mais le doigt de Dieu n’a pas moins d’importance. Et qui niera que la langue de Dieu n’ait été adoptée à son dessein et, à cause de cela, à la façon ordinaire de parler des hommes ? Par conséquent détourner la langue de Dieu dans les choses absolument évidentes pour qu’elle réfute le doigt de Dieu dans la nature, voilà ce que toute personne vraiment religieuse évitera le plus possible. »

Et peu ou pas de réaction de son Église !

 

L’affaire « des deux Livres » est le problème récurrent des chrétiens, juifs et musulmans. À chaque fois que la lecture du « Livre de la nature » sera contrainte par celle du « Livre sacré », le résultat est catastrophique ; l’Église s’est systématiquement opposée à toutes les découvertes scientifique majeures : à Copernic sur le mouvement de la Terre, à Buffon sur l’âge non biblique de la Terre, puis à Darwin sur la théorie de l’évolution. Idem, mais on sort de mon sujet, sur les questions de mœurs (accouchement sans douleur, avortement, contraception, divorce). [Voir deux témoignages  accablants de l’état des lieux par deux auteurs croyants :Georges Minois : L’Église et la science, histoire d’un malentendu sur l’enseignement  chrétien aux XIX et XX ème siècles et Nidhal Guessoum : Réconcilier l’Islam et la science moderne, L’esprit d’Averroès, sur l’enseignement actuel dans les pays musulmans.]

 

Alors, Le Coran et la Bible contre la science ou à côté ?

 

Lus par des athées, de la même façon qu’ils lisent tous les autres livres, le Coran ou la Bible offrent des récits extrêmement poétiques et emberlificotés qui narrent des histoires mythiques et affirment une vision archaïque du monde (physique et morale). En fait les mécréants sont très proches des religieux : ces derniers considèrent toutes les autres religions (Baal l’assyrien, Râ l’égyptien, Jupiter, etc.) comme des idolâtries. Toutes, sauf la leur ! La leur, celle qui leur a été racontée par leur parents est vraie, pas celle héritée des parents des autres : les chrétiens se moquent des musulmans qui estime que Dieu préfère qu’on lui sacrifie des « vaches jaunes et de couleur unie » et qui propageraient la religion barbare du Djihad ; mais ces mêmes chrétiens croient, sans rire, à la virginité de Marie et au mystère du vin qui se change réellement en sang ; ce Pape qui attaque le Coran comme essentiellement guerrier, non seulement a oublié les croisades (anciennes et modernes) mais cherche à béatifier Pie XII qui voyait dans le fascisme (de 40 à 60 millions de morts) un moindre mal !

Pour les croyants, alors qu’on insistait jadis sur la clarté du texte, on se prévaudra maintenant de son obscurité pour interpréter. Mieux, on identifiera obscurité avec profondeur. En histoire, comme en physique, comme en biologie, comme en morale. Notons que  cette interprétation évolue en permanence, pas grâce aux textes, mais en dépit de ceux-ci, contraints par les progrès moraux et scientifiques de la société. Le travail des commentateurs est alors un travail permanent d’arrière-garde qui vise à sauver ce qu’on peut de la « révélation divine ».

 

À côté ou contre ?

Par leur origine, nourris des croyances antiques, les Livres sacrés sont évidemment en dehors de la science moderne ; par contre, leur ânonnement ad nauseam qui continue au XXI ème siècle dans les yeshivas (juives) ou madras (coraniques) est clairement dirigée contre[7] : c’est l’apprentissage de l’irrationnel, de l’autorité de Dieu et plus concrètement de ses lieutenants sur Terre. Ceci concerne des dizaines de millions de jeunes.

 

Cet abrutissement a évidemment des causes et des conséquence politiques (par exemple, la Bible justifierait la colonisation juive en Palestine) ; mais c’est un autre sujet. Comme est un autre sujet, la dynamique de la lutte de ceux qui pensent combattre l’obscurantisme en restant à l’intérieur des moules sacrés. Je crois que s’ils ne vont pas jusqu’à la lecture des textes « à la Galilée », ils seront défaits.   

 

Les « relativistes » scientifiques, ceux qui considèrent que le point de vue scientifique n’est ni plus ni moins fondé qu’une croyance[8], font la part belle aux littéralistes religieux : qui peut croire en effet les scientifiques qui affirment que la Terre est âgée de 4,55 milliards d’années, que l’homo sapiens est apparu il y a quelque deux cent mille ans à la suite d’un long processus, etc. alors la science est une opinion comme une autre ?

 

 

 

 

Sur les raisons de croire.

 

Il y a d’abord des raisons « indiscutables », comme la foi et/ou la tradition culturelle. Impossible donc de les discuter.

Il y a ensuite des raisons « rationnelles », donc discutables. 

– Pour les catholiques, il y a les miracles. La position officielle est maintenant plus hypocrite. On parle davantage de « témoignages », plutôt que de réalité.

– Au Moyen-Âge, c’est le Dieu créateur et le « premier moteur » d’Aristote : Quicquid movetur,  ab alio movetur. (ce qui est en mouvement doit bien avoir été mis en mouvement [par Dieu]). Galilée et Newton vont mettre à mal cette théorie, par le principe d’inertie, en rendant ce « moteur » inutile.

– Au XVIII ème siècle, ce sera alors le vicieux du « un peu de science éloigne de Dieu, beaucoup en rapproche » répété par Pasteur : on découvre l’extraordinaire complexité du vivant. C’est la fable du révérend Paley : pas d’horloge (les mécanismes subtils du vivant) sans horloger (Dieu).  

Darwin va briser cet « intelligent design » partagé par à peu près tous les savants jusqu’à la deuxième moitié du XIX ème siècle. Comprendre que les « temps profonds » (Terre âgée de 4,55 milliards d’année, supérieures au 6000 ans de la Bible !) sont à la fois  très difficiles à imaginer mais – hélas ! – indispensables pour expliquer l’effectivité du mécanisme darwinien et donc la complexité du vivant ; ils rendent  compte également de la simplicité du système solaire (preuve pour Newton de l’existence du Créateur).

Je conclurai par un dialogue rapporté entre Laplace et Napoléon :

« Monsieur de Laplace, je ne trouve pas dans votre système mention de Dieu ?

Sire, je n’ai pas eu besoin de cette hypothèse […] Cette hypothèse, Sire, explique en effet tout, mais ne permet de prédire rien. En tant que savant, je me dois de vous fournir des travaux permettant des prédictions. »

 

 

 

 

 

Annexe I

 

La science a aujourd’hui mauvaise presse. Une des raisons est qu’on a fréquemment voulu faire passer pour vérités scientifiques « indiscutables »[9] des choix à forte charge politique. Le pas est alors vite franchi : on pourrait faire dire n’importe quoi à la science. De plus, le grand public ne connaît la science que par ses applications, des meilleures aux pires ; voilà pourquoi l’euphorie qu’elle a engendrée au XIX ème siècle laisse aujourd’hui place au scepticisme, en tout cas dans les pays riches.

 

Ce désenchantement, accentué par la « découverte » que le progrès scientifique ne coïncide pas nécessairement avec le progrès social, explique le succès d’un relativisme mondain, doutant du statut particulier de la connaissance scientifique : la démarche scientifique, comme toute construction humaine, ne pourrait échapper à sa détermination sociale. Il y aurait la science des blancs, des noirs, des femmes, des minorités opprimées[10], etc. Mais la science tout court serait une mystification. Cette désillusion a également favorisé le renouveau de divers fondamentalismes religieux, soit sous leur forme caricaturale comme le créationnisme, soit sous la variante plus présentable du « dessein intelligent ». Pour Galilée, le livre de la Nature était écrit dans le langage mathématique. Pour les littéralistes (tenants d’une lecture à la lettre des Livres sacrés),il serait figé dans l’écriture de la Bible ou du Coran.

 

Ce nouvel obscurantisme s’exprime différemment suivant les contextes. 

 

Schématiquement, on assiste, d’une part dans les pays développés – mais pas exclusivement[11] -, à un rejet croissant de la science ; d’autre part, dans les pays pauvres – mais pas exclusivement[12] non plus -, à un développement des fondamentalismes religieux.

 

Dans les pays riches, le rejet de la science se nourrit de la croyance que ses applications industrielles ou militaires seraient les conséquences inéluctables du développement scientifique. Beaucoup de ces applications, dont les motivations sont en fait économiques ou politiques, affectent la santé, l’emploi[13] ou l’environnement avec des effets souvent jugés négatifs ou dangereux. Les réactions sont alors salutaires. Mais ces réactions risquent d’être stériles si les protestataires prennent pour argent comptant la propagande même des groupes de pression, propagande qui justifie des options éminemment politiques ou sociales par des nécessités prétendument   « scientifiques ». Admettre la responsabilité de « la science » dans ce type de décisions et donc renoncer à l’utiliser pour, éventuellement, questionner ces options, c’est capituler en rase campagne en abandonnant l’avantage de la rationalité au camp adverse.

 

Dans les régions pauvres, le maintien de la mainmise brutale des principales puissances économiques suscite une réaction naturelle de défense de la part des populations qui en sont les victimes. Dans les pays de culture islamique, après le recul des mouvements nationalistes laïques, le renouveau des fondamentalismes religieux apparaît souvent comme une forme radicale de résistance matérielle et culturelle. Ailleurs, la prolifération de sectes évangéliques, malgré des implications politiques différentes, assure la même fonction : allier une entraide matérielle réelle à une exigence de dignité, voire de rédemption morale. Il ne s’agit pas tant ici d’une régression par rapport à la rationalité du siècle des Lumières que ces pays n’ont pas ou peu connue, que d’une identification de cette rationalité aux « bienfaits de la civilisation occidentale ». La lutte nécessaire contre les superstitions religieuses devra tenir compte de cette méfiance.

 

 

 

 

 

Annexe II

 

 La plus grande confusion règne sur le mot science. Il peut désigner, au moins :

(1) Outre la somme des connaissances acquises, la recherche rationnelle de lois permettant de comprendre (et d’agir sur) les processus de la nature (voire de la société) et aboutissant à des résultats universels, c’est-à-dire indépendants de la personnalité de celui qui les énonce (même s’il est en général, aujourd’hui, mâle, blanc, écrivant l’anglais et d’origine sociale plutôt favorisée) ; ces lois sont donc en principe  testables par toute fraction de la communauté humaine.

(2) Les institutions publiques[14] et privées censées l’organiser et la financer (avec le poids des intérêts sociaux et  politiques correspondants).

(3) L’ensemble des conséquences pratiques des recherches qui vont de   l’invention du BCG à la bombe à neutrons en passant par le maïs transgénique[15], bien souvent appelé la technoscience.

 

Certes, ces trois acceptions sont liées : la recherche (1) est le fait d’hommes vivant en société et aujourd’hui regroupés pour la plupart dans de puissants organismes (2) qui doivent se justifier socialement(3). Le relativisme est tout à fait justifié s’il s’applique aux définitions (2) et (3) de la science : il est effectivement sain de ne pas confondre Recherche avec Ministère de la Recherche (ou pire encore, Ministre de la Recherche !), Justice avec Ministère de la Justice. Mais il peut déboucher sur un scepticisme stérile, voire sur l’obscurantisme, quand il s’applique à l’acception (1) de la science. Bertrand Russell classerait probablement la science au sens (1) dans la catégorie des « connaissances » et celle des sens (2) et (3) dans celle du « pouvoir ». Ces catégories ne sont pas étanches : l’effectivité du pouvoir s’appuie évidemment sur celle des connaissances. Mais les logiques de développement sont distinctes, voire antagoniques. Il n’y a qu’à considérer le statut de la libre circulation des informations et la question des brevets !

Bien entendu, la définition (1) représente un idéal.  La recherche scientifique au sens premier est le fruit de savants qui sont des hommes (plus rarement des femmes) plus ou moins imbus des préjugés de leur époque. Prenons un exemple presque caricatural ; quand Cuvier (un des plus grands savants du XIX ème siècle) parle des noirs comme de  « La plus dégradée des races humaines, celle des nègres, dont les formes s’approchent le plus de la brute, et dont l’intelligence ne s’est élevée nulle part au point d’arriver à un gouvernement régulier[…] », c’est le pair de France de Louis-Philippe  qui exprime les préjugés de sa caste ; les relativistes en concluent qu’à la science  « on peut faire dire n’importe quoi » . Nous pensons qu’il est beaucoup plus utile de faire l’effort de démontrer qu’avec ces propos-là, Cuvier a clairement quitté le terrain scientifique tel que défini en (1). Il nous semble juste de dire que Cuvier a déraillé. Mais pour dérailler, il faut avoir défini des rails.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Bibliographie

 

Auteurs dont je ne partage pas les vues – les titres sont significatifs -, mais fort bien documentés sur la nature de l’enseignement dans les mondes chrétiens et musulmans. Peuvent être lus en diagonale.

 

Georges Minois, « L’Église et la science. L’histoire d’un malentendu », Fayard 1991.

 

Nidhal Guessoum, « Réconcilier l’Islam et la science moderne, L’esprit d’Averroès », Presses de la Renaissance, 2009.

 

 

Auteurs dont je partage les vues sur la science, la religion et la philosophie.

 

Jacques Bouveresse,

« Prodiges et vertiges de l’analogie. De l’abus des belles-lettres dans la pensée », Raison d’Agir, 1999.

« Peut-on ne pas croire ? », Agone, 2007.

 

Jean-François Revel,

« Histoire de la philosophie occidentale, de Thalès à Kant », Nil, 1994.

 

Bertrand Russell,

« Science and Religion », Trad. fr. Philippe-Roger Mantoux « Science et Religion », Gallimard, 1971.

 

Alan Sokal et Jean Bricmont,

« Impostures intellectuelles »,  O. Jacob, 1997.

 

Richard Dawkins,

« The Blind Watchmaker », Trad. fr. Bernard Sigaud « L’horloger aveugle », Robert Laffont, 1999.

 

 

Sur la valeur de la Bible comme récit historique :

 

Israel Finkelstein and Neil Asher Silberman,

« The Bible Unearthed: Archaeology’s New Vision of Ancient Israel and the Origin of Its Sacred Texts », Trad. fr. Patrice Ghirardi « La Bible dévoilée », Bayard, 2002.

« David and Salomon. In search of the Bible’s sacred kings and the roots of western tradition »,Trad. fr. Patrice Ghirardi, « Les rois sacrés de La Bible.  À la recherche de David et Salomon », Gallimard, 2006,

 

Shlomo Sand,

« Comment le peuple juif fut inventé », Fayard, 2008.

 

 

Une compilation  passionnante des lettres de Galilée défendant sa vision de la lecture de la Bible.

 

Galilée,

« Écrits Coperniciens », LGF – Livre de Poche, 2004.

 

 

 


[1] Encore que sur les mœurs, il y a cinquante ans seulement, il n’y avait pas grand chose de choquant, par ex. droit de vote des femmes, ouverture d’un CCP pour les femmes mariées, homosexualité, le délit d’adultère (en 1975 encore), etc. un peu de mémoire !

[2]            Un parallèle un peu superficiel, mais éclairant : Aragon, par exemple savait bien que l’URSS n’était pas  le paradis sur terre, que c’était une image seulement , mais il ne le disait pas ; par contre, des  centaines de milliers de  travailleurs (en Europe occidentale) le croyaient au sens littéral.  (Ne pas désespérer Billancourt !).

[3]       Chez les musulmans également, on peut lire dans le hadith 3124, vol 4, tiré de  l’Authentique de Boukhari, qui fait autorité :

      Ô mon Seigneur ! retiens-le dans sa course, qu’il nous éclaire. Le Soleil fut

     alors arrêté, jusqu’à ce que Allah eût donné la victoire à son prophète.

            Mais ce hadith n’a pas joué dans le monde musulman un rôle analogue à l’épisode du Livre de Josué pour les chrétiens. La chanson de Roland contient également un récit analogue.

[4] C’est une sorte d’infaillibilité de fait ; elle n’a rien à voir avec l’infaillibilité ex cathedra en matière de foi ou de mœurs.

[5]            Prélat qui a fait brûler Giordano Bruno, puis  « conseillé la prudence » à Galilée. Sera néanmoins (?) sanctifié puis nommé « docteur de l’Église » en 1931. C’est la plus haute distinction : il y des milliers de saints, mais seulement une trentaine de docteurs !

[6] Il est d’ailleurs difficile d’admettre qu’on menace quelqu’un du bûcher pour une faute de calcul !

[7]            L’absence de grands scientifiques en Espagne et au Portugal où l’Inquisition a été la plus terrible, la stagnation scientifique du monde arabo-musulman après l’âge d’or, l’apparition tardive de scientifiques juifs doivent peut-être se trouver en rapport avec cet abrutissement.  

[8]            Ce relativisme, souvent exprimé par la gauche, représente généralement une  critique justifiée, mais dévoyée, d’applications scientifiques  aux conséquences  désastreuses. L’identification de la science à ses applications est aussi ridicule que la confusion de la justice avec le Ministère de la Justice. Voir l’Annexe II.

[9] Ce   qui est déjà bizarre : le propre des idées scientifiques est d’être  vérifiables, donc discutables !

[10] Rappelons que dans un contexte plus tragique, la science devait être « aryenne » sous Hitler et « prolétarienne » sous Staline.

[11] Voir, par  exemple, le retour prôné par certains à la science « védique »   (traditionnelle) en Inde, comme opposée à la science réputée « occidentale ».

[12] Voir aux USA, pays  riche pourtant, la survivance, voire le développement des sectes.

[13] Ce n’est pas nouveau : au XIX ème siècle, le sabotage qui consistait à jeter son sabot dans les engrenages pour casser la machine  a été décrit comme un moyen de s’opposer au « progrès » de la science.

[14] Il existe, par exemple, une Société Française de Physique, et non, heureusement (encore), une Société de Physique Française. Lorsqu’on ajoute un adjectif à science (aryenne, allemande, juive, française, prolétarienne,    féministe, etc.) on décrit souvent bien autre chose.

[15] Les discussions sur les OGM sont souvent révélatrices de la confusion à ce propos. Être pour ou contre les     OGM me semble un positionnement mal défini : il est tout à fait légitime de défendre l’intérêt de la recherche dans ce domaine et se montrer hostile à son exploitation par Monsanto.


 

 

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