L’empire extractiviste. Vols, dette illégitime et réchauffement climatique

Intimement liés, dette et extractivisme, soit le pillage inconditionné des ressources naturelles de la planète, sont facteurs d’injustice, de corruption, et de violences sociales et environnementales.

Président du Comité pour l’annulation de la dette du tiers monde (CADTM France), Nicolas Sersiron livre ici une réflexion développée dans son livre Dette et extractivisme. La résistible ascension d’un duo destructeur (éd. Utopia, 2014). Elle s’ajoute à des textes précédemment publiés par la revue autour du thème de l’extractivisme.

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L’extractivisme est une dépossession, la dette publique illégitime en est un levier et elle en est aussi une forme. L’intrication des deux aboutit à un transfert colossal de richesses — ressources naturelles, ressources humaines et ressources financières — des appauvris vers les enrichis. Les détenteurs du pouvoir économique, financier et politique — les grands actionnaires des multinationales et des banques — sont les bénéficiaires de cette spoliation. Dette et extractivisme sont le carburant et le moteur de la mégamachine produisant toujours plus d’inégalités et de gaz à effet de serre (GES).

 

Conquête des Amériques, esclavage, colonisation et extractivisme

La conquête du monde par l’Europe, a débuté il y a cinq siècles avec la « découverte » des Amériques, ses pillages et massacres. La violence des armées d’occupation — imposant l’esclavage pendant la période du commerce triangulaire puis le travail forcé de la période coloniale — a permis de voler les ressources naturelles, pendant quatre siècles. Après le départ des armées coloniales, au milieu du 20e siècle, la violence physique a été remplacée par la férocité de la dette illégitime. Rendu volontairement invisible pour la très grande majorité des citoyens du monde, sans brutalité apparente, elle impose, aux peuples de la planète qui la subisse, de travailler toujours plus pour la rembourser, alors qu’ils n’ont pas profité des emprunts faits par leurs gouvernants. Les pillages extractivistes des ressources naturelles et la destruction des écosystèmes entraînent des désastres incommensurables pour le vivant : humains, animaux, végétaux… Quant aux jeunes et aux générations futures, leur avenir est sacrifié, oublié, réchauffé, pollué, déforesté, asséché, par les conséquences de l’extractivisme.

L’extractivisme, ce nouveau mot, utilisé ici dans un sens large, recouvre toutes les formes et les moyens d’appropriation de la Nature et du travail par des entreprises, sans payer le prix des ressources extraites, ni celui de ses conséquences : déchets, pollutions, réchauffement, pertes de territoires, destructions du biotope… L’extractivisme est un pillage car il ne prend en compte ni la finitude des ressources ni les dégâts environnementaux et sociaux qu’il provoque. Vol gigantesque des communs il est un triple pillage : celui des ressources naturelles (végétales, fossiles, minières), celui des ressources humaines mais aussi celui des ressources financières, les trois se renforçant par leur interdépendance.

 

L’extractivisme des ressources naturelles

Il y a quelques centaines d’années, l’or et l’argent de la mine de Potosi en Bolivie n’ont pu enrichir la royauté espagnole puis le reste de l’Europe qu’au prix de la mort de 6 millions de mineurs indiens et d’esclaves africains forcés de travailler six mois sans sortir dans des conditions barbares : chaleur, manque d’oxygène, faim, silicose, épuisement… Il n’y aurait pas eu de tabac, sucre, coton, café, vanille, bois tropicaux, diamants, métaux précieux, etc., débarqués dans les ports européens sans le commerce triangulaire : traite transatlantique, déportation de dizaines de millions de jeunes Africain-e-s réduits en esclavage soumis au « Code noir » de Louis XIV pour « conditionner l’outil esclave ». Ces derniers, arrivés jeunes, ne vivaient guère plus de 8 à 9 ans.

« Lorsque les Blancs sont venus en Afrique, nous avions les terres et ils avaient la Bible. Ils nous ont appris à prier les yeux fermés : lorsque nous les avons ouverts, les Blancs avaient la terre et nous la Bible. » (Jomo Kenyatta)1

Comme un trou noir en astrophysique, l’extractivisme avale dans une extrême violence, toutes les ressources de la planète, pour les fondre dans l’immense chaudron du capitalisme depuis que l’Europe est parti à la conquête du monde. Il est le fondement de la richesse des actionnaires, de la puissance dévastatrice de leurs multinationales et bien sûr du pouvoir de leurs pays d’origine, les pays néo-colonisateurs, dits « développés ». Sa face cachée est l’appauvrissement des extractés-pillés et les dégâts environnementaux considérables. L’extractivisme existe sous différentes formes. Celui des ressources finies, dont la limite sera bientôt atteinte, comme certains métaux comme le cuivre, et les 80 % d’énergies fossiles qu’il faudra laisser dans le sol pour ne pas réchauffer au-delà de la limite des 2°C. Mais aussi celui des ressources renouvelables quand les extractions dépassent la capacité de régénération des écosystèmes. Les immenses bancs de morues de Terre neuve surpêchés, la fertilité des sols détruite, la déforestation massive par l’agriculture industrialisée privant la planète d’un grand régulateur du climat et des pluies, les nappes phréatiques asséchées par des revendeurs d’eau en bouteilles, par des extractions minières, ou l’agriculture productiviste…

L’esclavage, le travail forcé ou/et sous-payé sont des formes de l’extractivisme. Ainsi, en est-il des plus de 1 100 ouvrières du textile, mortes dans l’écroulement du Rana Plaza au Bangladesh en 2013, alors qu’elles ne voulaient pas monter dans l’immeuble déjà dangereusement fissuré. Une interdiction d’entrer avait été publiée par des inspecteurs. Menacées de licenciement par leur patron, elles ont été contraintes d’y aller pour ne pas perdre les deux dollars par journée de 10 h de travail (20 cents de l’heure), qui leur permettaient de faire survivre leur famille.

Faim, pauvreté et guerre sont les moyens et les conséquences de l’appropriation par les nantis des ressources naturelles, humaines et financières. Quand la dette illégitime n’a pas suffisamment asservi et affaibli un peuple ou un pays, alors les moyens militaires ou policiers sont utilisés par les décideurs pour maintenir la continuité des pillages extractivistes. La guerre d’Irak en 2003, celles de Libye, Mali, Centrafrique, ou les massacres et viols par millions au Congo RDC ces dernières années, ne sont-elles pas des guerres extractivistes ? Que ce soit pour conquérir de nouvelles ressources comme le pétrole irakien ou pour conserver la mainmise sur d’anciennes comme l’or du Mali, la cassitérite du nord Kivu pour la high-tech ou l’uranium du Niger à Arlit, et tant d’autres. Si le mouvement Al-Qaïda au Sahel n’avait pas été repoussé du Mali par l’armée française, l’approvisionnement, à des prix très bas, de 40% des centrales nucléaires aurait été fortement compromis dans le pays le plus nucléarisé au monde par habitant, la France. Selon Azaoua Mamane du Niger :

« La population a hérité de 50 millions de tonnes de résidus radioactifs stockés à Arlit et Areva continue de pomper gratuitement 20 millions de mètres cubes d’eau par an pendant que la population meurt de soif. Les rues et les habitations d’Arlit sont construites à l’aide de résidus radioactifs et la nappe phréatique usée et contaminée s’assèche par la faute d’Areva. » (« Manifestation anti-Areva au Niger », LeMonde.fr, 12.10.2013)

Les filons d’or ont aujourd’hui disparu. Pour obtenir 2 à 5 gr d’or, il faut broyer une tonne de roches aurifères, utiliser de grandes quantités d’énergie, de métaux, d’eau et de cyanure pour la lixiviation. Les pollutions de l’eau et de la terre sont énormes que ce soit à Cajamarca au Pérou ou à Catamarca en Argentine et dans bien d’autres lieux.

Sans faire une liste exhaustive de tous les extractivismes comme celui de l’eau douce, des réserves halieutiques par la pêche industrielle, des sites éoliens par la finance spéculative, du sable qui fait disparaitre plages, îles et sols alluvionnaires, il est impossible de ne pas évoquer les terribles accaparements des terres fertiles et de l’eau d’irrigation par les spéculateurs. Ce pillage agricole renoue avec les premières enclosures du 16ème siècle en Angleterre et les dépossessions de la période coloniale. « L’Afrique sans les africains, le rêve blanc du continent noir » titre d’un livre de Stephen Smith, se réalise dans un silence assourdissant.

Dettes odieuses, illégitimité et plans d’ajustement structurel

Les emprunts des pays colonisateurs comme ceux des dictatures sont des dettes odieuses pour un nouveau gouvernement. Si l’emprunt a été fait sans le consentement du peuple et qu’il ne lui a pas profité alors que le préteur le savait, la dette est odieuse et le régime suivant n’est pas tenu de la rembourser. Des ports en eau profonde ou des chemins de fer permettant d’acheminer les ressources naturelles des colonies pour l’exportation ont été financés par des prêts de la Banque mondiale après la Seconde Guerre mondiale. Des pays surendettés comme la France de cette époque ont alors bénéficié de ces facilités pour pouvoir mieux piller leurs colonies. La société de consommation, exportée par l’ « ami » américain après la guerre, se développait en Europe très rapidement, alors que la reconstruction du pays nécessitait un surcroit d’importation de matières premières. Les armées coloniales parties, comment assurer la continuité des pillages ?

Dès les indépendances, la Banque mondiale, a imposé à des pays libres le remboursement d’une dette clairement odieuse. Le système dette était né, et avec lui le néocolonialisme. Mais comment a-t-elle procédé pour réussir ce transfert asservissement à des pays libres ? Quant un véritable démocrate était porté au pouvoir par son peuple, souvent un résistant nationaliste, comme Lumumba au Congo, Sankara au Burkina, Allende au Chili et bien d’autres, il contestait le remboursement de la dette illégitime comme la continuité des pillages extractivistes. Les services secrets occidentaux se chargeaient alors de l’éliminer ou de fomenter une guerre civile : réseau Foccart, CIA, etc. Il était aussitôt remplacé par un responsable corruptible que les anciens pays colonisateurs se chargeaient de corrompre avec des prêts et des aides liées. Remboursements illégitimes, appauvrissements des populations et pillages extractivistes en tous genres pouvaient alors continuer voire même s’amplifier sous la férule d’une bourgeoisie locale corrompue. La richesse de Mobutu au Zaïre dans les années 90, devenue RDC depuis — pays aux sous-sols les plus riches de la planète — était égale à la dette du pays.

Depuis plus de 30 ans, les plans d’ajustement structurel, les PAS, ont été infligés aux pays du Sud, par des préteurs comme la Banque mondiale et le FMI. Plus récemment, ils ont été imposés aux pays d’Europe du Sud sous le nom de plans d’austérité. Que ce soit en Afrique ou aujourd’hui en Grèce, le résultat a été un très violent appauvrissement de la population et une augmentation de la fortune des plus riches. Quant à la dette, elle a souvent continué à augmenter comme en Grèce et partout en Europe, même si au Sud elle a pu diminuer momentanément grâce à l’augmentation du prix des matières premières exportées. Ces PAS, conditionnalités accouplées aux prêts de secours, sont des armes de destruction massive des peuples. Ainsi, ils ont permis au grand capital d’imposer, entre autres, le libre-échange et la liberté de mouvement des capitaux. La baisse drastique des droits de douane à autoriser les produits du Nord, issus de l’agro-extractivisme subventionné, de concurrencer de façon déloyale voire de ruiner les agricultures familiales et vivrières du Sud. Quant aux multinationales elles ont été encouragées à racheter les entreprises publiques des pays en développement pour quelques cacahuètes, avec la possibilité de rapatrier leurs bénéfices librement, appauvrissant là encore peuples et gouvernements.

Mais les PAS ont surtout imposé aux pays dits hypocritement « en développement » l’obligation d’exporter leurs ressources naturelles à l’état brut, dans la continuité de la période coloniale. C’était le but. Les paysans ont été encouragés à faire des cultures de rentes exportables (bananes, café, cacao…) plutôt que de l’agriculture vivrière et les gouvernements ont été poussés à augmenter les extractions minières exportées à l’état brut. Emplois et plus-value issus de la transformation ont été réservés aux pays industrialisés. Les mines étant entre les mains des multinationales, les pratiques de vol sur les quantités, de contrats léonins et de prix de transfert à travers les paradis fiscaux ne leurs ont laissé que des miettes… Lesquelles ont été en partie exportées pour le remboursement des dettes illégitimes. Hold-up parfait !

 

Dette écologique

Miroir inversé du capitalisme, elle est la somme des externalités négatives accumulées au fil des siècles par les pillages extractivistes. Elle n’a jamais été compensée ni réparée et continue de grossir. On peut la diviser arbitrairement en quatre dettes. En posant que l’extractivisme est non seulement le pillage des ressources naturelles mais aussi celui des ressources humaines indispensables à leurs extractions, l’esclavage durant les trois-quatre siècles du commerce triangulaire et ensuite le travail forcé de la période coloniale, ont créé une dette éco-historique. C’est la première. Sinon comment comprendre que l’Europe soit mille fois plus riche que l’Afrique subsaharienne aujourd’hui, alors qu’au temps des colonies, le niveau de vie d’un paysan ardéchois, berrichon ou suisse était semblable à celui d’un paysan sénégalais, camerounais, ou burkinabé.

La seconde, la dette sociale, est celle subie par les peuples ayant perdu leur territoire et leurs moyens de vie du fait des accaparements de terres et des dépossessions de leurs richesses naturelles, minières, fossiles et végétales (déforestation, désertification du fait de monocultures coloniales, etc.) au profit de bourgeoisies locales corrompues mais surtout des riches pays du Nord, principalement de leurs multinationales. Les immenses bidonvilles du Sud comme la persistance des maladies infectieuses, Ebola, paludisme, tuberculose… la pauvreté et la faim n’en sont-ils pas les preuves accablantes ?

La troisième, la dette environnementale, est celle accumulée par les désastres environnementaux, déforestations, pollutions diverses, déchets et la disparition définitive des ressources par le pillage.

La dernière est la dette climatique. Les pays les moins avancés, les PMA, n’ont qu’une responsabilité insignifiante voire nulle dans le réchauffement mais ils sont les premiers à en subir les conséquences et n’ont pas les moyens financiers ni techniques d’y faire face. Je n’oublie pas les générations présentes et futures qui doivent et devront gérer pollutions et déchets sans jamais pouvoir jouir des richesses pillées. Les migrations climatiques ont déjà commencé. Les pays du Nord et tous les détenteurs de capitaux ont donc une lourde dette écologique. Pourtant non seulement ils ne réparent, ni ne compensent mais ils osent contraindre les peuples du Sud à rembourser les dettes financières illégitimes.

 

Extractivisme et climat

Les énergies fossiles, pétrole, gaz, charbon, émettent après combustion beaucoup plus de CO2 que ne peuvent absorber forêts, terres agricoles et océans au point que l’on a dépassé les 400 particules de CO2 par millions (ppm). La densité en dioxyde de carbone de l’atmosphère était pourtant, depuis 800 mille ans, en dessous de 300 ppm. Selon l’AIE, la Banque mondiale, le GIEC… il faut laisser les 3/4 des énergies fossiles dans le sol pour ne pas dépasser la barre fatidique des + 2°C. Cela d’autant plus que la majorité des ressources faciles à extraire arrivent à épuisement. Alors qu’il y a un siècle au Texas, en plus d’une pioche, il suffisait d’investir 1 baril de pétrole pour en obtenir 100, l’EROIE2 était alors de 100, aujourd’hui avec un baril investi on obtient seulement 2 à 2,5 barils de pétrole au Canada avec les sables bitumineux de l’Alberta. Sans parler des quantités astronomiques d’eau transformée en vapeur pour diluer l’huile mélangée au sable. Selon Philippe Bihouix, la densité de métal dans les minerais étant de plus en plus faible, il faut de plus en plus d’énergie et de métal pour l’extraction des dits minerais. Les difficultés pour extraire les énergies fossiles étant de plus en plus grandes — sables bitumineux, huile et gaz de schiste, puits en eaux profondes — il faut de plus en plus de métaux et d’énergie là aussi.

Conclusion, l’EROIE, partout en chute libre entraîne, une croissance rapide de la quantité d’énergie et de métaux nécessaires pour les extractions, et donc de GES émis. Ils ont été en croissance de 3 % par an ces dernières années. Ce qui doit remettre très fortement en question le mode de vie conso-gaspilleur “à l’occidentale” si nous voulons que nos enfants puissent encore profiter d’un reste de métaux et d’énergie fossile, sans avoir en plus à survivre dans un four. Les énergies renouvelables, les ENR, même généralisées, ne permettront jamais de maintenir le gaspillage énergétique actuel : l’EROIE des panneaux solaires par exemple ne dépasse guère 2.5, celui des agrocarburants est égale à 1. Il est même négatif pour ces derniers quand ils sont produits sur des terres déforestées par brûlis : soja amazonien, huile de palme indonésienne… Seule un passage rapide du gaspillage généralisé à un mode de vie économe en énergie permettra de faire face aux catastrophes climatiques : décroissance de l’hypermobilité et de la consommation de viande, relocalisation des productions agricoles et industrielles, habitat à très faible consommation d’énergie…

 

Agro-extractivisme et alimentation industrielle : malnutrition partout

L’économie ultralibérale fonctionne selon un cycle connu : extractivisme – productivisme – consumérisme – profits – déchets – pollutions, et l’agriculture productiviste en est l’exemple le plus emblématique. Mais pour que ce cycle apporte les profits désirés aux tenants de l’agrobusiness, il transforme les agriculteurs et les champs respectivement en fournisseur et puits de matières premières.

Selon la FAO, un tiers de la population mondiale ne mange pas suffisamment pour avoir une vie active et selon l’OMS un autre tiers est en surpoids ou obèse. Jean Ziegler comme Olivier de Schutter n’ont cessé de dire que nous produisions suffisamment pour nourrir 12 milliards d’humains. Alors quels rapports y a-t-il entre la dette illégitime, l’alimentation et l’agro-extractivisme ?

L’industrialisation de l’agriculture et son artificialisation est le plus grand crime de tous les temps commis contre le vivant. Les puissances qui en tirent profit sont, en amont, les industriels des pesticides, des semences brevetées, des OGM, des engrais, du pétrole, des machines, de la finance et des exploitations géantes (grains et méga fermes d’élevages), en aval, le grand commerce des grains, les transformateurs alimentaires particulièrement ceux de la viande et des produits laitiers, la finance spéculative (denrées alimentaires et terres), les grandes plates-formes d’achats et les supermarchés, et encore bien d’autres. Cela n’a été possible que par un lobbying politique intense, de la corruption et des mensonges pour en masquer les terribles externalités négatives. Ainsi, la « Climate Smart Agriculture » soutenue par la Banque mondiale comme la Nouvelle Alliance pour la Sécurité Alimentaire et la nutrition, la NASAN, portée par de nombreuses entreprises privées et des organismes publics, sont de dangereux oxymores. Outils de la croissance verte, ils ne visent — contrairement à leur titre écologiquement et socialement compatible — qu’à déposséder encore plus les petits paysans de leurs terres pour augmenter les surfaces dédiées à l’agro-extractivisme et les profits des multinationales cités plus haut. Et contrairement à ce qui est annoncé, la faim, la pauvreté dans les campagnes et le réchauffement climatique ne pourront que continuer à augmenter avec de tels projets. Le rapport de trois grandes ONG internationales « La faim un business comme un autre »3 est très clair. Selon eux, cette initiative « pousse les États africains à mettre en œuvre des mesures de dérégulation et d’ultra libéralisation de leur secteur agricole au détriment de l’agriculture familiale et paysanne ».

L’agro-extractivisme devrait être banni de toutes les campagnes du monde tant ses aspects négatifs sont incommensurables. Alors pourquoi l’étendre encore ? Réponse : la viande et les produits laitiers génèrent des profits colossaux qui seraient impossibles avec le commerce des seuls végétaux. Le productivisme agricole n’existerait tout simplement pas, si la consommation croissante des produits laitiers et de viande n’était pas instrumentalisée par les lobbies, la publicité mensongère omniprésente vantant leurs bienfaits et les gouvernements complices. Près de 80 % des terres agricoles de la planète sont consacrées à l’élevage : parcours, herbages, fourrages, grains. Les déforestations amazoniennes sont à 90 % causés par l’élevage et le soja pour la nourriture animale.4 Près de 70 % de l’eau douce est utilisée par cette agriculture, qui est de très loin le plus grand responsable des pollutions, air, terre, eau, et de la très grande majorité des pertes de la biodiversité planétaire. L’ensemble du système alimentaire des pays industrialisés produit de 44 à 57 % du total des émissions de GES selon le rapport de l’association GRAIN, « Souveraineté alimentaire : 5 étapes pour refroidir la planète et nourrir sa population »5.

Question : la viande est-elle nécessaire pour nourrir l’humanité et être en bonne santé ? Non. Des milliards d’humains sont encore végétariens (1/3 de la Chine et peut être la moitié de l’Inde). Selon « Le rapport Campbell », et bien d’autres auteurs, la nourriture carnée et les laitages seraient responsables d’une grande part des maladies modernes.

Sans l’extraction-pillage des phosphates, potasse, pétrole et gaz, sans l’utilisation des engrais azotés et des pesticides à base d’énergie fossile, et sans la consommation-pollution gratuite de 70 % de l’eau douce, ce système de production ne pourrait pas exister. Or cette agriculture issue des pays de la Triade, très fortement subventionnée, en surproduction permanente, exporte ses excédents. Nourrissent-ils au Sud les populations affamées ou en manque de nutriments et calories ? Celles qui peuvent les payer, oui, avec pesticides en supplément ? Pour les autres, c’est non. Les émeutes de la faim en 2008, quand les prix, suite à une spéculation effrénée, ont violemment augmenté, nous rappellent que ce système n’assure pas la sécurité alimentaire des villes ni même des campagnes.

Depuis l’imposition du libre échange par les PAS dans les années 1980, le blé importé dans les PED en provenance des pays industrialisés, en étant toujours moins cher — puisque vendu en dumping — que le mil produit localement, met en faillite les agriculteurs, comme le poulet congelé importé condamne les éleveurs. Ainsi l’agriculture vivrière, déjà soumise à l’obligation de faire des cultures de rente pour le remboursement des dettes, est encore affaiblie par cette concurrence déloyale. Les paysans ont été appauvris par la dette illégitime et l’agro-extractivisme. Les accaparements de terre en sont la conséquence directe et catastrophique pour l’avenir de l’humanité.

 

Accaparements de terres et « puits de pétrole » !

Préservées par des générations de paysans, les terres accaparées seront soumises par le système agro-industriel à une intense défertilisation. Et pire, beaucoup d’eau sera prélevée puis polluée par les engrais de synthèse et les pesticides. la fertilité des terres et l’eau virtuelle seront exportées sous forme de produits pour abreuver les voitures, nourrir les élevages des pays industrialisés ou parfumer et embellir les amours des plus riches avec des fleurs. Une surface équivalente à cinq ou six « France agricole » (150 à 200 millions d’hectares) aurait été accaparée ces dernières décennies selon GRAIN. Les habitants de ces territoires, ayant perdu leur autonomie alimentaire, iront grossir les bidonvilles à la recherche de nourriture et travail. Les surfaces dédiées à l’agriculture vivrière diminueront d’autant. Est-ce le but recherché ? Oui. Cela augmente fortement le commerce et les profits de l’agrobusiness et des spéculateurs internationaux. Ces junkies du profit ne veulent surtout pas savoir ni comprendre que l’agriculture locale nourrit encore 70% de la population mondiale, sans détruire la fertilité ni réchauffer la planète. L’agronome Jacques Caplat6 affirme qu’une véritable agriculture biologique, ne nécessitant pas d’intrants extérieurs, a de bien meilleurs rendements dans les pays du Sud que l’agriculture productivo-chimique.

Les accapareurs volent. En complicité avec les gouvernements, ils dépossèdent les populations alors contraintes par la force de quitter leurs territoires ancestraux et perdre leurs traditions culturelles. Elles qui n’ont jamais été aidées pour développer une véritable agroécologie. Cela leurs aurait pourtant permis d’accéder à une vie digne et autonome. Une alimentation sécurisée, des revenus stables, la vente des excédents leurs auraient donné la possibilité d’accéder à une éducation et une santé de qualité. Un rêve. La triste réalité est que le prix des locations à long terme (baux emphytéotiques) payé par les accapareurs aux gouvernements est dérisoire : plus ou moins un euro par hectare et par an. De fortes contreparties sont versées dans les paradis fiscaux et judiciaires aux responsables politiques. Les bénéfices pour les pays en emplois ou taxes sur les exportations sont insignifiants, les investisseurs obtiennent fréquemment des franchises fiscales. C’est ainsi que donner un titre de propriété aux petits paysans — action soutenue par la Banque mondiale — est, en réalité, un moyen pour la grande finance de leurs voler « légalement » les terres. Trop appauvris les paysans ne peuvent résister à une petite poignée de dollars versés par les spéculateurs pour le prix de leurs terres.

L’Éthiopie, pays où sévit encore la famine, a déjà cédé quelques millions d’hectares. Plutôt que de « voler » les terres des peuples, pourquoi ne pas donner aux populations locales les moyens financiers et techniques pour développer une agriculture efficiente et biologique ? Pas de profit pour les accapareurs, pas de spéculation sur les denrées alimentaires ni sur les terres ! L’agriculture vivrière ne profite qu’aux populations locales. Pourtant, piller la fertilité des terres et l’eau est un ethnocide, une mort culturelle, et parfois une mort physique, pour les peuples chassés de leurs territoires ancestraux et contraints d’aller vivre dans les bidonvilles.

 

L’illégitimité des dettes au Nord

La dette mondiale, privée et publique, augmente chaque année plus vite que le taux de croissance. En 2014 elle était proche de 200 000 milliards de dollars, soit 286 % du PIB mondial. Si le taux d’intérêt moyen avait été de 3 %, les préteurs de capitaux auraient recueilli, 7 000 milliards de dollars d’intérêts, soit les PIB cumulés de trois grands pays : France, Allemagne et Grande-Bretagne. Répartis entre les 1%, cela représenterait 700 000 dollars par personne et par an, entre les 0,1 %, 7 millions de dollars. Ces sommes considérables ne viennent, que de l’exploitation-extraction de la nature et du travail.

La dette publique illégitime, odieuse ou illégale, est une forme de l’extractivisme car elle contraint des peuples à payer des impôts aboutissant à l’« enrichissement sans cause » des détenteurs de capitaux. Il y a alors extraction-pillage de la plus-value produite par les travailleurs. N’y a-t-il pas aussi extractivisme financier quand l’argent prêté a été utilisé pour corrompre les décideurs d’un pays ou pour permettre à des entreprises privées de faire des profits à travers des éléphants blancs en Afrique, ou des « grands projets nuisibles imposés » comme le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes près de Nantes ou la future LGV entre Lyon et Turin à 27 Mds€ ?

Quand les citoyens d’un pays ne bénéficient pas des emprunts publics mais en sont les victimes, la dette est illégitime pour eux. Quand la décision d’emprunter a été prise par le parlement d’un pays, la dette est légale. Mais cela suffit-il à la rendre légitime alors que l’emprunt et les intérêts payés ne profitent qu’à quelques uns qui, le plus souvent, ne paient pas ou très peu d’impôts grâce à l’évasion fiscal dans les Paradis fiscaux ? Les scandales LuxLeaks et SwissLeaks, révèlent que de nombreuses grandes entreprises, des milliers de riches particuliers, même des narcotrafiquants, ont échappé à l’impôt ou/et à la police, dans des proportions considérables, en se réfugiant dans l’opacité des Paradis fiscaux et judiciaires. On connaît la phrase répétée ad nauseam, « les caisses sont vides ». En refusant de taxer entreprises, actionnaires et autres nantis, l’augmentation des impôts de monsieur Tout-le-monde et la baisse des salaires sont devenues, d’après nos gouvernants, les seules solutions pour maintenir la compétitivité de l’économie et le fonctionnement des services publics et des administrations. En réalité c’est un hold-up extractiviste : un vol pour remplacer un autre vol, celui fait par l’évasion fiscale des plus puissants. Merci aux lanceurs d’alerte d’avoir réussi à dévoiler les « pratiques totalement couvertes et protégées par des États laxistes comme le Luxembourg ou la Suisse. Résultat : un trou de 1.000 milliards d’euros en Europe dans les caisses publiques, à cause de l’évasion! »7

L’exemple de la dette publique française, près de 100 % du PIB en 2015, soit plus de 2 000 Mds euros est intéressant pour mieux appréhender le système de transfert des appauvris vers les enrichis organisé par la croissance de la dette publique. Un rapport du « Collectif pour un Audit Citoyen de la dette », le CAC, affirmait en 2014 que 59 % de la dette française était illégitime. Depuis la signature en 1992 du traité européen de Maastricht, les États de l’Union sont obligés de se refinancer auprès des banques privées. Or quand les intérêts sont plus élevés que le taux de croissance de l’économie, cela provoque un effet boule de neige. Le stock de la dette croit mécaniquement. Par ailleurs, depuis une trentaine d’années, les cadeaux fiscaux faits aux entreprises et aux ménages les plus fortunés ont mis le budget en déficit permanent. L’État, s’étant contraint à emprunter aux banques chaque année pour équilibrer ses finances, a fait gonfler, là aussi, la dette. Ainsi le CAC pointe que « l’impact combiné de l’effet boule de neige et des cadeaux fiscaux sur la dette publique est majeur : 53% du PIB (soit 1 077 Mds€). » Il note par ailleurs que si l’État, avait emprunté aux ménages ou aux banques centrales avec un taux de 2% « la dette publique serait inférieur de 29 points de PIB. » Bien que légales car votées par le parlement ces mesures sont-elles pour autant légitimes ? Est-il acceptable que les citoyens paient par l’austérité – privatisation-réduction des services publics et augmentation de leurs impôts — les intérêts d’une dette devenue obèse, alors qu’ils n’en sont pas responsables. Depuis 20 ans les dépenses de l’État en pourcentage du PIB on diminué de 2 points contrairement à la fameuse fable d’un peuple traité de cigales dépensières par son gouvernement. N’avoue-t-il pas, avec ce mensonge, qu’il est au service de la finance plutôt qu’à celui des citoyens ?

La Grèce de 2015 en est une terrible illustration du pillage d’un pays et de son peuple par la dette : en échange de ses prêts de secours, pour rembourser la dette publique, pourtant très majoritairement illégitime, odieuse ou/et illégale, la Troïka a imposé la baisse des salaires, retraites, services de santé (près d’un tiers des grecs ne sont plus assurés), vente et privatisation des terres, ports, plages, îles, mines et autres ressources naturelles. De plus, les prêts faits à la Grèce ont été transférés à 77% aux banques privées depuis le début de la crise, aboutissant à un pillage de ses ressources financières en transférant la charge de la dette des banques privées étrangères sur le peuple grec. La population, laissée dans un abandon social proche de celui des pays en développement depuis 30 ans — par les mémorandums de la Troïka — doit payer impôts et taxes pour rembourser une dette dont elle n’est pas responsable, avant de pouvoir se soigner et manger. La dette illégitime est bien en elle-même une forme d’extractivisme financier mais elle est aussi le levier, par les conditionnalités imposées avec les prêts, des autres extractivismes.

 

Luttes et alternatives

Notre planète, « Titanisée » par ses officiers-aux-longs-profits ne pourra être déviée de sa course suicidaire que par les citoyens du monde conscients que le pillage généralisé en est la cause essentielle. Demain ne pourra exister que s’il est post-extractiviste. De nombreux groupes de personnes agissent pour s’extraire de la gangue du conso-gaspillage à l’origine de ces pillages. En plus de détruire le monde ils ont compris qu’elle ne les rendra jamais heureux. Dans une course sans fin, les faux-besoins qui apparaissent chaque jour nous obligent à travailler toujours plus pour tenter de les satisfaire. La consommation, raison d’être de l’extractivisme, est une drogue dure. Le sevrage est un cheminement lent et difficile car il demande de décoloniser notre imaginaire, de réinventer-retrouver d’autres plaisirs. C’est en restituant la priorité à des valeurs de simplicité volontaire, sobriété heureuse, lenteur, collectif, solidarité, échange, partage, gratuité, harmonie avec la nature que nous pourrons lutter contre les valorisations instrumentalisées par l’idéologie ultralibérale telles que richesse matérielle, vitesse, compétitivité, individualisme, domination sur la nature.

Aller vers la vie bonne, le buen vivir des natifs d’Amérique du Sud, c’est comprendre que la recherche continuelle du mieux vivre par le toujours plus correspond nécessairement à du moins et du mal vivre ailleurs. Le réchauffement climatique en est un exemple terrifiant. Climatiser l’intérieur de sa maison ou de sa voiture l’été revient à réchauffer l’extérieur, le climat. En effet cela requiert une consommation supplémentaire d’énergie qui émettra des GES directement ou indirectement. Lesquels sont la source principale du réchauffement climatique impactant déjà les populations appauvris et fragiles du Sud. Alors qu’isoler les habitations préserve le climat. La société à réinventer urgemment sera nécessairement post-consumériste si nous voulons préserver l’ensemble des êtres vivants, l’avenir de nos enfants et petits enfants.

Le donner-recevoir-rendre, base des échanges entre les hommes depuis toujours, leur a permis de se constituer en société. Le respect de cette tradition est indispensable pour maintenir la paix8. Le temps qui passe entre le recevoir et le rendre nécessite la confiance. Ce temps est celui du crédit, de la dette. Ne pas rendre, ne pas rembourser, casse les liens sociaux. Le pillage extractiviste comme la dette illégitime sont des prendre sans rendre ni avoir reçu. Ils ne peuvent apporter que violence, conflits, guerre et pauvreté pour le plus grand nombre. La compétition pour le dépeçage de la nature est une rupture gravissime des échanges équilibrés qui ont permis et permettent encore de relier les humains entre eux et avec la nature sans qu’ils la détruisent ni s’autodétruisent. Une civilisation dont la valeur première est l’accumulation de l’avoir individuel ne peut déboucher que sur une barbarie globalisée. Elle est une négation de l’être en temps qu’individu relié aux autres par les cultures ancestrales. Or la croissance continue de la marchandisation ne peut qu’accentuer la rareté des ressources et le réchauffement. Ce qui provoquera l’effondrement à court terme de nos sociétés hypermatérialistes. Un monde de plus en plus interconnecté par l’échange des biens, des aliments, de l’énergie, de la finance, des informations… est un monde fragilisé car il a perdu son autonomie. Le chaos climatique augmente les risques de rupture, la disparition des ressources obère l’avenir, le nucléaire et l’agriculture productiviste sont dangereux et non pérennes, les gâchis impliquent de produire toujours plus dans un monde toujours plus fini. Un maillon casse et la chaîne se disloque. Si les villes ont pu tenir pendant les dernières guerres c’est bien grâce à l’autonomie productive et alimentaire des campagnes. Aujourd’hui c’est fini, il n’existe plus guère que l’agroextractivisme pour fournir l’industrie alimentaire, les supermarchés importent énormément et ils n’ont que trois jours de réserve. Une rupture de fourniture en énergie fossile, les camions qui ne roulent plus, les frigos qui s’arrêtent, provoquerait une famine immédiate.

Ce n’est pas la « croissance verte », cet oxymore, qui stoppera le chaos climatique et les désastres environnementaux. Face à nos angoisses sur l’avenir, avec un habillage fait d’arbres, de petites fleurs et de pseudo respect de la Nature, les extractivistes se déguisent pour continuer dépossessions et destructions. Ils ne sont que des dealers pour qui notre dose quotidienne de biens à gaspiller est le seul moyen qu’ils ont trouvé pour obtenir leur drogue mortifère : le profit. Ces junkies détruisent le monde, avec notre tacite consentement.

Nous sommes de plus en plus nombreux à comprendre qu’une économie post-extractiviste donc post-consumériste, est non seulement possible, mais éminemment souhaitable. L’urgence climatique impose la décroissance matérielle aux nantis des pays industrialisés, la justice sociale celle de la décroissance des inégalités. La malnutrition par la faim et le gavage de milliards d’humains comme le réchauffement climatique sont les monstrueux échecs du capitalisme ultra-libéralisé. Le monde est déjà d’une cruauté abominable, un effondrement ne pourra produire qu’un accroissement démentiel de la barbarie déjà existante. Alors que faire ?

Les alternatives, les résistances actives et passives sont de plus en plus nombreuses. Les passages à l’acte par des collectifs conscients augmentent chaque jour. Malgré le mur idéologique dressé par le TINA thatchérien [« There is no alternative« ], vrillé chaque jour dans nos cerveaux par les médias et les politiques, les résistances à l’effondrement et à la sauvagerie s’organisent. Ne pouvant en dresser une liste exhaustive, nous citerons quelques luttes essentielles. L’audit citoyen de la dette est indispensable pour savoir qui paient les impôts, dans quelle proportion, et ce qui est fait de l’argent des contribuables. Le parlement grec a décidé de faire un audit citoyen de la dette. Une fois déterminée, la part illégitime ne devrait jamais être payée. Un audit ne pourra être efficace et juste que si les paradis fiscaux et judiciaires deviennent des enfers pour ceux qui y cachent leurs profits sans contribuer aux dépenses collectives. Pour lutter contre les inégalités et les pillages extractivistes, ces deux combats sont primordiaux. La prime au voleur a fait des pilleurs extractivistes, banksters et autres spéculateurs les maîtres du monde d’aujourd’hui. En unissant les luttes des peuples du Sud à celles du Nord, nous pouvons redonner la primauté à la justice sociale, faire cesser la casse environnementale et reconstruire un avenir désirable.

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références

références
1 Jomo Kenyatta (1893-1978), leader politique puis président kenyan.
2 EROIE, energy return on invested energy, le retour d’énergie sur l’énergie investie.
3 « Rapport : la fin un business comme un autre », http://ccfd-terresolidaire.org, 16.09.2014.
4 Une montre que l’élevage bovin brésilien est responsable de 80 % de la déforestation de l’Amazonie : Agnès Stienne, « Quand l’industrie de la viande dévore la planète », Visions cartographiques, Les blogs du Diplo, 21.06.2012.
5 « Souveraineté alimentaire : 5 étapes pour refroidir la planète et nourrir sa population », Grain.org, 05.12.2015.
6 Jacques Caplat, L’agriculture biologique pour nourrir l’humanité, Actes sud, 2012.
7 Gilles Bridier, « SwissLeaks et LuxLeaks, de bonnes nouvelles pour la démocratie », Slate.fr, 10.02.2015.
8 L’histoire montre que rois et empereurs ont bousculé cette coutume primordiale pour construire des empires, des ordres hiérarchiques et des castes. Pourtant encore aujourd’hui ne pas rendre revient à couper les liens relationnels qui permettent de vivre avec les autres, de faire société. L’individualisme poussé à son paroxysme est une fracture qui isole et oblige à compenser par un consumérisme parfois compulsif. L’idéologie ultralibérale dominante ne veut pas des échanges gratuits et des liens induits par le donner-recevoir-rendre car son potentiel de profit est nul.