Paris 27-28 mai 2021 – Université Paris 8 / Campus Condorcet (Aubervilliers-Paris)
Le syndicalisme peut se définir, sur un plan général, comme un outil collectif de défense des intérêts matériels et moraux d’un groupe de salarié.es, organisé.es par métier ou par branche d’activité ou, de manière croissante au cours du XX° siècle, sur une base intercatégorielle. Le syndicalisme a pour acteurs et actrices, les ouvrie.res de l’industrie et des services, les salarié.es en col blanc mais également les travailleurs et travailleuses des campagnes, ainsi que les salarié.es en formation (si l’on prend le cas du syndicalisme étudiant).
Très tôt, dès la fin du XIX°, et indépendamment des régimes politiques au sein desquels ils évoluaient, les militant.e.s syndicaux ont posé la question des modalités d’action collective et de défense des intérêts moraux et matériels du mouvement ouvrier, entendu au sens large du terme. Dans les Amériques et en Europe, en fonction des époques historiques, des pouvoirs en place, des cycles économiques et en lien avec divers courants politiques, les syndicalismes ont connu des orientations et des modalités d’action fortement différenciés. Et c’est au cours de plusieurs cycles de conflits du/de travail que des fractions (souvent minoritaires) du monde syndical ont pu considérer la nécessité de mettre en œuvre des répertoires d’action rompant avec la négociation corporatiste et la lutte revendicative légale pour assumer diverses formes de ce que l’on pourra nommer provisoirement « syndicalisme de classe » ou « radical ».
L’action du Premier mai 1886 à Chicago et le massacre de Haymarket Square, qui lui succède, le 4 mai, sont, en ce sens, des moments fondateurs de la période à laquelle le Colloque sera consacré. Ainsi, depuis le mouvement anarcho-syndicaliste de la fin du XIX° et la structuration des Industrial Workers of the World, aux États-Unis, jusqu’à la cristallisation de nouvelles structures tendant à l’auto-organisation (et même à l’autonomie) par rapport aux structures syndicales dans les années 1960 et 1970, en Europe et dans les Amériques, en passant par les grands moments de conflictualité sociale marquant le « court XX° siècle », c’est toute la période que ce colloque entend interroger. En suivant la vaste littérature existante sur ce champ de recherche, il peut s’agir d’interroger des mouvements de résistance et de grèves de longue durée en défense des conditions de travail, des mobilisations syndicales fortement organisées autour de revendications plus directement politiques, telles que l’opposition à la guerre, à un régime considéré comme autoritaire ou vu comme opposé aux intérêts des classes populaires. Cela concerne également, dans certains cas, une conflictualité de travail qui revendique – et assume discursivement et en acte – la question de la « transformation révolutionnaire » de la société et s’affronte directement à l’appareil d’Etat.
Ainsi, la question de la violence populaire et de la légitimité (revendiquée ou rejetée) de l’action directe parcourt l’ensemble du XX°, à la fois en Europe, mais également dans les Amériques et la Caraïbe. Après la Seconde guerre mondiale, et notamment dans le cadre des diverses révoltes sociales qui vont caractériser « les années 1968 » (« mai 1968 » en France, « mai rampant » italien, vague de contestation en Europe de l’Est, « setentismo » en Amérique latine, « rank and file labor militancy » aux Etats-Unis), cette thématique va se réactualiser, à la fois dans les pays centraux du bloc occidental, dans les pays du Sud mais également à l’Est du rideau de fer. Cette séquence longue se clôture dans les années 1980, marquées par les derniers mouvements collectifs de résistance à l’imposition de la « révolution conservatrice » et néolibérale. On songera notamment aux grandes grèves de la sidérurgie lorraine, entre 1978 et 1979, au mouvement des mineurs boliviens contre la privatisation de COMIBOL, en 1984 et, bien entendu, à la grande grève des mineurs britanniques de 1984-1985, pour ne mentionner que quelques-uns des mouvements les plus emblématiques.
Ce colloque est appelé à être traversé par de multiples approches : études de cas spécifiques ou, à l’inverse, analyses sur la longue durée, travaux portant sur des trajectoires militantes individuelles ou, a contrario, sur des collectifs ouvriers, travaux basés sur des sources orales ou des archives non-exploitées, notamment, autant d’outils nécessaires pour jeter un regard renouvelé sur des séquences historiques parfois saturées en termes de production historiographique.
Les organisateurs et organisatrices entendent favoriser les approches insistant sur les transversalités, les échanges et les circulations (de pratiques, d’idées, de miliant.e.s) mettant l’accent sur le comparatisme, à la fois entre aires culturelles mais également entre différentes séquences historiques. De même, des perspectives issues de plusieurs disciplines seront recherchées, qu’elles soient issues de l’histoire et des sciences sociales, mais également des arts (visuels, cinéma, musique), du droit ou encore de la littérature. Enfin, le Colloque aura à cœur de faire dialoguer et débattre des universitaires confirmé.es et des chercheuses et chercheurs en thèse ou post-doctorat, au niveau hexagonal mais également au niveau européen et des Amériques, ainsi que des « grands témoins » ou des acteurs extra-académiques qui souhaiteraient y prendre part.
Les axes suggérés sont les suivants :
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Les communications pourront se faire en français, anglais, espagnol, italien et portugais.
La proposition de communication (1500-2000 signes), ainsi qu’une courte présentation bio-bibliographique de l’auteur.e, sera à envoyer avant le 30 novembre 2020 au Comité organisateur sur le site du Colloque : https://actiondirecte.sciencesconf.org/. Une réponse quant à l’acceptation ou non de la proposition sera donnée avant le 20 décembre 2020. Le Comité d’organisation et scientifique accepte les propositions de panels constitués (auquel cas, une présentation des trois ou quatre communications par panel sera demandée) mais se réserve la possibilité de les redessiner. Il est demandé aux participant.e.s de spécifier, dans leur proposition, les axes dans lesquels elles et ils s’inscrivent, de même que la langue de communication ainsi que la ou les langues parlées et/ou comprises de façon à travailler sur la cohérence des panels.
Ludivine BANTIGNY, Université de Rouen, GRHis
Franck GAUDICHAUD, Université Toulouse Jean Jaurès, FRAMESPA
Hélène HARTER, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, SIRICE
Antonio RAMOS RAMÍREZ, Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis, LER
Elisa SANTALENA, Université Grenoble-Alpes, LUHCIE
Jean Baptiste THOMAS, École polytechnique, CRLA-Archivos