La Commune au jour le jour. Dimanche 2 avril 1871

À l’occasion des 150 ans de la Commune de Paris, Contretemps publie du 18 mars au 4 juin une lettre quotidienne rédigée par Patrick Le Moal, donnant à voir ce que fut la Commune au jour le jour

***

L’essentiel de la journée

Versailles attaque, c’est un acte de guerre civile !

Malgré les mauvaises nouvelles de province qui s’accumulent, les communes défaites à Lyon, Narbonne, Saint-Étienne, Le Creusot, et celle de Marseille en difficulté, il n’y a pas d’inquiétude perceptible dans les cafés et les rues des quartiers populaires.

Dans la matinée pluvieuse, la population entend pour la première fois depuis la fin de la guerre le bruit de la fusillade et du canon : la guerre civile vient d’être déclarée par Versailles.

Il y avait bien depuis quelques jours des escarmouches entre les sentinelles avancées des troupes versaillaises et des gardes nationaux, mais sans grande gravité.

Ce matin c’est autre chose, une agression contre la Commune, contre les Parisien-nes.

Des responsables militaires de la Commune avaient organisé une reconnaissance vers le Mont Valérien, clef militaire à l’Ouest de Paris pour toute sortie vers Versailles.

Les gardes nationaux qui avançaient vers Courbevoie ont été pris sous le feu du Mont Valérien. Lors de l’avancée des gendarmes venant de Courbevoie vers le Pont de Neuilly accompagnée de bombardement, les premières victimes ont été les élèves d’un pensionnat de Neuilly. Les gardes nationaux ont reculé jusqu’à la porte Maillot, à cent mètres des fortifications. On ne connaît pas exactement le nombre fédérés morts, blessés et faits prisonniers.

Témoignage : Élie Reclus

Vers 9 heures du matin, les fédérés, postés au pont de Neuilly et aux alentours, dormaient encore dans leurs corps de garde, faisaient la popote, déjeunaient, prenaient leur café ou jouaient au bouchon, quand une masse indéterminée de troupes versaillaises, dont personne n’avait signalé l’approche, se répand à Courbevoie, Neuilly. Au rond-point, un garde national voit tout d’un coup une bande de soldats, […] le garde national tire aussitôt sur l’homme en tête et l’étend raide mort […] À peine a-t-il déchargé son fusil que lui-même tombe sous les baïonnettes, est achevé à coups de crosse, le poste tout entier est envahi, massacré, sauf quelques individus qui fuient de part et d’autre et que les balles n’atteignent pas. Sur le rond-point sont alors installés des canons et mitrailleuses qui dominent la grande et large avenue triomphale. Les Versaillais balayent Courbevoie et Puteaux, ils descendent sur Paris. Une patrouille de gendarmes avance jusqu’au pont de Neuilly et somme les gardes nationaux en faction de se retirer. Ceux-ci répondent en invitant les gendarmes à faire cause commune avec le peuple. Le Maréchal des logis donne l’ordre de charger, mais les gardes nationaux ripostent et les gendarmes se retirent. Plusieurs compagnies de gardes nationaux se lancent alors sur leurs traces, ils remontent jusqu’au rond-point. Là ils sont accueillis par la fusillade des zouaves de Charrette, embusqués derrière une barricade et qui les mitraillent aux cris de « Vive le Roy ! ». Surpris et décimés, les nationaux battent en retraite, zouaves, gendarmes, argousins et lignards derrière eux ; la bataille reflue jusqu’à la porte Maillot, qu’un instant on parut croire en danger. Survinrent alors les tirailleurs de la Presse, une centaine de volontaires garibaldiens qui rétablirent le combat. Peu à peu, les gardes nationaux arrivaient en foule […] Ce que voyant, les Versaillais battirent en prompte retraite de l’autre coté du pont. […] À partir de midi, tout rentre peu à peu dans le silence.

A la séance de la Commune, nombre d’élus condamnent les généraux pour avoir engagé cette reconnaissance sans consulter ni la Commune, ni la Commission exécutive.
Vers deux heures du soir, la Commission exécutive a fait placarder dans Paris la proclamation suivante :

A la Garde Nationale de Paris,

Les conspirateurs royalistes ont attaqué.

Malgré la modération de notre attitude, ils ont attaqué. Ne pouvant plus compter sur l’armée française, ils ont attaqué avec les zouaves pontificaux et la police impériale.

Non contents de couper les correspondances avec la province et de faire de vains efforts pour nous réduire par la famine, ces furieux ont voulu imiter jusqu’au bout les Prussiens et bombarder la capitale.

Ce matin, les Chouans de Charrette, les Vendéens de Cathelineau, les Bretons de Trochu, flanqués des gendarmes de Valentin, ont couvert de mitraille et d’obus le village inoffensif de Neuilly, et engagé la guerre civile avec nos gardes.

Il y a eu des morts et des blessés.

Élus par la population de Paris, notre devoir est de défendre la grande cité contre ces coupables agresseurs. Avec votre aide, nous la défendrons.

Paris, 2 avril 1871.

La Commission exécutive, BERGERET, EUDES, DUVAL, LEFRANÇAIS, FELIX PYAT, G. TRIDON, E. VAILLANT

Le rappel est battu dans tous les quartiers durant l’après-midi, les bataillons se massent dans l’avenue de Neuilly, face aux troupes versaillaises de l’autre côté du pont. Ils arrivent des quartiers Saint-Antoine, de Belleville, de Montmartre… L’opinion populaire veut répondre au coup de main versaillais sur Paris par un coup de main sur Versailles.

Dans la soirée, à cinq heures, Thiers crie victoire, annonce que ses troupes ont emporté la barricade du pont de Neuilly, faisant du côté des fédérés des morts, des blessés et des prisonniers, affirmant « l’exaspération des soldats était extrême, et s’est surtout manifestée contre les déserteurs qui ont été reconnus ».

C’est bien autre chose qui s’est passé que des soldats qui n’obéissent pas aux ordres et qui tuent des déserteurs. Cinq prisonniers, quatre gardes nationaux et un soldat de ligne des nôtres, ont été fusillés par les gendarmes au pied du Mont Valérien, et déposés les mains liées sur le quai de Puteaux à côté du pont de Neuilly. Cet assassinat est manifestement la première application d’une résolution prise par Versailles, le communiqué de Thiers en atteste. Ils sont prêts à tous les massacres, à l’exécution des prisonniers !

 

La réaction à cette agression

A sept heures, le citoyen Cluseret, que le Comité Central avait souhaité le 31 mars comme chef du département de la guerre avec mission de réorganiser l’administration de la Garde nationale, est nommé par la Commune cette fois-ci délégué à la guerre, conjointement avec le citoyen Eudes, et il entre immédiatement en fonctions. Ce choix marque la volonté à la fois de contrôler ce qui se passe au niveau militaire, mais aussi d’aplanir les différends avec le Comité central de la Garde nationale.

Les trois généraux défendent auprès de la Commission exécutive le désir des Parisien-nes, des bataillons de la Garde nationale de marcher sur Versailles, et proposent un plan d’attaque. Bergeret déclare aux membres de la Commune réunis que le Mont Valérien ne tirera pas sur les fédérés, Cluseret ajoute que la fraternisation des troupes annihilera la résistance versaillaise. Il est vrai que dans la journée, deux régiments versaillais se sont désagrégés, les 74ème et 113ème. Les Versaillais ont été sauvés par Gallifet qui a fait ouvrir le feu par la demi-batterie d’artillerie de la brigade de cavalerie sous la menace de son arme, imité par d’autres officiers : les artilleurs qui hésitaient à tirer ont fini par obéir.

Les membres civils de la Commission, au contraire, estiment que la Commune doit seulement se défendre pour montrer à la France qui est le fauteur de guerre civile. En outre ils estiment, comme Cluseret, que la Garde nationale, excellente pour la défense, n’est pas organisée pour une attaque, et ils pensent que la seule carte de l’enthousiasme ne pourra inverser cela.

 

Rossel emprisonné puis nommé chef d’état-major

Rossel était parti dans la nuit à la tête de 2000 hommes divisés en trois groupes commandés par Benoît Malon, Gérardin et le sous-chef de légion. Dès les premières escarmouches, certains bataillons se replient en désordre. Il ajoute « voyant l’impossibilité de conduire ces gens à l’ennemi, nous résolûmes de les faire rentrer en ville ». Mais les tensions avec les gardes lors du repli furent telles qu’il faillit se faire fusiller par ses soldats. À son retour à la mairie du XVIIeme, il veut faire le tri parmi les officiers, oubliant qu’ils avaient été élus ! On l’arrête, on le conduit à la préfecture de police où il est écroué.

Il sera libéré sur l’insistance de Benoît Malon et Gérardin et nommé le soir chef d’état-major de Cluseret.

Leurs conclusions résumées par Gustave Lefrançais demandent de remettre à la Commission exécutive un état détaillé, et par bataillons, des forces placées sous les commandements respectifs, un état d’armement de chacun des bataillons, un état de l’artillerie possédée par la Commune, ainsi que des affûts, trains et fourgons et matériel de rechange, un inventaire de toutes les munitions de guerre et l’indication précise de tous les dépôts et poudrières où ces munitions sont renfermées. Les généraux sont de plus invités à organiser immédiatement, en faisant appel aux bras disponibles et en requérant les matériaux nécessaires, les ateliers de réparation d’armes et de charronnage, afin de remettre promptement en état le matériel de guerre qui avait besoin d’être réparé. Enfin ils doivent s’assurer du service régulier des provisions de bouche nécessaires à toute offensive.

Témoignage : Adolphe De Balathier Braguelonne, 60 ans, journaliste à La petite Presse, journal anti-communard

Sept heures. Un grand nombre de bataillons de la Garde nationale montent l’avenue des Champs-Elysées. Nous en rencontrons trois autres sur la place de la Concorde.
De la rue de Rivoli débouchent plusieurs compagnies qui amènent des pièces de sept nouveau modèle. Les pièces sont traînées par de grands chevaux gris pommelé, qui sans doute ont été obtenus, par réquisition, de la compagnie des omnibus.
Des voitures de vivres suivent ces colonnes.
Beaucoup de femmes dans les rangs. Quelques-unes portent le fusil ou le sac.
Çà et là nous apercevons quelques zouaves et cinq ou six marins.

Près des Tuileries, nous rencontrons un autre bataillon dont la musique joue la Marseillaise.

À plusieurs reprises, nous entendons les passants crier : « Où allez-vous ? » et les gardes nationaux de répondre : « À Versailles ! ».
Des femmes exaspérées profèrent des menaces et des injures que nous ne pourrions reproduire.

[…]

Onze heures

Les Champs-Elysées sont déserts ; à peine, de loin en loin, quelque passant qui regagne son logis d’un pas précipité.

Trois bataillons de la Villette descendent l’avenue des Champs-Elysées et se croisent, à la place de la Concorde avec les bataillons qui s’en vont dans la direction du Corps législatif.

Échange de « Vive la Commune ! »

[…]

Sur la place Vendôme, la plus grande animation n’a cessé de régner le jour et toute la soirée. C’est un chassé-croisé d’ordonnances, d’officiers et de bataillons qui vont et viennent.
La place st transformée en vaste camp ; les feux s’allument, les cantines s’établissent, les hommes, au nombre de trois mille environ, bivouaquent en plein air.

Toute la nuit des bataillons se massent entre Neuilly et la porte de Versailles. L’enthousiasme et l’espoir du triomphe animent tous les cœurs. Combien étaient-ils mobilisés à la hâte, dans l’exaspération, la volonté de venger leurs camarades, des dizaines de milliers, cent mille hommes ?

Les généraux populaires, Bergeret, Eudes, Duval, Flourens, poussés par cette vague des quartiers populaires qui réclame la « descente torrentielle sur Versailles » préparent l’expédition de demain que Cluseret adopte.

Flourens propose départ dans la nuit même, pour profiter de la surprise. Eudes, Duval et Bergeret temporisent pour l’organiser, mais en fait ils n’ont pas le temps de le faire sérieusement.

 

Les mesures complémentaires contre Thiers et les siens

La Commune décide la mise en accusation des responsables de cette attaque et saisit leurs biens.

 La Commune de Paris,

Considérant que les hommes du gouvernement de Versailles ont ordonné et commencé la guerre civile, attaqué Paris, tué et blessé des gardes nationaux, des soldats de ligne, des femmes et des enfants ;

Considérant que ce crime a été commis avec préméditation et guet-apens contre tout droit et sans provocation,

Décrète :

Art. 1er. MM. Thiers, Favre, Picard, Dufaure, Simon et Ponthuau sont mis en accusation.

Art. 2. Leurs biens seront saisis et mis sous séquestre, jusqu’à ce qu’ils aient comparu devant la justice du peuple.

Les délégués de la Justice et de la Sûreté Générale sont chargés de l’exécution du présent décret.

La Commune de Paris

Par ailleurs, la Commune, constatant que diverses administrations publiques et particulières de Paris ont formé leurs employés de tout ordre en compagnies spéciales de la Garde nationale en dehors de tout service particulier, estime qu’il s’agit là d’un abus redoutable pour la sécurité générale. Elle décide qu’elles seront immédiatement versées dans les bataillons de la Garde nationale et leur demande de réélire leurs officiers.

Dans le journal La Commune. Dernière heure

Au moment de mettre sous presse, nous apprenons que l’Assemblée de Versailles s’est dissoute. Sans garantir cette nouvelle, que notre correspondant de Versailles fait d’ailleurs pressentir, nous trouvons la décision vraisemblable, car elle autorise les ruraux à se mettre à l’abri des éclaboussures de la bagarre qu’ils ont provoquée, mais dont ils ne veulent pas partager les risques. Les dispositions de l’armée et les opérations qui ont préludé à l’attaque ne sont probablement pas étrangères à cette sage résolution.

Nous attendons avec impatience la confirmation de cette nouvelle qui faciliterait singulièrement la solution d’un conflit aggravé par l’aveugle obstination des représentants villageois.

Le travail de la Commune continue : deux décrets majeurs sont adoptés :

1/ La séparation de l’Église et de l’État

Cette décision allait de soi, mais dépasse clairement les attributions d’une commune, montre l’aspiration à des décisions qui modifient en profondeur le système politique et social. La Commune décide ici pour l’État.
Le soutien de l’épiscopat à Louis-Napoléon Bonaparte après le coup d’état, les liens très forts entre l’Église et l’Empire, la place de l’Église dans la société, l’école, les hôpitaux, dans la morale imposée aux milieux populaires ont construit et entretenu une haine du « parti clérical » bien développée. Le catholicisme est une doctrine qui condamne les « erreurs modernes », le rationalisme qui menace de saper la société, qui pourfend le socialisme et le communisme. Les prêtres, le clergé, la hiérarchie catholique sont les personnes parmi les plus détestées. La complicité de l’Église avec Thiers et les Versaillais ne fait qu’accentuer un anticléricalisme omniprésent.

Dans la tradition sans-culotte, les propos contre la « race ignoble des prêtres », et les « gueuses de sœurs », les blasphèmes sont partout. La majorité des ouvrier-es parisien-nes est enterrée sans recevoir les dernières bénédictions. Le mouvement libre penseur est très puissant. Une explosion déchristianisatrice est en cours, dans le droit fil des sans-culottes.

La liberté de conscience est inscrite en tête des constitutions, alors qu’on a continué de rétribuer les cultes sur l’impôt qui pèse sur la totalité des citoyens, même ceux qui n’en pratiquent aucun. Le décret met donc fin à un état de choses qui est la négation du droit et du simple bon sens.

Quant à la reprise des biens appartenant aux corporations religieuses, le décret ne fait que restituer à la nation ce qui lui appartient de droit.

L’argumentation est simple et s’appuie sur les principes de liberté et d’égalité, le décret interdit de faire payer le culte par les athées, et fait mention de la complicité du clergé avec les criminels.

Les biens des congrégations sont considérables, le décret ne prévoit pas les modalités pour qu’elle deviennent effectivement propriétés nationales.

La Commune de Paris,

Considérant que le premier des principes de la République française est la liberté ;

Considérant que la liberté de conscience est la première des libertés ;

Considérant que le budget des cultes est contraire au principe, puisqu’il impose les citoyens contre leur propre foi ;

Considérant, en fait, que le clergé a été le complice des crimes de la monarchie contre la liberté.

Décrète :

Art. 1er. : L’Église est séparée de l’État.

Art. 2.          : Le budget des cultes est supprimé.

Art. 3. : Les biens dits de mainmorte, appartenant aux congrégations religieuses, meubles ou immeubles, sont déclarés propriétés nationales.

Art. 4. : Une enquête sera faite immédiatement sur ces biens, pour en constater la nature et les mettre à la disposition de la nation.

La Commune de Paris

2/ La détermination d’un salaire maximal dans les services communaux

Par services communaux, il faut entendre tous les services publics, civils et militaires. Cette mesure concerne donc beaucoup de monde.

La Commune de Paris,

Considérant :

Que jusqu’à ce jour, les emplois supérieurs des services publics, par les appointements élevés qui leur ont été attribués, ont été recherchés et accordés comme places de faveur ;

Considérant :

Que dans une République réellement démocratique, il ne peut y avoir ni sinécure ni exagération de traitement ;

Décrète :

Article unique. Le maximum de traitement des employés aux divers services communaux est fixe à six mille francs par an.

Hôtel de Ville, 2 avril 1871

La Commune de Paris

 

En bref

Le service de la presse est rétabli à la délégation de l’Intérieur. Les directeurs et gérants des journaux sont invités à vouloir bien y envoyer régulièrement les numéros de dépôt.

Pour combattre la vente à la sauvette de tabacs et de cigares, sans paiement des taxes , un arrêté interdit formellement la vente des tabacs sur la voie publique, précisant que les contrevenants seront poursuivis et leurs marchandises saisies, charge à la Garde nationale de le faire respecter.

Le service de la poste fonctionne dans Paris à partir d’aujourd’hui, c’est à dire la distribution du courrier et des mandats, grâce aux mesures prises par La Commune. Les salaires sont augmentés pour les bas échelons, les agents restés en place ont été réaffectés, promus, des citoyens ont été recrutés et ces volontaires non postiers assurent des tâches de distribution. Faute de timbres, l’affranchissement préalable se fait par un tampon ou une trace à la plume. Le système de franchise est établi pour les lettres simples entre les services administratifs dont le fonctionnement est vital pour la capitale.

Le travail continue pour assurer les communications avec la province et l’étranger.

 

Lettre d’ Herman Jung, horloger, militant socialiste suisse

Manchester, le 2 avril 1871

Cher Marx

Je lis dans le journal de Lloyd que Bastelica a été nommé directeur des bureaux et taxes à Paris. L’Internationale du 29 mars publie une proclamation de l’Internationale de Paris, proclamation dans laquelle figue le nom d’Aubry. J’ai vu encore ailleurs que quelques-uns de nos hommes de Lyon sont également à Paris. Je déplore la folie des nôtres qui, dans une hâte enfantine, se précipitent à Paris pour y récolter les profits d’une révolution avant d’en avoir assuré le succès. Que peuvent-ils faire de bon à Paris ? Ne seraient-ils pas beaucoup plus utiles dans leurs villes respectives et ne feraient-ils pas beaucoup plus pour le succès de la révolution en accomplissant leur devoir là ? Le mouvement de Lyon, de Marseille et d’autres endroits échoue parce que les chefs semblent avoir déserté leurs propres centres d’action.

Oh, si nos amis parisiens étaient assez intelligents pour jeter dehors ces gars-là, au lieu de leur donner des fonctions !

Il faut dire qu’une partie de Rouen étant toujours occupée par les Prussiens, nos amis n’y peuvent rien faire ; mais il est sûr que les Prussiens ne pourraient pas empêcher nos hommes de manifester d’une manière paisible leurs sympathies à leurs frères parisiens.

Je me rends dans l’East End et je compte qu’une nouvelle branche de l’Internationale sera formée cette nuit.

Mon bon souvenir à tous.

Fraternellement à vous .

H. Jung

 

En débat.

Tribune : extraits de l’éditorial de La Sociale bien dans l’esprit de la journée

 Qu’attendez-vous ?

L’action est engagée.

Des combats d’escarmouches ont été livrés.

Les zouaves du pape ont attaqué les postes des gardes nationaux.

[…]

La réaction a redressé la tête.

Tant pis pour elle !

La révolution ne peut tarder à marcher sur elle ; et les maisons de Versailles tomberont au son des tambours de Paris.

Ce n’est pas nous qui avons commencé, certes !

[…]

Il ne fallait pas nous provoquer.

On nous a poussé à bout.

Parti de l’Ordre, nous ne faisons que répondre à l’appel de vos clairons !

Et nous n’attendons plus, maintenant que le gant est jeté, que le signal de la Commune qui tarde trop à le donner.

S’il n’y avait à Versailles que des enfants du peuple, timorés ou égarés au profit des infâmes ministres de la capitulation, nous dirions, demain matin, au point du jour, au premier chant de la Diane, qu’on ouvre les portes de Paris, et puisqu’ils ne viennent pas vers nous allons vers eux, et mettons au bout de nos fusils un rameau d’olivier.

Mais il n’y a pas à Versailles que les troupes de la ligne, que des enfants du peuple.

Il y a à Versailles tous les sergents de ville, tous les gardes municipaux dont la conscience est souillée, dont les mains sont tachées de sang.

Il y a à Versailles les zouaves du pape, ce ramassis des gredins de toutes les nations, ces braves qui ont tenu tant d’années la République italienne dans la forêt de leurs baïonnettes.

Il y a à Versailles tous les officiers de bonne famille, les fainéants du capital et du parasitisme, les souteneurs de cet « ordre » qui consiste à ne rien faire et à vivre grassement en exploitant tout le monde.

Croyez-vous citoyens membres de la Commune, que la conciliation soit possible avec des gens de cette espèce ?

Pour nous, nous ne le pensons pas.
Et c’est pourquoi nous répétons comme hier :

FINISSONS-EN !