« Que faire ? » La question est classique mais elle revient sans cesse avec force, obsédante et puissante. C’est l’interrogation que soulève Ludivine Bantigny avec Romaric Godin et Razmig Keucheyan, dans une nouvelle série d’épisodes du podcast stratégique de Contretemps : « C’est quoi le plan ? ». Ce premier épisode revient sur l’analyse du stade actuel du capitalisme.
L’objectif de cet échange n’est pas seulement de l’étudier en lui-même, avec cet « ordre néolibéral » qui est, selon Romaric Godin, « la revanche du capital ». Mais il s’agit d’y réfléchir dans une perspective stratégique avant tout : non pas seulement économique mais politique. Autrement dit, la question que nous nous posons face à la violence exacerbée du capital dans la phase que nous lui connaissons désormais, face à la fascisation comme devant la catastrophe environnementale : que peut encore aujourd’hui un réformisme conséquent ? A-t-il toujours du sens ?
Romaric Godin est journaliste, spécialiste de macro-économie notamment, et auteur entre autres de La Guerre sociale en France. Aux sources économiques de la démocratie autoritaire (La Découverte) et de La monnaie pourra-t-elle changer le monde ? Vers une économie écologique et solidaire (10/18). Razmig Keucheyan est sociologue, professeur à l’Université Paris Cité ; il a publié, parmi d’autres ouvrages, Hémisphère gauche. Une cartographie des nouvelles pensées critiques ; La nature est un champ de bataille. Essai d’écologie politique ; Les besoins artificiels. Comment sortir du consumérisme (tous trois à La Découverte/Zones).
Cette discussion est centrée sur trois sujets complémentaires :
– un état du capitalisme, non seulement dans une analyse du stade où il est parvenu, mais pour une interrogation sur le néo-keynésianisme et la social-démocratie : sont-ils encore possibles au stade d’un déchaînement du capital et à la destruction méthodique du vivant ?
– un état de la gauche en France et tout particulièrement de La France Insoumise. Nous nous interrogeons sur l’articulation entre luttes sociales et perspectives électorales et regardons au plus près LFI, son programme, sa stratégie, ses batailles parlementaires comme son fonctionnement quotidien ;
– dans ce prolongement, la question toujours pleine d’acuité entre réforme et révolution, qui n’est pas une simple opposition. Nous sommes dans une période où il faut sans doute miser sur des stratégies diverses et imbriquées, sans sectarisme ni querelle de chapelle.
Durant cette discussion, nous soulevons en particulier la question des rapports entre stratégie et démocratie, entendue ici non seulement sur le plan institutionnel et politique, mais dans de nombreux domaines de nos vies, en particulier ceux, si décisifs, de la production et du travail. Ce qui pose évidemment, de manière liée, la question centrale de la propriété.