¡Pierre Salama, presente! Parcours d’un intellectuel engagé (1942-2024)

L’économiste marxiste Pierre Salama, spécialiste notamment de l’Amérique latine, auteur de nombreux livres mais aussi de plusieurs textes pour Contretemps, est décédé l’an passé. Nous lui rendons hommage en publiant ce texte de Matari Pierre et Alexis Saludjian, deux économistes qui furent ses étudiants et qui reviennent sur sa trajectoire intellectuelle et militante.

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Né le 11 aout 1942, en Alexandrie en Egypte, Pierre Salama est décédé en août 2024 à Paris. Il a été notre directeur de thèse dans les années 2000. A l’heure de présenter brièvement sa trajectoire académique et intellectuelle, il nous semble utile de souligner quelques détails concernant trois aspects : 1) sa formation et son parcours 2) la nature et orientation de ses travaux de recherche et, enfin, 3) les rapports entre ceux-ci et ses activités militantes.

1. Formation et parcours

La trajectoire académique de Salama ne peut être pleinement comprise que si elle est replacée dans le cadre de son engagement politique dès la fin des années 1950 dans le contexte des luttes anti-impérialistes et tiers-mondistes :

« J’ai eu la chance de vivre un moment exceptionnel, celui des luttes anti-impérialistes contre les guerres en Algérie d’abord, et au Vietnam ensuite » (…)  Adolescent, j’avais commencé à faire de la politique (chez les Jeunesses communistes quelque temps, contre l’arrivée de De Gaulle en 1958), puis j’ai continué en étant jeune étudiant (au sein de l’Union des Étudiants Communistes jusqu’à la fin de la guerre d’Algérie, puis par du syndicalisme à la faculté de droit, ce qui n’était pas facile dans un contexte d’héritiers de l’OAS) »[1].

Doué en mathématique, mais préférant l’économie, Salama obtient son diplôme de troisième cycle intitulé Le Modèle de développement de substitution d’importations en Argentine[2] (1967) sous la direction de Celso Furtado, , alors en exil en France à la suite du coup d’Etat contre le gouvernement de Goulart dont il était le premier ministre de Planification (1963-1964) :

« Furtado a été mon professeur pendant deux ans. J’ai été son assistant durant un an […] En France, dans les années 1960, les professeurs d’économie « spécialisés » sur le développement avaient peu connaissance de ce qui se passait, ou s’était passé, en Asie, en Égypte, en Inde et moins encore en Amérique latine. L’arrivée de Furtado en France les a pour le moins dérangés dans leurs certitudes et jouait comme effet de miroir de leur incompétence. »[3].

Cette rencontre sera déterminante dans la carrière de ce jeune chercheur alors sans aucun lien direct avec l’Amérique latine, et qui deviendra un latino-américaniste reconnu. Salama achève ses études en défendant une thèse de doctorat sur les limites de l’accumulation du capital dans les économies semi-industrialisées ainsi qu’une thèse complémentaire sur problème de la détermination du taux de salaire réel chez les néo-cambridgiens[4].

Il devient, après avoir réussi en 1976 son concours d’agrégation, professeur en Afrique (Gabon), puis à Lille, Amiens et finalement à Paris (Paris 13-Villetaneuse, aujourd’hui Université Sorbonne Paris Nord) où il deviendra professeur émérite en 2010. Dans ces institutions, notamment à Paris 13, il a assumé de nombreuses responsabilités scientifiques et administratives, aussi bien dans les écoles doctorales, en DEA, ou encore au Bureau des Relations internationales. Auteur de plusieurs dizaines d’articles et de livres, primé par la chaire Julio Cortázar, Salama a contribué à la formation de plusieurs générations de chercheurs critiques en Europe et en Amérique latine. Il obtiendra deux doctorats honoris causa.[5]

2. L’évolution de ses recherches

L’approche de Salama est pluridisciplinaire et comparative. Elle s’articule autour de la critique de l’économie politique, notamment de l’approche marxiste des contradictions et des crises. Il développe ses travaux initialement au sein de l’Institut d’études du développement de la Sorbonne (IEDES) où enseignait Furtado et où il tisse des liens étroits avec des chercheurs et exilés latino-américains.

Dans les années 1980, d’abord à Lille puis Amiens et enfin Paris 13, Salama mène ses recherches au sein de ce qui deviendra plus tard en 2001 le CEPN et se mobilise autour du Groupe de Recherche sur l’Etat, l’Internationalisation des Techniques et le Développement (GREITD), laboratoire crée par lui en 1983 et qui réunit des enseignants-chercheurs et doctorants qui travaillent principalement, mais pas exclusivement, sur l’Amérique latine. Les membres du GREITD proviennent pour l’essentiel de Paris I, Paris III-IHEAL, Paris X, Paris XIII, Amiens, mais aussi de Reims, Rouen, Cherbourg, Tours, du CNRS ou encore de l’IRD.

Parmi ses directeurs on peut citer Bruno Lautier et Robert Rollinat.Entre 1983 et la fin des années 2000, le GREITD devient un riche espace d’échanges, à l’initiative de colloques nationaux et internationaux sur des sujets d’actualité – comme les politiques d’ajustement structurel [6] – et nœud d’un large réseau de chercheurs et intellectuels engagés en Amérique latine, notamment en Colombie, au Brésil, au Mexique et en Argentine[7]. A contrecourant de la vague orthodoxe qui submerge les études sur le développement à partir des années 1990, Salama définira le GREITD avec humour comme des « petits soldats hétérodoxes portés par les problèmes du Tiers Monde à l’assaut des grandes armées d’économistes du « mainstream »

C´est la problématique du développement, saisie dans son double rapport avec l’accumulation et l’Etat, qui structure les recherches de Salama. À la différence des définitions alors courantes de ce concept, la plupart du temps associé à la croissance du PIB, la réflexion de Salama sur le développement est étroitement liée à son analyse du mode de diffusion des rapports marchands dans chaque formation sociale. 

« Les termes de « développé », « sous-développé », « en voie de développement » sont très fortement connotés. […] Lexpression « sous-développé » nest pas péjorative selon moi, mais si elle est ressentie comme telle, on peut utiliser des métaphores comme « émergent », « nouveau pays industriel », « semi-industrialisé », politiquement plus corrects peut-être mais qui ne permettent pas aussi facilement de souligner quil sagit en fait dun « autre » développement et dinsister ainsi sur les aspects qualitatifs de ce développement autre.

Ce nest pas nécessairement le fait quils étaient ou non entièrement colonisés qui confère à ces économies cet aspect qualitatif. Cest parce que la diffusion des rapports marchands sest faite dans un espace-temps très court, parfois imposé de lextérieur, que ces économies ont acquis des aspects qualitatifs particuliers. »

C’est dans cette perspective que Salama participera à la controverse latino-américaine sur la dépendance. Outre les analyses sur l’impérialisme d’obédience marxiste, ce débat est alors dominé par l’approche structuraliste développée parla CEPAL dans les années 1950-1960et les thèses de l’école dite de la dépendance dans les années 1970-1980. Les divers courants « dépendentistes »ont pour dénominateur commun une approche de l’économie mondiale définie comme une totalité structurée et hiérarchisée.L’originalité de l’approche de Salama réside dans la mobilisation de l’hypothèse de Parvus et Trotsky sur le « développement inégal et combiné ».

Cette hypothèse contribue à penser l’articulation des États-nations ainsi que les rapports entre Centre et Périphérie en termes dynamiques. C’est dans le cadre de ce débat que Salama s’est opposé aux thèses qui postulaient la disparition des États, ou bien leur marginalisation au bénéfice d’entreprises multinationales cosmopolites et apatrides. Cette réflexion sur l’État le conduit à publier avec Gilberto Mathias une étude sur la spécificité de l’intervention de l’État dans les économies semi-industrialisées chez Maspero en 1983 : L´État surdéveloppé. Des métropoles aux tiers monde. Leur thèse s’inspire largement de l’école allemande dite de la dérivation.

« Notre apport, écrivent-ils, a été dappliquer cette approche au contexte latino-américain. Au lieu de « déduire » la nature de classe de l’État en Amérique latine de la catégorie capital qui faisait défaut, précisément parce que lhypothèse de Marx de la généralisation des marchandises ne pouvait être retenue dès lors quon voulait analyser la genèse du sous-développement, nous avons cherché à la déduire de linsertion de leurs économies dans « l’économie mondiale constituée » telle quelle a émergé à la fin du 19e siècle.”  

Salama approfondira cette analyse dans d’autres livres publiés en 2012, 2014 et 2017.[8] L’évolution des recherches de Salama peut être considérée tant du point de vue thématique que des transformations structurelles et politiques qui secouent l´Amérique latine entre les années 1970 et aujourd’hui. Il fonde dans les années post-68, avec Jacques Valier, la revue Critiques de l’économie politique (CEP).

La revue qui parait chez Maspero entre 1970 et 1985 se déclare, à la fois, indépendante et liée à la Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR) : le premier numéro, Sur linflation, rencontre un succès considérable. « Les premiers numéros reprenaient des thèmes développés dans nos thèses respectives. Au début, elle eut un très grand succès car les gens avaient soif de connaissances, le contexte politique aidant, et les revues traditionnelles ne répondaient pas à leurs attentes ». Cette revue dont le sous-titre reprenait une formule de Marx – « l’arme de la critique ne saurait remplacer la critique des armes » – a été très importante pour toute une génération et a contribué à une large diffusion de la critique de l’économie politique. Ernest Mandel y participait (n. 1, 1970).

La revue fut pionnière dans la diffusion de nouvelles interprétations de Marx comme celles de Roman Rosdolsky (n. 4; 1971; n. 6, 1972) de textes inédits de Marx en français (n. 11-12, 1973) et font connaitre les travaux de jeunes chercheurs et chercheuses comme Catherine Colliot-Thélène, Michel Löwy ou Helena Hirata. Les numéros s’articulent autour de dossiers sur des problématiques de fond : la méthode chez Marx, la mutation des classes sociales, le progrès technique, le travail productif et improductif, le travail des femmes, les délocalisations, l´Etat, la politique économique, les crises, la pollution, etc. ; ou encore sur des controverses de l’actualité immédiate : l’inflation, la crise du SMI, la montée de la finance, la nature et crise des pays de l´Est, etc.

Les questions liées à la problématique du sous-développement occupent une place de choix dans les colonnes de CEP : échange inégal, impérialisme et dépendance. Ainsi, outre la traduction de textes de Andre Gunder Frank ou Harry Magdoff, la revue publie des auteurs latino-américains comme Emir Sader ou encore Ruy Mauro Marini (n. 13-14 1973), le pionnier de la théorie marxiste de la dépendance et dont les principaux travaux ne paraitront en portugais dont son Brésil natal qu’en l’an 2000 et en anglais qu’en 2023! 

Salama et Valier rédigent à la même époque une Introduction à l’économie politique publiée en 1974 chez Maspero et traduite en 11 langues. L’édition française est écoulée à 70 000 exemplaires et l’espagnole à 40 000[9].

Les années 1970 sont également celles des nombreux coups d’États militaire et des « guerres sales » menées contre différents mouvements de la gauche révolutionnaire en Amérique latine. En France, CEP devient un foyer important de mobilisations, réunions, conférences et séminaires autour de ces situations. Les années 1980 et la nouvelle conjoncture marquée, politiquement, par la « transition à la démocratie » dans de nombreux pays d’Amérique du Sud et, économiquement, par la crise de la dette, marquent une inflexion dans les travaux de Salama.

Ainsi, il élargit son champ d’observation en développant une approche comparative du développement entre l’Amérique latine et l’Asie, notamment dans un livre écrit avec Patrick Tissier.[10] En même temps, les processus d’hyperinflation, dans le contexte du « cycle vicieux » de la dette, stimulent la discussion de la problématique de la dollarisation.[11]

En Amérique latine, les années 1990 sont marquées par le plan Brady et l’implémentation des politiques économiques associées au Consensus de Washington, aux diktats des créanciers et de leurs avocats : les institutions financières internationales. L’analyse critique de ces transformations et leurs conséquences structurelles et sociales – la « reprimarisation » des appareils productifs, la hausse de la pauvreté et l’explosion des inégalités – vont trouver un certain écho durant ces années de déferlante de politiques néolibérales. De nombreux articles et livres seront traduits en espagnol et portugais. Ils traitent principalement de la mesure de la pauvreté et des inégalités, de la dollarisation, ou encore des rapports entre les politiques macro-économiques et les marchés du travail.[12]

Ces tensions et, plus généralement, la configuration d’un nouveau régime d’accumulation à dominante financière ont permis à Salama de revenir sur les difficultés qui entourent l’analyse de la monnaie et la finance. C’est également durant ces années 1990, que, poussé par ces débats autour des caractéristiques des nouveaux régimes d’accumulations, Salama va intervenir dans les débats sur la corruption, la violence et le trafic de drogue[13].

« Sans abandonner le thème de recherche centré sur la pauvreté, écrit-il, la richesse et la croissance, tous les trois ou quatre ans, je reviens sur un « hobby » : l’étude de la drogue et de la violence dans les économies émergentes, hobby que je délaisse lorsque je bute sur des difficultés qui me paraissent insurmontables ; puis ces difficultés m’apparaissant sous un autre angle et je reprends mes recherches. Michel Schiray, Jean Cartier Bresson et moi-même avons ainsi publié plusieurs numéros et dossiers sur la drogue mais aussi sur les violences dans la Revue Tiers Monde. La violence est liée au trafic de drogue. C’est donc tout naturellement que je suis passé de l’un à l’autre.

Mais on ne peut comprendre cette violence, et surtout son explosion, si on ne l’inscrit pas dans son histoire. L’État, affaibli considérablement par la crise des années 1980, pris dans la contrainte néolibérale des années 1990, réduit ses fonctions (transport, éducation, santé, etc.) et laisse le marché produire des inégalités nouvelles. […] D’une manière plus générale, en réduisant son rôle au profit de celui du marché, l’État contrôle moins la Nation, le territoire devient poreux. […]

La violence devient alors la seule manière de régler les conflits et aussi le moyen privilégié d’acquérir des rentes, c’est-à-dire de s’enrichir lorsque le travail fait défaut ou est moins protégé. Des pouvoirs parallèles se développent ainsi, liés souvent aux trafics de drogues, aux jeux interdits. Ces pouvoirs, parce qu’ils ne sont pas de jure mais de facto, sont générateurs de violence extrême.

En 2000, un colloque a été organisé par le GREITD, l’IRD et l’IEDES. Le thème central : « Mondialisation économique et gouvernement des sociétés : l’Amérique latine, un laboratoire ? ».  Les débats qui ont lieu montrent la richesse des analyses au-delà des exemples latino-américains comme dans les cas de l’Union Européenne et d’autres régions en développement.

Durant ces années 2000, un certain nombre de pays d’Amérique latine élisent des présidents dits progressistes. Les interventions de Salama sur cette « vague rose » essaient d’éviter plusieurs écueils comme celui d’un alignement automatique sur les positions « néo-développementistes » en vogue en Argentine, au Brésil, en Equateur et plus récemment au Mexique. Elles essaient de souligner, en même temps, l’importance de politiques industrielles, sociales et monétaires actives afin de ne pas rester coincer la dépendance qui caractérise depuis longtemps l´Amérique latine.

La crise de 2008, ses rapports avec la financiarisation et la nouvelle dépendance, notamment au sud du sous-continent, vis-à-vis de la Chine ont fortement influencé ses travaux postérieurs à la Grande Récession. Salama participe activement à l’animation du séminaire BRICS. En 2020, il publie Contagion virale, contagion économique, risques politiques en Amérique latine aux Éditions du Croquant et, avec Mylène Gaulard, Économie de l’Amérique latine. C’est dans ce contexte post Grande Récession qu’il avancera l’hypothèse d’une démondialisation[14].

Avec le recul, on se rend compte de l’énorme travail de recherche que Salama a réalisé depuis la fin des années 1960 jusqu’à son décès. Comme nous le verrons dans la section suivante, il a aussi été très actif sur d’autres fronts et s’opposait à la montée de la conception qui réduit le travail de recherche à un pur exercice de « productivité » scientifique au service d’entreprises éditrices qui valorisent les publications comme des marchandises intellectuelles.

A ce propos, il défendait, en s’appuyant sur une prise de position du CNRS[15], le principe d’une libre circulation des publications, à l’opposé de la tendance actuelle qui oblige un chercheur à céder ses droits d’auteurs à des entreprises éditrices qui dominent un marché de la recherche oligopolistique. Salama a dirigé la revue Tiers Monde de 2001 à décembre 2005. Avec Robert Boyer, il sera également responsable de la collection « Textes à l’appui / Économie » aux éditions La Découverte, héritière de Maspero. 

3. Pédagogie et engagement politique

Pierre Salama a toujours milité. Que ce soit dans des organisations politiques comme la LCR dans les années 1970, en tant que directeur ou éditeur de revues, comme CEP ou au sein d’association altermondialiste comme ATTAC. Il avait une conscience claire des rapports entre la recherche et l’engagement.

En lien avec sa prédilection pour les problèmes de développement, ce positionnement politique l’a conduit à développer une critique du métier des économistes professionnels, notamment au sein d’organismes nationaux et internationaux. Illustrons ce dernier aspect avec les propos qui suivent, tirés d’une réflexion sur le travail des économistes-consultants pour des organismes internationaux (FMI, Banque Mondiale entre autres) :     

Ce serait une erreur de considérer que ces institutions napportent rien scientifiquement, sinon de lidéologie. La lecture de leurs productions est utile, non seulement au niveau de linformation, du traitement des données, mais aussi des analyses. Elle est aussi utile parce quelle inspire plus ou moins fortement nombre de gouvernements des pays du Tiers Monde.  […]

L’économie est une science molle. Les économistes de ces institutions, à la différence de nombre dintellectuels, ont à défendre leurs revenus, souvent plus élevés que ceux des universitaires. La première chose à laquelle nombre dentre eux pensent lorsquils obtiennent un contrat, est dobtenir ensuite un autre contrat […]

Ils participent ainsi de cette bureaucratisation de la pensée. Ils produisent la pensée unique et, lorsque celle-ci est menacée par des critiques externes, dont la force provient souvent des effets sociaux désastreux des politiques en question et des mobilisations quils suscitent, ils doivent légitimer de nouveau largumentation, quitte à linfléchir, voire à changer de position tout en essayant de montrer quils nen changent pas.

Salama a conservé sa liberté d’expression et son indépendance aussi bien dans les différentes organisations politiques dans lesquels il milita que dans les courants académiques hétérodoxes auxquels il a appartenu. Il a formé des générations d’étudiants en économie en France, en Europe et en Amérique latine. L’ampleur des réactions à l’annonce de son décès donne la mesure de son aura[16] comme économiste critique, mais aussi comme intellectuel humaniste, polémiste redoutable, militant, espiègle, polyglotte, fin connaisseur d’arts et artiste à ses heures (dessinateur)[17].

Il aimait citer ces deux versions de citation dans ses travaux : « le pessimisme de la raison c’est l’optimisme du cœur » (Valery) et dans sa version gramscienne, de la « volonté ». En ces temps d’aiguisement de contradictions, de montée de tensions et de crises, ses enseignements et sa vision critique nous manqueront. ¡Pierre Salama, Presente!

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Matari Pierre est chercheur en économie à l’Instituto de Investigaciones Sociales, UNAM, Mexico.

Alexis Saludjian est professeur et chercheur en économie à l’Instituto de Economia, UFRJ, Brésil.

Notes

[1] Voir : https://shs.cairn.info/revue-tiers-monde-2007-3-page-573?lang=fr#re2no92

[2] Voir : https://www.sudoc.abes.fr/cbs/xslt//DB=2.1/SET=2/TTL=191/SHW?FRST=199

[3]  Voir : https://shs.cairn.info/revue-tiers-monde-2007-3-page-573?lang=fr#re2no92

[4] Voir : https://www.sudoc.abes.fr/cbs/xslt//DB=2.1/SET=2/TTL=191/SHW?FRST=197

[5] Décernés par l’Université de Guadalajara (Mexique) et l´Université Autonome Métropolitaine (UAM) à México.

[6] Voir http://greitd.free.fr/presentationgreitd.html

[7] Parcours de vie d’un chercheur en économie. Revue Tiers Monde, n° 191(3), 573-590

[8] Salama. Les économies émergentes latino-américaines : entre cigales et fourmis. Armand Colin, 2012. Salama. Le défi des inégalités : Amérique latine/Asie: une comparaison économique. La Découverte, 2013. Salama, Des pays toujours émergents?. La documentation française, 2014.

[9] https://maitron.fr/spip.php?article194437

[10] Salama et Tissier, L’Industrialisation dans le sous-développement. Paris: Maspero, 1982.

[11] Salama « Endettement et accentuation de la misère”, Revue Tiers Monde, 491-507, 1984; Salama La dollarisation, Paris, Agalma-La Découverte, 1989.

[12] Salama et Valier. L’économie gangréné : essaie sur l’hyperinflation, 1992; Salama et Valier. « Pauvretés et inégalités dans le Tiers-monde. » (1994) ; Hirata, H., Lautier, B., & Salama, P. (1998). Les transformations du travail (Amérique Latine et Asie). Revue Tiers Monde, 247-250.

[13] Salama (2008). Report on Violence in Latin America. Revista de Economía Institucional, 10(18).

[14] Voir son article (citant The Economist de janvier 2019: https://www.economist.com/weeklyedition/2019-01-26:): https://france.attac.org/nos-publications/les-possibles/numero-20-printemps-2019/dossier-lien-entre-l-evolution-des-rapports-internationaux-et-la-democratie/article/le-bresil-a-reculons

[15] https://www.cnrs.fr/fr/actualite/il-ny-pas-de-raison-que-les-scientifiques-fassent-une-cession-exclusive-gratuite-de-leurs

[16] Voir les hommages suivants :

[17]La pureza de la línea, dibujos de Pierre Salama”. 2018, ediciones Maya, Costa Rica