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La production urbaine est un des lieux d’émergence d’exigences de démocratie directe, et à ce titre s’équipe d’un nombre croissant de dispositifs participatifs (consultation, budgets participatifs, contrats de quartier). Or, si cette exigence est effective et est le signe d’engagements politiques sans cesse renouvelés, la difficulté à « faire participer » semble dénoter une certaine saturation. Qu’est-ce qui suscite cette apparente contradiction entre les exigences croissantes de démocraties directes et le déficit récurrent de participation[1] ? Comment peut-on penser l’articulation entre l’abstraction toujours croissante d’un pouvoir autoritaire – ou ‘gouvernance‘ – néolibéral caractéristique du capitalisme tardif et la multiplication de dispositifs participatifs – que l’on aimerait pouvoir lire comme autant d’élan d’une démocratie renouvelée ? Ce texte propose de revenir sur les tensions de la participation afin de penser ce qui pourrait stratégiquement constituer des pistes d’émancipation. Laissant dans un premier temps de côté les apories de la participation en régime néolibéral, il s’agira d’examiner le caractère subjectivant de l’expérience urbaine et la saturation qu’elle produit. Nous reviendrons ensuite sur ce qui distingue les projets visant à « faire participer » d’une « démocratie sauvage ».

Il va sans dire que, anthropologiquement, les théories de la démocratie radicale[2] font peser sur les subjectivités de fortes exigences. Nous faisons ici l’hypothèse que, malgré leur apparente proximité, les projets ‘participatifs’ s’écartent diamétralement des projets de démocratie radicale. S’il peut être tentant de voir dans ces formes des ouvertures, des interstices dans l’État, il faut voir comment les formes contemporaines de saturations subjectives en limitent l’occupation « interstitielle »[3]. En effet, questionner la saturation subjective permet de penser les limites des « offres de participation » démocratiques. Or, l’hypothèse selon laquelle la condition néolibérale n’est pas étrangère à cette saturation n’est pas saugrenue. À ce titre, il faut se pencher sur quelques travaux au sujet de la condition néolibérale, en particulier ceux de Pierre Dardot et Christian Laval[4] et de Wendy Brown[5], qui décrivent, chacun sous un angle différent, comment de nouvelles subjectivités prennent corps en régime néolibéral. En deux mots, ce régime consiste en une nouvelle articulation du politique et de l’économique qui aboutit à une extension des domaines organisés comme des marchés et le redéploiement d’un État autoritaire[6]. Ce corpus montre notamment comment le sujet néolibéral doit se constituer comme entrepreneur de lui-même. Or la ville joue dans ce processus un rôle déterminant et pose donc problème là où justement elle laisse émerger de nouvelles formes qui semblent émancipatrices.

Georg Simmel évoquait déjà, dans une conférence prononcée en 1903, l’ambiguïté de la ville comme sol fécond de « la réciprocité entre économie et mentalité »[7], de nombreux travaux ont montré les effets proprement urbains de ce néolibéralisme[8] et donc une réciprocité entre économie, politique et ‘mentalité’. Il s’agira ici de prolonger cette idée, sans se limiter à la description du caractère aliénant de la ville, mais en insistant sur le rôle ambigu de l’urbain déjà souligné par Friedrich Engels à propos de son expérience urbaine londonienne :

« Lorsqu’on a battu durant quelques jours le pavé des rues principales, qu’on s’est péniblement frayé un passage à travers la cohue, les files sans fin de voitures et de chariots, lorsqu’on a visité les « mauvais quartiers » de cette métropole, c’est alors seulement qu’on commence à remarquer que ces Londoniens ont dû sacrifier la meilleure part de leur qualité d’hommes, pour accomplir tous les miracles de la civilisation dont la ville regorge, que cent forces, qui sommeillaient en eux, sont restées inactives et ont été étouffées afin que seules quelques-unes puissent se développer plus largement et être multipliées en s’unissant avec celles des autres. »[9]

Plus tard, Georg Simmel soulignait aussi ce caractère aliénant tout en insistant plus sur l’ambiguïté de l’expérience urbaine, montrant comment la grande ville (Großstadt) – « en tant que sièges par excellence de la circulation de l’argent » – produisait sa propre forme de subjectivité : le blasé. Pour lui « l’intensification de la vie nerveuse, qui résulte du changement rapide et ininterrompu des impressions externes et internes » fait de la ville le lieu de « l’intellect et des couches supérieures, conscientes, transparentes de notre âme[10] » autrement dit la condition de quelque chose comme un « espace public » au sens habermassien du terme[11]. Ainsi, l’idée selon laquelle les villes sont ambigument déterminantes dans la production de subjectivités n’est pas nouvelle[12], mais il semble important d’examiner comment les villes contemporaines déterminent de nouvelles formes de subjectivités, saturées[13]. Et comment ces subjectivités saturées sont de fait peu enclines à « participer » malgré les dispositifs qui le permettent, voire y appellent – et qui sont le fruit d’engagements d’un certain nombre d’actrices et acteurs. Or, afin de comprendre ce point, il faut bien se rendre compte que la ville dont il est question n’est plus la grande ville moderne d’Engels et de Simmel, mais bien une ville néolibérale – c’est-à-dire autant néolibéralisée que néolibéralisante. En effet, nous verrons que la ville est bien le vecteur privilégié des politiques néolibérales. Il est à ce titre nécessaire d’examiner à nouveaux frais les articulations entre la ville, le néolibéralisme et les subjectivations, afin de comprendre le défaut de participation.

 

Participation et subjectivation

L’enthousiasme éprouvé au début des années 2010 à l’endroit de l’émergence d’une démocratie participative[14] a cédé le pas à des analyses plus circonspectes face aux difficultés de « faire participer » et à la dépolitisation de l’espace public qu’impliquent souvent ces dispositifs[15]. Or, comme le montre Guillaume Petit, la participation consiste en une forme très institutionnelle d’engagement[16] et il faut ajouter a fortiori d’engagement public. Engagement public par opposition à d’autres modalités des engagements dans le monde. Laurent Thévenot distingue en effet plusieurs modalités d’engagement dans le monde, du plus intime ou familier au plus public. Pour lui, l’approche par les engagements permet de saisir « des pouvoirs, ou capacités dans un sens élargi, conçus comme pouvoirs de coordination avec soi-même tablant sur une disposition appropriée du monde environnant, et ouvrant à des coordinations avec autrui » et donne à voir des formes de subjectivités complexes, feuilletées et plurivoques. Or, la participation ne porte que sur un engagement public[17], n’impliquant ainsi qu’une dimension limitée des subjectivités. Or, l’offre de participation, comme seule possibilité de s’engager publiquement, aura, à rebours, un effet sur les subjectivités qui se produisent.

En effet, il s’agit bien de penser les subjectivités comme étant en constante production, ce que le concept de socialisation, d’usage courant en sciences sociales, ne permet pas dans la mesure où il ne désigne que l’intériorisation d’éléments du milieu social, une acquisition d’autonomie en fonction des contraintes du dehors. Or, le concept de subjectivation permet de saisir une réalité plus complexe. L’idée principale consiste à processualiser l’anthropologie philosophique dont on se dote pour penser le social. Par ce biais, on ne considère ni un ‘Homme’ essentialisé, ni un ‘acteur’, ni un ‘agent’, mais bien des machines branchées sur leur environnement. Si Foucault avait ouvert le feu dans Les mots et les choses[18] en annonçant la « mort de l’homme » – il s’agissait de dissoudre l’homme ou plutôt le sujet en le détachant d’une stricte correspondance à la « personne » – à ce titre Éric Alliez a raison de rappeler que personne, parmi les « grands « structuralistes « philosophes ne s’est contenté de disqualifier le sujet : tous, au contraire, ont entrepris d’éclairer cette tache aveugle installée par la philosophie classique en position de fondement, c’est-à-dire de faire passer le sujet d’une fonction constituante à une position constituée »[19]. Penser la subjectivation plutôt que le sujet relève ainsi d’une forme de prudence face à tout substantif. En pensant le sujet dans sa dimension processuelle, le sujet n’est plus un point de départ mais devient un processus. Dans le premier volume de l’Histoire de la sexualité[20], Foucault révèle « l’impasse où nous met le pouvoir lui-même »[21] par sa duplicité – i.e. pouvoir d’agir et de contraindre. Puis il déploie ailleurs sa conception d’un soi comme repli du Dehors, formant un : « dedans qui serait plus profond que tout monde extérieur, de même que le dehors est plus lointain que tout monde extérieur »[22]. Le dehors prend corps et opère dedans. Deleuze parle alors de pli, qui « n’est pas l’émanation d’un JE, c’est la mise en immanence d’une toujours autre ou d’un Non-moi »[23], un pli de mise au-dedans d’une force de dehors. Puis ce pli s’enchevêtre avec d’autres[24] comme un tissage que constitue l’entrecroisement de l’énonçable et du visible. Or ces plis subjectifs sont précisément des plis qui intègrent les subjectivités dans leur environnement – et a fortiori leur environnement urbain.

Ce détour permet de mieux saisir l’anthropologie philosophique très foucaldienne qu’expose Wendy Brown dans Défaire le dèmos[25]. Selon elle, amendant sur quelques points la théorie foucaldienne, homo œconomicus, une figure subjective qui vise à maximiser ses intérêts économiques supplante les autres figures subjectives possibles dans un certain contexte. Pour Foucault, c’était homo juridicus et homo legalis, respectivement sujet de droit et sujet de l’État qui se voyaient dépassés par homo œconomicus c’est-à-dire le sujet d’intérêt. Le trait particulier de cette figure en régime néolibéral consiste à se considérer comme capital humain. Paul B. Preciado parle à ce titre de « biocapital »[26] que l’on peut interpréter comme une autocapitalisation d’un corps et de sa biographie. Or, pour Brown, le propre du néolibéralisme consiste à imposer comme seule possible cette subjectivité, et de supplanter aussi homo politicus, figure de la souveraineté politique. Si cette reconstruction à grands traits nous semble convaincante, il semble toutefois que l’importance croissante de cette figure n’explique pas tout. Car il va sans dire que la participation pourrait être valorisée dans la constitution d’un biocapital. Or, il semble que la condition néolibérale déborde aussi les subjectivités, y compris ses compétences maximisatrices. À ce titre, revenir à l’histoire des théories néolibérales permet de penser cette saturation subjective.

 

Le néolibéralisme comme économie et politique

Comme l’expliquent Dardot, Laval et Brown, la réalité qui se dit sous le terme de néolibéralisme ne se limite pas à une réalité économique. Éminemment absurde[27], le maintien de celui-ci ne s’explique que par le développement d’une nouvelle raison. Or, s’il s’agit bien d’une raison, c’est parce que ce néolibéralisme est le fruit d’un véritable travail idéologique. En effet, le terme n’est pas la désignation critique d’une réalité d’un capitalisme autoritaire, mais le nom d’un projet politique et économique.

L’histoire de ce travail constitutif donne à voir la dimension véritablement programmatique du néolibéralisme : l’idée n’est ni fortuite ni construite a posteriori sur les faits. En effet, au début des années 1930 un groupe d’intellectuels (économistes, politistes, sociologues, philosophes, etc.) cherchaient un dépassement du libéralisme, et ce dans un contexte politique autoritaire. C’est lors du colloque Walter-Lippmann que le terme apparaît pour désigner le passage à « autre chose » que le « vieux » libéralisme. Ce colloque – organisé par Louis Rougier à Paris au mois d’août 1938[28] à l’occasion de la parution de l’ouvrage de Lippman La cité libre[29] – avait pour but d’agencer une « action internationale contre les « planismes ». Est né de cette rencontre le Centre international d’études pour la rénovation du libéralisme (CIRL) « qui a joué un rôle de prototype pour la Société du Mont-Pèlerin (MPS), société savante et réseau d’influence, qui réunit chaque année depuis 1947 les partisans du néolibéralisme »[30]. Quinze personnes appartenant à la SMP neuf ans et une guerre plus tard étaient déjà présentes lors de la fondation de ce « prototype »[31]. S’il existe un but commun, la participation de plusieurs écoles économiques très différentes – l’école de Chicago en économie, l’ordolibéralisme viennois et suisse, et bien sûr la posture « réaliste » de Lippmann[32] – exclut toutefois de parler, comme l’a fait Bourdieu ultérieurement, de « pensée unique »[33]. Le colloque conduit néanmoins à un « agenda du libéralisme », économique et politique, formulant la nécessité de l’intervention juridique de l’État pour permettre au marché de fonctionner[34]. Cet ensemble de doctrines, disparates et souvent contradictoires, s’oppose dès sa naissance à trois « ennemis » : le libéralisme du laisser-faire, le libéralisme social-démocrate et le socialisme[35]. Entre les tenants du néolibéralisme, l’accord contre ces trois ennemis porte sur quatre points : priorité des mécanismes de prix, libre entreprise, système compétitif et déploiement d’un État fort[36].

S’il est clair que la période que nous traversons est néolibérale, les descriptions qui en sont données divergent et sont souvent incomplètes. Un vaste débat en sciences sociales quant à la nature du néolibéralisme et la difficulté de le définir (« the difficulty of pinning the term down », écrit Stephen J. Collier) tente de tenir à l’écart le vieux spectre renvoyant dos à dos le marché contre l’État et faisant du néolibéralisme une simple privatisation généralisée[37]. Or, autant Johanna Bockmann, dans son commentaire de Loïc Wacquant[38], que Neil Brenner, Stephen J. Collier ou David Harvey mettent en évidence la composition complexe du néolibéralisme et les projets politiques qui pointent vers un supplément d’État plutôt que vers la fin de celui-ci. Pas n’importe quel État, mais un « État punitif » aux antipodes de l’État-providence[39]. Il ne faut pas négliger le double caractère économique et politique de ce phénomène. Le néolibéralisme « ce n’est pas Adam Smith », il ne s’agit pas de la fin de l’État, mais du passage vers un État garant du marché plutôt que le garde-fou imaginé dans les théories libérales primitives. Le problème qu’il pose consiste à déterminer « comment on peut régler l’exercice global du pouvoir politique sur les principes d’une économie de marché. Il s’agit donc non pas de libérer une place vide, mais de rapporter, de référer, de projeter sur un art général de gouverner les principes formels d’une économie de marché.[40] »

Si elles ne suffisent pas à caractériser le projet néolibéral, les privatisations en constituent toutefois l’une des dimensions principales. L’ennemi, dès le départ, est le plan et non pas l’État. Le répertoire ordolibéral où puisent les économistes du Mont-Pèlerin[41] indique pourtant bien la dimension proprement politique du néolibéralisme[42]. L’ordre constitue en effet le cœur des débats[43]. Philip Mirowski conclut sur ce point : « L’erreur d’identifier le néolibéralisme exclusivement à la théorie économique devient évidente lorsqu’on constate que l’histoire nous enseigne que les néolibéraux eux-mêmes considéraient une telle exclusivité étroite comme une prescription pour les catastrophes »[44]. L’appel à l’ordre a été affirmé avec une telle insistance que la nécessité d’un ordre s’en est véritablement naturalisée. Or, cet appel à l’ordre est bien un appel à un redéploiement de formes autoritaires.

Sous une forme de « réalisme », les thuriféraires du néolibéralisme ont à cœur de naturaliser l’ordre du marché[45] ; voire dans certains cas[46], de chercher une origine biblique à cet ordre : « Comme Paul le recommandait aux premiers chrétiens, on obéit aux autorités séculières et on observe les lois du pays »[47]. En enjoignant de suivre la loi, l’Épître aux Romains (Rm 13) serait déjà un appel à l’ordre : « Que chaque personne soit soumise [subject] aux autorités gouvernantes ; car il n’y a d’autorité que de Dieu »[48]. Cet ordre n’est pas éloigné des deux ordres – spontané et construit, i.e. kosmos et taxis – chers à Hayek[49]. Le néolibéralisme conçoit en effet l’ordre sur deux plans : un ordre construit, qui passe par l’autorité, et un ordre spontané, constitué par les ordonnancements du marché. À ce titre, le néolibéralisme est fondamentalement antidémocratique. Le premier plan, celui d’un ordre construit, est en effet souvent négligé. Or Stuart Hall, dans Le populisme autoritaire, montre bien ce qui caractérise l’ère ouverte par le duo Thatcher-Reagan : le gonflement de l’autorité, le gonflement et le déplacement de l’État plutôt que sa disparition[50]. À ce sujet encore, Renato Cristi relève la dette que Friedrich Hayek a envers Carl Schmitt[51]. Hayek oppose en effet très clairement démocratie et libéralisme. Pour Hayek les deux ne sont que compatibles, et ne se superposent pas bord à bord. Il déduit cela de ce que chacune s’oppose à un élément différent : le libéralisme s’oppose au totalitarisme alors que la démocratie s’oppose à l’autoritarisme[52]. Or, c’est selon lui la liberté qui prévaut sur la démocratie. C’est néanmoins une liberté toute relative car elle est tout entière dirigée vers le marché et qu’elle se compromet, au nom des « affaires », avec les pires régimes autoritaires[53]. On peut donc parler de « double vérité »[54]. Cette double vérité aboutit selon lui à une asymétrie de liberté dans la mesure où « la liberté elle-même doit être aussi inégalement répartie que les richesses du marché »[55].

Le projet néolibéral est intrinsèquement ambigu en ce qu’il mélange, pour parler comme Maurizio Lazzarato, des dispositifs « hypermodernes (finance, communication, marketing, management du « capital humain ») » et des dispositifs d’assujettissement « néoarchaïques » qui reproduisent ce que les premiers semblaient dépasser (le racisme, la guerre, la division en classes, les valeurs de la famille, du travail, de l’autorité, du mérite, etc.). Or « hypermodernité et néoarchaïsme ne sont pas des processus contradictoires, mais les deux faces complémentaires d’un même mode de gouvernement de nos sociétés »[56]. Si la face néoarchaïque est tangible aujourd’hui dans la crise d’accueil des migrants, les violences policières, les évacuations de ZAD et le fascisme éhonté de nombreux États considérés comme démocratiques, la face hypermoderne scintille dans les apparences des villes créatives, des smart cities et autres villes participatives. Or, l’ambiguïté de la condition urbaine contemporaine tient au fait qu’elle joue, politiquement et économiquement, sur les deux tableaux de l’hypermoderne et du néoarchaïque.

 

L’intégration de la ville dans les processus de néolibéralisation

La ville occupe dans cette articulation une place déterminante. Si de nombreux travaux font état de la néolibéralisation des villes, ils manquent parfois ce rôle déterminant des villes dans la dynamique de néolibéralisation. On peut dire en effet que la ville est désormais en soi une instance néolibérale. À propos de sa dimension autoritaire, Don Mitchell décrit une ville punitive excluant toute différence en son sein : « Dans la ville punitive, la ville postmoderne, la ville revancharde, la diversité ne se maintient plus en protégeant et en luttant pour étendre les droits des plus défavorisés, mais en poussant les plus défavorisés dehors […], en montrant clairement qu’ils n’ont tout simplement pas droit à la ville.[57] » Punir et pousser dehors. Pour Phil Hubbard, ce développement néolibéral des villes marginalise les personnes qui ont une place subalterne : femmes, personnes racisées, LGBTIQ + et en situation de handicap[58]. Andy Merrifield ajoute que l’évacuation des habitant∙es des villes, implique aussi l’évacuation de ce qui constituait une culture urbaine[59]. La néolibéralisation urbaine fonctionne politiquement et économiquement, avons-nous dit. Ces deux aspects sont indissociables. Neil Smith souligne le caractère stratégique du marché de l’espace urbain dans l’économie néolibérale : les villes ont un double caractère de hub économique et de marchandise[60]. Andy Merrifield va dans ce sens lorsqu’il affirme que « les villes sont aujourd’hui les centres névralgiques de la mondialisation et de la globalisation du capital, et jouent également un rôle idéologique et politique crucial au sein du système[61] ». Ces critiques pointent bien le caractère autoritaire de la ville contemporaine, elles n’en oublient pas moins la dimension économique du processus, loin s’en faut.

La place centrale qu’occupe l’économie urbaine dans le mode de production caractérise le processus de néolibéralisation. Or, cette économie urbaine s’inscrit dans une transformation politique. En croisant les travaux de David Harvey et ceux de Maurizio Lazzarato à propos de la dette, l’articulation entre ville et néolibéralisme s’éclaire. Relire conjointement ces travaux permet d’articuler la dimension gouvernementale et la dimension économique de la production urbaine[62]. Lazzarato permet de penser le lien entre la fonction économique de la dette et sa fonction politique. Ses travaux éclairent la coalescence entre économie et politique, laissée dans l’ombre par les travaux de Harvey – qui s’intéresse surtout à la dimension économique. La dette est en effet le chaînon manquant, dans les études urbaines, entre les versants économiques et politiques des dynamiques de néolibéralisation.

Harvey met en évidence l’importance de la ville dans cette néolibéralisation, tant sur le plan de l’inflation foncière que sur le plan de la transformation gouvernementale. Il décrit le passage d’une « ville managériale » vers une « ville entrepreneuriale », comme déplacement des stratégies économiques de la production urbaine[63]. En effet, les collectivités publiques ne privatisent pas simplement, mais ouvrent des « partenariats public-privé » inédits – qui constituent une privatisation partielle. Or l’économie urbaine a également une dimension éminemment politique.

 

Villes, crises et capital financier

La ville constitue un nœud entre l’économie et le politique. Reprenons quelques éléments qui permettent de penser cette articulation. Harvey souligne le rôle croissant de l’immobilier dans l’économie globale et de la ville dans la néolibéralisation[64]. Harvey montre en effet comment l’augmentation des prix du foncier dans la ville contemporaine n’est pas une simple crise de la ‘bulle immobilière’. Selon lui, l’économie urbaine n’est qu’une sous-branche de l’économie traditionnelle, mais elle acquiert un rôle déterminant dès le milieu des années 1980. Contre les tenant∙es des théories néolibérales, qui voient dans les éclatements de bulles des singularités, c’est-à-dire des phénomènes « régionaux » et des « crises », Harvey soutient que l’apparition récente (en 2009) de la question urbaine dans les rapports de la Banque mondiale est l’indice d’une dynamique plus profonde qui lie dans les crises immobilier et néolibéralisme. Pour les économistes de la Banque mondiale, écrit-il,

« l’application des recettes néolibérales aux questions urbaines (désengagement de l’État de toute régulation sérieuse des marchés foncier et immobilier et réduction maximale des programmes de planification urbaine et d’aménagement du territoire) [constitue le] meilleur moyen de stimuler la croissance économique (c’est-à-dire l’accumulation du capital) »[65].

Les crises économiques du xxe siècle (1929, 1973, 1987 et 2000) sont toutes précédées d’un « boom immobilier ». Pour lui, « les booms et les effondrements du marché immobilier sont de manière très claire inextricablement liés aux flux financiers et leurs conséquences sont généralement importantes d’un point de vue macroéconomique. » Aux États-Unis, la dette hypothécaire représente 40 % du PIB. Par conséquent, l’immobilier et donc la ville sont intrinsèquement intégrés au capitalisme. En Suisse où mes enquêtes se sont portées jusqu’à récemment, sur un PIB estimé à 645,556 milliards de francs suisses (CHF) en 2015, la construction représente 9.5 % du PIB, et les prêts hypothécaires 30.2 % des activités bancaires. Retenons-en que la ville est objet singulier et agent, déterminant dans le capitalisme tardif.

Il est sans doute utile de rappeler que Harvey, en tant qu’urbaniste marxiste, ne considère pas dans crises comme simple effet de la baisse tendancielle des taux de profit, de sous-consommation, ni de particularités mais voit les suites de crises comme dues au rôle structurel que joue le foncier comme « capital fictif ». Il est bon de rappeler aussi qu’en tant que fictif, il est sujet d’une fiction tout à fait concrète : il est une « construction fétiche » – et à ce titre tout à fait réel – qui escamote les dynamiques sociales qu’il subsume. Plus même, il devient la logique sociale elle-même. Et c’est là notamment que le capital rencontre la politique, là où intervient la dette : lorsqu’un État emprunte de l’argent à une banque et lui paie des intérêts (dette souveraine), lorsqu’un particulier « hypothèque sa maison » et paie des intérêts (dette privée), « lorsque des banques prêtent à d’autres banques ou lorsque la Banque centrale prête aux banques commerciales qui prêtent aux spéculateurs fonciers qui cherchent à s’approprier des rentes (dette publique), le capital fictif ressemble plus à une régression infinie de fictions construites les unes sur les autres ». Mais, précise encore Harvey, pour Marx il n’y a pas de valeur produite hors de la production de marchandises. Marx, dans Le Capital, focalise en effet son attention sur la production, ou plutôt sur une version industrielle de la production. Or, Harvey prend ses distances avec une certaine orthodoxie marxiste et considère que les dépenses produisent du capital fixe, ce qui souligne la dynamique d’aller-retour du sol urbain et de l’immobilier entre capital fictif et capital fixe, en fonction de son affectation. Pour Harvey donc, la circulation de ce capital fictif « aspire » une vaste accumulation négligée par le marxisme orthodoxe, toute une économie de la dette créée au sein du capital financier intègre les processus traditionnels de production : ce qu’il appelle une forme « prédatrice d’accumulation par la dépossession ». Or, il va sans dire que cette fonction économique a de véritables effets politiques et opère dans la production de subjectivités.

 

Dette et gouvernementalité

Les travaux de Harvey soulignent à la fois les dynamiques de l’économie urbaine comme part croissante du capital et la prégnance de la dette dans l’économie. Mais l’endettement est surtout le prétexte ou le vecteur d’une extension du domaine du contrôle des conduites[66]. Ainsi, à cause de la dette, la ville est d’emblée partie prenante du néolibéralisme. Il existe ainsi comme un redoublement de l’inscription de la ville dans les processus de néolibéralisation par la transformation de la ville en marchandise, ainsi que, par la fonction gouvernementale de la dette. Autrement dit, l’intégration multiple de la ville dans un capitalisme néolibéral passe notamment par l’endettement et constitue à ce titre un moyen de contrôle des conduites[67]. Ainsi, la dette inscrit doublement la ville dans le néolibéralisme : par la ville et par les subjectivités. La condition néolibérale est déterminée par une recomposition du système de la dette – ou des dettes (privée, souveraine et sociale). Ces recompositions poussent les subjectivités à devenir des « débiteurs de l’État, des assurances privées et, plus généralement, des entreprises », ce qui « nous » (c’est-à-dire celles et ceux qui lui sont confrontés) contraint à devenir des « entrepreneurs de nos vies », de nous-mêmes, à valoriser notre parcours de vie comme « capital humain ». La dette constitue ainsi le nœud du néolibéralisme entre l’économique et le politique : et la ville en est un chaînon déterminant, non pas seulement comme le milieu de vie d’une part croissante de l’humanité, mais aussi comme articulation cruciale dans les processus de subjectivation. Dès lors, parler de subjectivités néolibérales revient à désigner autant des agents convaincus par cette nouvelle raison que des individus conduits par des endettements multiples ou cognitivement saturées par des injonctions contradictoires à gérer sa vie en entrepreneur créatif de son biocapital et se laisser conduire par un ordre urbain autoritaire.

Les dynamiques néolibérales consistent donc en une extension du marché et des politiques autoritaires visant à faire fonctionner le marché. Et, la ville occupe une place déterminante dans ces dynamiques : à la fois néolibéralisée et vecteur de néolibéralisation, elle est en effet au cœur de la double dimension économique et politique du processus néolibéralisation. Or, la ville est déterminante aussi dans les processus de subjectivation. Nous pouvons avancer l’idée selon laquelle les subjectivités saturées par un excès de contraintes et l’extension des logiques marchandes à tous les domaines de la vie. Sans parler des effets de la smart city en termes de transformations des compétences – et d’aliénation –, qu’en est-il, dès lors des subjectivités qui prennent corps entre la double contrainte de l’autorité et du marché. Pour Yves Citton et ses collègues, par exemple, notre époque se caractérise par une raréfaction de l’attention[68]. Or, si ce constat est convaincant et semble déterminant pour expliquer les problèmes que rencontrent les dispositifs participatifs, il manque certainement des éléments plus ou moins conscients comme le constat partagé de dépossession croissante de son pouvoir d’agir : ce qu’Adorno, et après lui Mark Fisher, décrivent comme une forme de « réalisme »[69], tout se passe comme si la ville néolibérale produisait un nouveau blasé, un blasé-saturé : un blasé-réaliste. Le « monde administré », pour reprendre les termes d’Adorno et ses collègues, aurait atteint un point où il serait impossible d’envisager que les choses pourraient être autrement qu’elles ne sont. À ce titre, « faire participer » paraît illusoire. À l’inverse, envers et contre cet état de fait, les formes d’engagement renouvelées ces dernières années dans la séquence qui va d’Occupy aux Gilets Jaunes en passant par Nuit Debout, marquées par une exigence réaffirmée de démocratie directe, de vraie démocratie ou de démocratie radicale.

 

La condition urbaine néolibérale des subjectivités et la participation

Ainsi, la situation contemporaine des dispositifs participatifs présente une ambiguïté renouvelée. Si l’expérience urbaine est en soi ambigument autant un potentiel d’émancipation qu’un cadre contraignant, il va sans dire que le néolibéralisme a renouvelé celle-ci alors que les processus participatifs se présentent comme émancipateurs. La condition urbaine néolibérale comme subjectivation ouvre à une nouvelle série de contradictions qu’il s’agit de clarifier. Car si la production urbaine est le terrain d’émergence de luttes sociales dans lequel se jouent les luttes de classes contemporaines[70], c’est elle aussi qui détermine les subjectivités néolibérales. En effet, les dispositifs participatifs sont issus des luttes urbaines et se sont étendus à d’autres sphères de la vie publique (budgets participatifs, jurys, contrats de quartier, assemblées citoyennes) et de la vie quotidienne (art, éducation, aménagement urbain, etc.). Or, les subjectivités néolibérales sont produites dans ce même cadre urbain qui voit émerger des exigences renouvelées de démocraties directes. Il ne faut bien entendu pas se limiter à un côté ou l’autre du phénomène : d’une part, la saturation urbaine est devenue telle que les conditions de vie en ville deviennent inacceptables – et ne sont à ce titre pas acceptées –, d’autre part, les exigences qui pèsent sur les personnes sont telles que participer dans le cadre des « offres de participation » devient impossible dans la mesure où attention et temps disponible, mais aussi désir, font défaut. La question qui se pose, dès lors, consiste à déterminer ce qu’il en est de cette contradiction : a-t-on à faire à deux types différents de subjectivités, l’une saturée, l’autre rebelle ? Ou bien la contradiction est-elle au cœur même des subjectivités produites ? Le programme de recherche qui s’ouvre devant nous est celui qui consiste à déterminer sous quelles conditions renouvelées une véritable démocratie directe – c’est-à-dire celle que Miguel Abensour appelle « démocratie insurgeante », voire, après Claude Lefort, « sauvage »[71] et non pas ses formes existantes qui relèvent plus de la consultation – est possible en régime néolibéral. Si le résultat semble couru d’avance, on peut se demander néanmoins si ces dispositifs peuvent servir à faire éclore le ‘public’ de cette démocratie sauvage. Tout se passe du moins comme si cette (potentielle) démocratie sauvage n’était envisageable que comme émergente, par en bas, et n’était pas soluble dans des dispositifs de l’État.

 

Bibliographie

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Notes

[1] Guillaume Gourgues, « Participation: trajectoire d’une dépolitisation », Revue Projet, 2018, vol. 2, no 363, p. 21‑28 ; Marie-Hélène Bacqué et Yves Sintomer (eds.), La démocratie participative. Histoire et généalogie, Paris, La Découverte, 2011 ; Heloïse Nez et Julien Talpin, « Généalogies de la démocratie participative en banlieue rouge : un renouvellement du communisme municipal en trompe-l’œil ? », Genèses, 2010, vol. 2, no 79, p. 97‑115. et les problèmes récurrents de participation Mathieu Berger et Julien Charles, « Persona non grata. Au seuil de la participation », Participations, 2014, vol. 2, no 9, p. 5‑36.

[2] On peut suivre Lincoln Dahlberg et Eugenia Sapiera qui distinguent trois horizons théoriques et politiques de la démocratie radicale : un premier issu de théories délibératives, inspiré des travaux de John Rawls et de Jürgen Habermas ; un deuxième inspiré de ce qu’il est convenu d’appeler populisme de gauche après les travaux de Ernesto Laclau et Chantal Mouffe et un dernier issu des mouvements autonomes, notamment post-opéraïstes, courant que représentent bien Antonio Negri et Paolo Virno. Cf. Lincoln Dahlberg et Eugenia Siapera, « Introduction: Tracing Radical Democracy and the Internet » dans Lincoln Dahlberg et Eugenia Siapera (eds.), Radical Democracy and the Internet: Interrogating Theory and Practice, Basingstoke / New York, Palgrave Macmillan, 2007, p. 1‑16..

[3] Voir à ce propos des stratégies interstitielles, voir notamment Erik Olin Wright et Robin Hahnel, Alternatives to Capitalism. Proposals for a Democratic Economy, London & New York, Verso, 2016.

[4] Pierre Dardot et Christian Laval, La nouvelle raison du monde. Essai sur la société néolibérale, Paris, La Découverte, 2010 ; Pierre Dardot et Christian Laval, Ce cauchemar qui n’en finit pas. Comment le néolibéralisme défait la démocratie, Paris, La Découverte, 2016.,

[5] W. Brown, Défaire le dèmos. Le néolibéralisme, une révolution furtive, Paris, Amsterdam, 2018.

[6] Grégoire Chamayou, La société ingouvernable. Une généalogie du libéralisme autoritaire, Paris, La Fabrique, 2018.

[7] S’il mentionne que cette conférence, « Métropole et mentalité », n’a pas à être citée, les idées développées sont déployées extensivement dans Philosophie de la modernité,(Payot, 1989).

[8] D. Harvey, Le capitalisme contre le droit à la ville. Néolibéralisme, urbanisation, résistances, Paris, Amsterdam, 2011 ; D. Harvey, Brève histoire du néolibéralisme, Paris, Les Prairies Ordinaires, 2014.

[9] F. Engels, La situation de la classe laborieuse en Angleterre, d’après les observations de l’auteur et des sources authentiques, Paris, Éditions sociales, 1973.

[10] G. Simmel, Philosophie de la modernité, op. cit., p. 170.

[11] J. Habermas, L’espace public. Archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise, Paris, Payot, 1978.

[12] À propos de l’ambiguïté de la position d’Engels à propos de la ville, qui voit celle-ci comme à la fois libératrice et aliénante, voir l’article de Franck Fischbach, « Des difficultés de la Théorie critique avec la ville », Les Cahiers philosophiques de Strasbourg [En ligne], 2019, vol. 46..

[13] Pour Yves Citton, un excès de stimulations neutraliserait les capacités perceptives ; voir Yves Citton, « Saturation, médialité, urbanité » dans Manola Antonioli et al. (eds.), Saturations. Individus, collectifs, organisations et territoire à l’épreuve, Grenoble, Elya Editions, 2019, p. 9‑18..

[14] M.-H. Bacqué et Y. Sintomer (eds.), La démocratie participative. Histoire et généalogie, op. cit. ; Marie-Hélène Bacqué et Yves Sintomer (eds.), La démocratie participative inachevée. Genèse, adapatations et diffusions, Paris, Adels / Yves Michel, 2010 ; Loïc Blondiaux, Le nouvel esprit de la démocratie. Actualité de la démocratie participative, Paris, Seuil, 2008..

[15] De nombreux travaux montrent en effet comment ces dispositifs tendent à neutraliser politiquement les débats. Voir notamment G. Gourgues, « Participation: trajectoire d’une dépolitisation », art cit ; M. Berger et J. Charles, « Persona non grata. Au seuil de la participation », art cit.

[16] Guillaume Petit, Pouvoir et vouloir participer en démocratie. Sociologie de l’engagement participatif: la production et la réception des offres institutionnelles de participation à l’échelle municipale, Thèse de Doctorat, Université Paris 1, Paris, 2017.

[17] Voir Laurent Thévenot, L’action au pluriel. Sociologie des régimes d’engagement, Paris, La Découverte, 2006. L’étude de ces « pouvoirs de coordination » passe par quatre « extensions » de la question de l’engagement : le « régime d’engagement justifiable » assoit en effet « une grandeur prétendant participer au bien commun à partir des gages offerts par un monde d’êtres qualifiés pour ce commun », autrement dit, par l’énonciation de grands principes. Un deuxième régime, d’« engagement en plan », permet « l’autonomie d’un porteur de projet individuel : « Il gage sur un environnement disposé en fonctionnalités le bien tenant à la capacité de se réaliser en accomplissant ce plan. » Ces deux premiers régimes d’engagements dans les situations impliquent un « apprêtement » des subjectivités plutôt fermé, stable, territorialisé, molaire. Thévenot repère en outre un « régime d’engagement familier » qui assure un tout autre pouvoir de se maintenir plus intime. Par ailleurs, Nicolas Auray et Bruno Vétel ont ajouté à ce modèle un « régime d’exploration », celui du tâtonnement et de la découverte. Voir Nicolas Auray et Bruno Vétel, « L’exploration comme modalité d’ouverture attentionnelle », Réseaux, 2013, no 6, p. 153‑186..

[18] Michel Foucault, Les Mots et les Choses, Paris, Gallimard, 1966.

[19] Éric Alliez, De l’impossibilité de la phénoménologie: sur la philosophie française contemporaine, Paris, Vrin, 1995.

[20] Michel Foucault, Histoire de la sexualité I. La volonté de savoir, Paris, Gallimard, 1976.

[21] Gilles Deleuze, Foucault, Paris, Les Éditions de Minuit, 1986, p. 103.

[22] Michel Foucault, Histoire de la sexualité II – L’usage des plaisirs, Paris, Gallimard, 2014.

[23] G. Deleuze, Foucault, op. cit., p. 105.

[24] On trouve les éléments principaux de ce qu’écrit Foucault sur ce pli subjectif dans L’usage des plaisirs (pp. 32-39), mais aussi dans l’ouvrage précieux de Dreyfus et Rabinow Michel Foucault: Beyond Structuralism and Hermeneutics, Chicago, The University of Chicago Press, 1982. Le sujet et la subjectivation chez Foucault-relu-par-Deleuze s’effectue dans le rapport à soi et s’opère par quatre plissements distincts : (1) « la partie matérielle de nous-même qui va être entourée, prise dans le pli » ; (2) le « pli du rapport de forces, à proprement parler ; car c’est toujours selon une règle singulière que le rapport de forces est ployé pour devenir rapport à soi ; ce n’est certainement pas la même chose, quand la règle efficiente est naturelle, ou bien divine, ou rationnelle, ou esthétique… » ; (3) le « pli du savoir, ou le pli de vérité, en tant qu’il constitue un rapport du vrai à notre être, et de notre être à la vérité, qui servira de condition formelle à tout savoir, à toute connaissance » ; (4) « le pli du dehors lui-même, l’ultime : c’est lui qui constitue ce que Blanchot appelait une “ intériorité d’attente “ , c’est de lui que le sujet attend, sur des modes divers, l’immortalité, ou bien l’éternité, ou le salut, ou la liberté, ou la mort, le détachement… ». G. Deleuze, Foucault, op. cit., p. 111‑112.

[25] W. Brown, Défaire le dèmos. Le néolibéralisme, une révolution furtive, op. cit., p. 114- sq.

[26] Beatriz Preciado, Pornotopie. Playboy et l’invention de la sexualité multimédia, traduit par Serge Mestre, Paris, Climats, 2011.

[27] Absurde dans le sens où il est difficile de penser une rationalité du capitalisme et qui plus est une rationalité qui puisse motiver l’engagement des actrices et acteurs. Max Weber a tenté de penser ce caractère absurde M. Weber, L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme, Paris, Gallimard, 2003. Voir aussi Luc Boltanski et Ève Chiapello, Le nouvel esprit du capitalisme, Paris, Gallimard, 1999.

[28] Les actes de ce colloque, publiés aux éditions Médicis en 1938, étaient devenus introuvables. Ils ont été réédités en 2012 par Serge Audier aux éditions du Bord de l’eau Serge Audier, Le colloque Lippmann. Aux origines du « néo-libéralisme », Lormont, Éditions du Bord de l’Eau, 2012, p. 405‑495..

[29] Walter Lippmann, La cité libre, Paris, Éditions de Médicis, 1938.

[30] François Denord, « Aux origines du néo-libéralisme en France. Louis Rougier et le Colloque Walter Lippmann de 1938 », Le Mouvement Social, 2001, vol. 2, no 195, p. 2.

[31] François Denord, « French Neoliberalism and Its Divisions: From the Colloque Walter Lippmann to the Fifth Republic » dans Philip Mirowski et Dieter Plehwe (eds.), The Road from Mont Pèlerin: The Making of the Neoliberal Thought Collective, Harvard University Press., Cambridge, Massachussetts / London, England, 2009, p. ; Dieter Plehwe, « Introduction » dans Philip Mirowski et Dieter Plehwe (eds.), The Road from Mont Pelerin: The Making of the Neoliberal Thought Collective, Cambridge, Massachussetts / London, England, Harvard University Press, 2009, p. ; Bernhard Walpen, Die offenen Feinde une ihre Gesellschaft. Eine hegemonetheoretische Studie zur Mont Pèlerin Society, Hamburg, VSA-Verlag, 2004.

[32] D. Plehwe, « Introduction », art cit, p. 14.

[33] Pierre Bourdieu, « L’essence du néolibéralisme », Le Monde Diplomatique, mars 1998p.

[34] F. Denord, « Aux origines du néo-libéralisme en France. Louis Rougier et le Colloque Walter Lippmann de 1938 », art cit, p. 24.

[35] Philip Mirowski, « Postface: Defining Neoliberalism » dans Philip Mirowski et Dieter Plehwe (eds.), The Road from Mont Pelerin: The making of the Neoliberal Thought Collective, Cambridge, Massachussetts / London, England, Harvard University Press, 2009, p. 431.

[36] Philip Mirowski et Dieter Plehwe, The road from mont Pèlerin: The making of the neoliberal thought collective, with a new preface, Cambridge, Harvard University Press, 2015.

[37] J. Clarke et J. Newman, The Managerial State. Power, Politics and Ideology in the Remaking of Social Welfare, Thousand Oaks CA, Sage, 1997 ; Shamsul Haque, « Global rise of neoliberal state and its impact on citizenship: experiences », Developing Nations, Asian Journal of Social Science, 2008, vol. 36, p. 11‑34 ; M. Prassad, The politics of free markets: the rise of neoliberal economic policies in Britain, France, Germany, and the United States, Chicago, University of Chicago Press., 2006.

[38] Le débat porte sur la nature (unique ou multiple) du projet néolibéral. Pour Wacquant, le néolibéralisme est un projet politique, pour Bockmann, c’en est plusieurs. Philip Mirowski et ses collègues ont quant à eux utilisé le terme « thought collective » pour désigner cet ensemble protéiforme P. Mirowski, « Postface: Defining Neoliberalism », art cit..

[39] Johanna Bockmann, « The political projects of neoliberalism », Social Anthropology/Anthropologie Sociale, 2012, vol. 20, no 3, p. 310‑317 ; Stephen J. Collier, Soviet social. Neoliberalism, Social Modernity, Biopolitics, Princeton, Princeton University Press, 2011 ; Stephen J. Collier, « Neoliberalism as big Leviathan, or . . . ? : A response to Wacquant and Hilgers », Social Anthropology, 2012, vol. 20, no 2, p. 186‑195 ; D. Harvey, Le capitalisme contre le droit à la ville. Néolibéralisme, urbanisation, résistances, op. cit. ; Mathieu Hilgers, « The historicity of the neoliberal state », Social Anthropology, 2012, vol. 20, no 1, p. 80‑94 ; Loïc Wacquant, « Three steps to a historical anthropology of actually existing neoliberalism », Social Anthropology, 2012, vol. 20, no 1, p. 66‑79.

[40] Michel Foucault, Naissance de la biopolitique – Cours au Collège de France (1978-1979), Paris, Gallimard / Le Seuil, 2004, p. 136‑137.

[41] Ralph Ptak, « Neoliberalism in Germany: Revisting the Ordoliberal Foundations of the Social Market Economy » dans Philip Mirowski et Dieter Plehwe (eds.), The Road from Mont Pelerin: The making of the Neoliberal Thought Collective, Cambridge, Massachussetts / London, England, Harvard University Press, 2009, p. 98‑138 ; M. Foucault, Naissance de la biopolitique – Cours au Collège de France (1978-1979), op. cit.

[42] Dans un discours devant la Société du Mont-Pèlerin, Friedrich Hayek s’opposait très clairement à un réductionnisme économique : « une philosophie politique ne peut jamais se fonder exclusivement sur l’économie, ni s’exprimer principalement en termes économiques » Friedrich Hayek, Studies in Philosophy, Politics and Economics, New York, Simon & Schuster, 1967, p. 150.

[43] On verra notamment comment Jacques Rueff affirme l’intrication de l’ordre social et la dynamique monétaire Jacques Rueff, L’ordre social, Paris, Éditions de Médicis, 1948..

[44] P. Mirowski, « Postface: Defining Neoliberalism », art cit, p. 427.

[45] P. Dardot et C. Laval, La nouvelle raison du monde. Essai sur la société néolibérale, op. cit., p. 16.

[46] On pense notamment à des auteurs qui s’accommodent très bien à la sauce néolibérale, des auteurs comme Richard Florida ou avant lui Daniel Bell . Voir Richard Florida, The Rise of the Creative Class: Revisited, New York, Basic books, 2012 ; Daniel Bell, The Cultural Contradictions of Capitalism, New York, Basic Books, 1976.

[47] R. Florida, The Rise of the Creative Class: Revisited, op. cit., p. 160.

[48] Ibid. p. 448, n. 2.

[49] Friedrich A. Hayek, Droit, législation et liberté. Règle et ordre (tome 1), Paris, PUF, 1995, p. 41-sq.

[50] S. Hall, Le populisme autoritaire. Puissance de la droite et impuissance de la gauche au temps du thatchérisme et du blairisme, Paris, Amsterdam, 2008..

[51] Selon Cristi, chez Hayek la figure du Führer est remplacée par celle de l’entrepreneur et ce passage d’une figure à l’autre est accompagné d’une nécessaire répression de la démocratie. Renato Cristi, Carl Schmitt and Authoritarian Liberalism, Cardiff, University of Wales Press, 1998, p. 23. .

[52] F. Hayek, Studies in Philosophy, Politics and Economics, op. cit., p. 161.

[53] À propos de ces penseurs de la « liberté », Denord évoque la compromission de Rougier avec la France de Vichy F. Denord, « Aux origines du néo-libéralisme en France. Louis Rougier et le Colloque Walter Lippmann de 1938 », art cit. et Mirowski celle de Hayek avec le Chili de Pinochet P. Mirowski, « Postface: Defining Neoliberalism », art cit..

[54] Christian Arnsperger, Critical Political Economy. Complexity, Rationality, and the Logic of Post-Orthodox Pluralism, London, Routledge, 2007.

[55] David Harvey, « From managerialism to entrepreneurialism: the transformation in urban governance in late capitalism », Geografiska Annaler. Series B. Human Geography, 1989, vol. 71, no 1, p. 3‑17. ; P. Mirowski, « Postface: Defining Neoliberalism », art. cit, p. 445 P. Mirowski, « Postface: Defining Neoliberalism », art. cit, p. 445.

[56] Maurizio Lazzarato, Expérimentations politiques, Paris, Amsterdam, 2009, p. 65.

[57] Don Mitchell, « Postmodern geographical praxis? Post-modern impulse and the war against homeless people in the post-justice city » dans Postmodern Geography: Theory and Praxis, Oxford, Blackwell, 2001, p. 71.

[58] Phil Hubbard, « Revenge and Injustice in the Neoliberal City: Uncovering Masculinist Agendas », Antipode . A Radical Journal of Geography, 2004, vol. 36, no 4, p. 665‑686.

[59] Andy Merrifield, « The dialectics of dystopia: Disorder and zero tolerance in the city », International Journal of Urban and Regional Research, 2000, vol. 24, p. 473‑489..

[60] Neil Smith, « New Globalism, New Urbanism: Gentrification as Global Urban Strategy », Antipode, 2002, vol. 34, no 3, p. 427‑450.

[61] Andy Merrifield, Dialectical Urbanism: Social Struggles in the Capitalist City, New York, MonthlyReview Press, 2002, p. 12.

[62] À ce propos, Harvey fait un pas significatif. D. Harvey, « From managerialism to entrepreneurialism: the transformation in urban governance in late capitalism », art cit ; David Harvey, Géographie et capital, Paris, Syllepse, 2010 ; D. Harvey, Le capitalisme contre le droit à la ville. Néolibéralisme, urbanisation, résistances, op. cit..

[63] D. Harvey, « From managerialism to entrepreneurialism: the transformation in urban governance in late capitalism », art cit.

[64] Or, il est d’usage de parler de « crise du logement ». S’il s’agit bien d’une crise, celle-ci est bien politique. Une analyse de contenu de la presse genevoise depuis les années 1960 montre que le thème resurgit, agité par les agences immobilières (régies) puis par les associations de locataires. Si une crise dure plus de quarante ans, cela laisse penser que le terme est mal choisi ou alors qu’il désigne autre chose qu’un moment passager. Selon le Littré, « crise » désigne un moment de transition et non un moment passager. De fait, la durée de cet état nous incite à y voir soit autre chose qu’une « crise », soit quelque chose comme une structure économique propre au capitalisme. Cette « crise » serait un mécanisme de contrôle des prix de cette bulle immobilière. On peut ainsi voir dans la crise une part du processus de gouvernementalité.

[65] D. Harvey, Le capitalisme contre le droit à la ville. Néolibéralisme, urbanisation, résistances, op. cit., pp. 48-sq..

[66] Voir à ce propos Maurizio Lazzarato, Gouverner par la dette, Paris, Les Prairies ordinaires, 2014 ; Maurizio Lazzarato, La fabrique de l’homme endetté: essai sur la condition néolibérale, Paris, Amsterdam, 2011. Soulignons de surcroît l’importance des technologies de contrôle dont se dote la ville contemporaine. De nombreuses recherches mettent en évidence la sécuritarisation des villes et le marché que cela représente. En 2011, Mathieu Rigouste commentait le caractère inespéré de la diffusion des téléphones portables pour les « marchands de peur », autrement dit les idéologues sécuritaires que sont Alain Bauer ou Xavier Raufer. Ses travaux décrivent avec précision ce marché propre à la gouvernementalité néolibérale ; voir Mathieu Rigouste, Les marchands de peur: la bande à Bauer et l’idéologie sécuritaire, Paris, Libertalia, 2011. Ce point corrobore les études sur la ville punitive mentionnées plus haut P. Hubbard, « Revenge and Injustice in the Neoliberal City: Uncovering Masculinist Agendas », art cit ; D. Mitchell, « Postmodern geographical praxis? Post-modern impulse and the war against homeless people in the post-justice city », art cit.. La smart city constitue effectivement une forme aboutie de ville du contrôle. (Voir notamment N. Rodrigues, « Gouvernementalité algorithmique, smart cities et justice spatiale », justice spatiale | spatial justice, 2016, 10 ; M. Rigouste, Les marchands de peur: la bande à Bauer et l’idéologie sécuritaire, op. cit..). Le contrôle ne s’exerce pas que par la dette, mais que la ville elle-même devient « dispositif de pouvoir » c’est—à-dire « un ensemble résolument hétérogène comportant des discours, des institutions, des aménagements architecturaux, des décisions réglementaires, des lois, des mesures administratives, des énoncés scientifiques, des propositions philosophiques, morales, philanthropiques ; bref, du dit aussi bien que du non-dit » (cf. Michel Foucault, « Pouvoirs et stratégies » dans Dits et Ecrits (1976 – 1988) – t. II, Paris, Gallimard, 1996, p.

[67] M. Lazzarato, Expérimentations politiques, op. cit. ; M. Lazzarato, La fabrique de l’homme endetté: essai sur la condition néolibérale, op. cit. ; M. Lazzarato, Gouverner par la dette, op. cit. ; M. Lazzarato, La fabrique de l’homme endetté: essai sur la condition néolibérale, op. cit. ; W. Brown, Défaire le dèmos. Le néolibéralisme, une révolution furtive, op. cit.

[68] Yves Citton, Pour une écologie de l’attention, Paris, Seuil, 2014 ; Yves Citton (ed.), L’économie de l’attention. Nouvel horizon du capitalisme?, Paris, La Découverte, 2014.

[69] T.W. Adorno, Des Étoiles à terre. La rubrique astrologique du « Los Angeles Times », Paris, Exils, 2000 ; M. Fisher, Le réalisme capitaliste. N’y a-t-il aucune alternative, Genève/Paris, Entremonde, 2018.

[70] Manuel Castells, Luttes urbaines et pouvoir politique, Paris, Maspero, 1973 ; Michel Lussault, De la lutte des classes à la lutte des places, Paris, Grasset, 2009.

[71] Miguel Abensour, La Démocratie contre l’État. Marx et le moment machiavélien, Paris, Le Félin, 2004.

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