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Le nouveau ministre de l’Éducation nationale, Gabriel Attal, vient d’interdire l’accès à l’école publique à des jeunes femmes portant une abaya n’est pas une simple diversion visant à faire oublier la faillite complète des politiques éducatives menées par Macron depuis 2017, le manque structurel de moyens pour l’École publique et l’appauvrissement continu des personnels de l’Éducation nationale. Cette décision s’inscrit dans une vaste offensive raciste menée à l’encontre des musulman·es depuis au moins une vingtaine d’années. 

Cette offensive de grande ampleur – à la fois politique, intellectuelle et médiatique a imposé progressivement un système de discriminations contre les musulman·es et installé un dispositif idéologique dans lequel ils et elles apparaissent immanquablement comme un « ennemi de l’intérieur », qu’il s’agirait de surveiller, de contrôler et de punir quand ils ou elles refusent de s’effacer complètement. 

Pour comprendre l’annonce d’Attal, il faut en outre prendre au sérieux la falsification de la laïcité – pour reprendre les termes du grand historien de la laïcité Jean Baubérot – qu’a introduite la loi du 15 mars 2004 (interdisant les signes religieux dits « ostentatoires » à l’école). Alors que la laïcité – notamment via la loi de 1905 séparant les Églises et l’État – visait à garantir la liberté de conscience et d’exercice des cultes mais aussi l’égalité des lois, n’interdisant les signes religieux que du côté des institutions publiques et de leurs personnels, la loi de 2004 a retourné l’obligation de neutralité religieuse vers les usagers·ères, ciblant spécifiquement – dans le débat médiatico-politique – les musulman·es. 

Ce texte d’Ugo Palheta est extrait de son livre La Possibilité du fascisme (Éditions La Découverte).

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Il serait éthiquement inacceptable et politiquement erroné de méconnaître la diversité des cibles du racisme dans la France contemporaine, et encore davantage de les mettre en concurrence ou de les hiérarchiser. Pour autant, cela ne doit pas conduire à manquer le rôle fondamental joué par l’islamophobie dans la mise en place à partir des années 1980 d’une nouvelle doxa nationaliste et raciste. Celle-ci ne cessera ensuite de se déployer et produira l’essentiel de ses effets, en France et à l’échelle internationale, après le 11 septembre 2001.

En effet, c’est en grande partie sur le terrain de l’hostilité aux musulmans que va ré-émerger une question raciale et que va s’opérer cette « droitisation » du champ politique dont il fut beaucoup question lors de la victoire de Sarkozy aux élections présidentielles de 2007. Celle-ci doit être comprise à la fois dans sa dimension de radicalisation de la droite (et de son électorat) mais aussi comme glissement de la gauche vers la droite, matérialisé par le débauchage de personnalités « de gauche » dans le premier gouvernement Sarkozy puis par la politique menée par le PS entre 2012 et 2017.

De ce point de vue, le développement de l’islamophobie ne se réduit pas à un processus de recouvrement déguisé du racisme anti-Arabes « traditionnel ». Même s’il le prolonge en partie (mais en partie seulement puisqu’il cible également nombre d’immigrés ou de descendants d’immigrés subsahariens ainsi que des personnes converties à l’islam qui ne sont pas issues de l’immigration postcoloniale[1]), il n’est pas un simple costume dans lequel se présenterait le « vrai » racisme (sous-entendu biologique), toujours identique à lui-même sous l’écorce du différentialisme culturel. Autrement dit, l’islamophobie n’est en rien un simple masque – qui pourrait être retiré aisément et sans dommage – mais la principale forme politique et idéologique sous laquelle se présente aujourd’hui le racisme d’origine coloniale, forme qui doit en tant que telle être prise au sérieux.

Elle permet en effet d’affirmer l’altérité et la dangerosité des immigrés et descendants d’immigrés extra-européens en raison de leur appartenance, réelle ou supposée, à une « communauté musulmane », qui serait étrangère sinon hostile à la « communauté nationale ». De cette altérité et de cette dangerosité découlerait la nécessité de les surveiller, de contrôler leurs moindres faits et gestes, de s’assurer sans cesse de leur adhésion aux « valeurs de la République » (bafouées par la République elle-même, à travers ses principales institutions), voire de les discriminer au prétexte de leur prétendu « communautarisme »[2].

Une telle entreprise idéologique et politique de stigmatisation et de discrimination ne pouvait prospérer sans se donner des dehors respectables[3]. Ainsi s’est-elle appuyée sur une intense mobilisation intellectuelle et politique, généralement menée au nom des « valeurs judéo-chrétiennes » et/ou des « principes républicains ». Ces valeurs et principes seraient ainsi mis en péril par la présence visible et l’activisme des musulmans en France.

De ce point de vue, la laïcité a sans nul doute constitué la pièce centrale du dispositif islamophobe[4]. Remodelée à partir des années 1990 et surtout dans les années 2000, détournée de son sens originel, « falsifiée »[5], elle n’a cessé depuis de fonctionner comme un opérateur de racialisation[6]. Elle est en effet de plus en plus considérée, non comme un principe juridique fondamental garantissant la liberté de conscience et de culte ainsi que l’égalité des citoyens devant l’État, mais comme un impératif de neutralité religieuse s’appliquant à tous et en toute occasion (non aux seuls agents de l’État dans l’exercice de leur activité, comme c’était le cas antérieurement) et comme un élément central de l’identité nationale française voire, d’une manière plus audacieuse encore, de la « civilisation judéo-chrétienne »[7].

De ce fait, toute pratique considérée comme « contraire à la laïcité » – c’est-à-dire contraire à cette « nouvelle laïcité » qui s’est imposée avec la loi du 15 mars 2004 sur les signes religieux dans les écoles françaises[8] – sera perçue comme manifestant un défaut ou un refus d’intégration, voire une tentative « communautariste » de saper les fondements de la République en imposant des valeurs qui seraient contraires à celles de la France. Elle justifiera ainsi, si l’on ose le mot, une excommunication nationale-républicaine. En stigmatisant toujours davantage les musulmans, on a ainsi contribué à construire un « problème musulman » sous couvert de le résoudre.

Le harcèlement médiatique et politique dont ont systématiquement fait l’objet ces dernières années les femmes musulmanes ayant l’impudence d’apparaître comme telles publiquement, et non de demeurer à la place qui leur est socialement assignée (c’est-à-dire, dans le monde du travail, les emplois généralement les moins valorisés), serait incompréhensible sans cette « révolution conservatrice dans la laïcité[9] ».

Que l’on pense par exemple à Ilham Moussaïd, présente sur une liste du NPA aux élections régionales en 2010, à Houria Bouteldja, sans cesse présentée comme antisémite et homophobe, mais aussi plus récemment à la chanteuse Mennel Ibtissem, contrainte sous la pression politique et médiatique de quitter l’émission télévisée « The Voice », à Maryam Pougetoux, présidente de l’Unef-Sorbonne accusée notamment – par une animatrice du Printemps républicain – de fomenter rien de moins qu’une « infiltration » et un « noyautage » du syndicalisme étudiant par les Frères musulmans[10], ou encore au rappeur Médine, réputé faire l’apologie du terrorisme djihadiste.

On se souvient par ailleurs que Latifa Ibn Ziaten, mère d’un militaire assassiné par Mohammed Merah, avait été sifflée lors d’un colloque tenu en décembre 2015 à l’Assemblée nationale, par des participants lui ayant tenu ces propos :

« Vous n’êtes pas française madame. Vous dites que vous avez la nationalité française, mais vous ne pouvez pas parler de la laïcité alors que vous portez un foulard, vous faites honte à la France[11]. »

De même, il aura suffi à la journaliste Rokhaya Diallo, au militant associatif Marwan Muhammad ou à l’humoriste Yassine Belattar d’affirmer publiquement leur islamité, et de critiquer l’islamophobie, pour être également la cible de campagnes de harcèlement et de diffamation. Celles-ci visaient en particulier à dénier toute valeur à leur parole et à les empêcher d’exercer leurs métiers, voire à faire d’eux des fourriers de l’intégrisme religieux. Dans leur accumulation, ces exemples donnent à voir que, derrière la « question patente » des signes religieux se dissimule une « question latente » : celle de l’acceptation de la présence en France des immigrés et descendants d’immigrés postcoloniaux, du traitement qui leur est réservé et de la place qui leur est assignée[12].

Notons au passage que ce harcèlement islamophobe n’implique pas simplement des intellectuels, des hommes politiques et des médias classés à droite ou à l’extrême droite. Certaines officines issues de la « gauche » telles que le Printemps républicain et la LICRA, ainsi que certains journaux traditionnellement classés à « gauche » comme Marianne et Charlie Hebdo, y ont largement contribué ces dernières années et ont même parfois été à l’origine des polémiques visant des musulmans en vue dans l’espace public. Cela signale d’ailleurs à quel point il ne s’agit pas simplement pour des intellectuels comme Laurent Bouvet (l’un des fondateurs du Printemps républicain) de diagnostiquer une « insécurité culturelle », mais de la renforcer en alimentant en permanence les obsessions identitaires.  

Si l’instrumentalisation islamophobe de la laïcité est si redoutable, c’est tout d’abord qu’un immigré ou un descendant d’immigrés extra-européens ne saurait s’y opposer sans se voir immédiatement qualifié d’« anti-républicain », donc d’« anti-Français », voire d’« islamiste ». Si la critique provient de quelqu’un qui n’est pas suspect d’être musulman (puisqu’il s’agit bien ici d’une logique permanente du soupçon), il sera inévitablement taxé d’« angélisme » ou d’« islamo-gauchisme » – expression dont il faut mesurer la symétrie presque parfaite avec le « judéo-bolchévisme » dont l’extrême droite agitait autrefois le fantasme. On lui reprochera en effet de méconnaître l’offensive menée par l’islam politique et la nécessité d’« adapter » la laïcité (c’est-à-dire de rompre avec l’esprit et la lettre de la loi de 1905), voire de se faire le complice, involontaire ou non, d’une trahison de la France et des « valeurs occidentales ».

Mais la puissance d’une telle instrumentalisation est aussi liée au fait que la logique discriminatoire sous-jacente est par définition proliférante. En effet, le champ des pratiques susceptibles d’être interdites par la « nouvelle laïcité » est potentiellement sans limites. De l’interdiction des signes religieux dits « ostentatoires » pour les élèves dans l’enseignement secondaire (qui – secret de polichinelle – visait en fait les musulmans, en particulier les musulmanes), on est passé au licenciement de la directrice-adjointe d’une crèche privée parce qu’elle portait un foulard (au nom du fait que, même structure privée, celle-ci aurait une mission de service public), à l’interdiction pour des mamans voilées d’accompagner les sorties scolaires de leurs enfants (circulaire Chatel), à l’interdiction du voile intégral dans l’espace public, et même à l’exclusion scolaire de jeunes lycéens et lycéennes au prétexte que respectivement leurs barbes et leurs jupes longues constitueraient autant de signes religieux ostentatoires. Un « guide de la laïcité à l’école » est d’ailleurs récemment venu consacrer institutionnellement ce qui relevait jusqu’à présent de pratiques locales contestées[13].

La loi Travail, imposée en 2016, a systématisé ce processus de « discrimination légale par capillarité[14] ». Les entreprises ont en effet été autorisées à « insérer dans le règlement intérieur une clause relative au principe de neutralité et imposer aux salariés une restriction de la manifestation de leurs convictions, notamment politiques et religieuses, à condition qu’elle soit justifiée par l’exercice d’autres libertés et droits fondamentaux ou par les nécessités du bon fonctionnement de l’entreprise ». De même, la Cour de justice de l’Union européenne a rendu un avis en 2017 selon lequel une entreprise peut interdire le port du foulard, sous certaines conditions qui sont suffisamment vagues pour entériner, voire renforcer la discrimination contre les musulmans, et en particulier les musulmanes[15]. La porte est donc grande ouverte pour l’extension de la « nouvelle laïcité » à l’ensemble des salariés des entreprises privées mais aussi à l’Université.

Étant donné l’ampleur des discriminations islamophobes d’ores et déjà endémiques et mesurables[16], c’est donc une politique séparatiste qui se met en place. Celle-ci prend précisément pour prétexte la lutte contre le séparatisme communautaire dont les musulmans se rendraient coupables en toute occasion. Ainsi se trouve reconduite la logique ségrégationniste et raciste évoquée plus haut à propos des Roms : les dirigeants politiques mettent en place des mesures qui marginalisent objectivement un groupe, ou qui entérinent les pratiques d’exclusion sociale qui le ciblent ; puis ils justifient ces mesures et ces pratiques au nom de la marginalité et de l’exclusion dans lesquelles ce groupe se complairait, et au nom de son incapacité, pour de prétendues raisons culturelles, à s’insérer socialement et économiquement. Quoi de plus commode que de légitimer l’exclusion par l’auto-exclusion, la marginalisation par l’auto-marginalisation ?

Il est encore une autre dimension de l’islamophobie moins souvent relevée mais cruciale pour notre objet : son développement est en effet l’un des principaux vecteurs de l’aiguisement du nationalisme français. […] Le nationalisme français s’affirme comme un nationalisme impérialiste et guerrier. Cela est d’autant plus vrai que le militarisme, et plus largement le complexe militaro-industriel, ont joué depuis au moins deux siècles un rôle central dans la construction et le développement de l’État et du capitalisme français[17].

Mais s’il se radicalise actuellement, c’est en raison de facteurs qui tiennent moins au temps long qu’à certains traits de la période dans laquelle nous nous situons. Celle-ci est marquée en particulier par le déclin de l’impérialisme français – « Si nous avons des réactions d’ultranationalisme fascistoïde, c’est parce que nous sommes de grands universalistes-dominateurs en déclin » disait Pierre Bourdieu[18] – et l’affaiblissement de ce que René Gallisot avait nommé l’« État national social[19] ». C’est dans ce cadre qu’il faut comprendre le réveil du nationalisme français et le développement de l’islamophobie – sans évidemment que l’islamophobie, et plus largement le racisme, soit réductible au nationalisme[20].

La « République », à laquelle est à présent unanimement identifiée la nation française – alors même que la droite nationaliste continuait jusqu’aux années 1980 à combattre certains des principes républicains fondamentaux, en particulier la laïcité –, est le cadre idéologico-institutionnel permettant non seulement d’unifier imaginairement un corps national-social de plus en plus atomisé par les contre-réformes néolibérales et d’occuper l’espace politique et symbolique laissé vacant par la remise en cause de la souveraineté nationale-populaire.

On ne s’étonnera pas que ceux qui, comme N. Sarkozy, ont le plus fait pour imposer le règne du « supranationalisme du capital[21] », en particulier via l’Union européenne, donc pour vider de toute substance cette souveraineté, sont aussi ceux qui ont le plus œuvré au réveil d’un nationalisme agressif, xénophobe et raciste. À mesure que le capitalisme se déterritorialise et que les bourgeoisies se libèrent de leurs ancrages nationaux – un processus d’ailleurs loin d’être achevé[22] –, se développent les nationalismes, non seulement en réaction mais alimentés par ceux-là mêmes qui favorisent cette déterritorialisation et cette « libération ».

Il n’est donc pas suffisant de constater avec Benedict Anderson que la nation est une « communauté imaginaire », autrement dit une construction socio-historique dans laquelle les intellectuels ont joué un rôle central[23]. Il faut encore évaluer les effets – qui n’ont rien d’imaginaire – de cette construction. Il importe notamment de donner à voir le rôle des dirigeants politiques et des États dans ce processus, et de décrire les luttes politiques et symboliques dont elle ne cesse d’être l’enjeu (puisque les nations ne sont figées que dans l’imaginaire nationaliste).

Si c’est le nationalisme qui fait la nation, et non l’inverse comme le postule la pensée nationaliste[24], il importe de se demander comment la nation peut se trouver remodelée par les transformations du nationalisme, mais aussi du capitalisme et de l’État. En particulier, quelle nation tend à fabriquer le néo-nationalisme dont Sarkozy et ses continuateurs se sont faits les promoteurs, en recourant à une rhétorique venue des différentes composantes de l’extrême droite – notamment via Patrick Buisson, journaliste et militant d’extrême droite reconverti en spin doctor sarkozyste – et en allant jusqu’à créer un ministère de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Développement solidaire[25] ?

Sans ennemi identifié, le nationalisme ne peut guère se développer : il lui faut se donner des « communautés imaginaires » ennemies, vigoureuses et malfaisantes. Dans le cas des nations opprimées, les puissances colonisatrices ou néo-impériales constituent une cible logique, évidente et légitime. Mais dans la mesure où la France n’est aucunement une nation opprimée mais dominante, un travail intellectuel et politique constant est rendu nécessaire pour faire apparaître comme ennemis ou traîtres à la nation certains groupes minoritaires qui, subissant pourtant la stigmatisation et la discrimination, se trouvent constitués en puissance omniprésente et menaçante.

De ce point de vue, le consensus islamophobe permet assurément de solidifier l’imaginaire national, donc la nation, en invitant le groupe ethno-racial majoritaire à faire bloc contre la menace que représenteraient les musulmans. Le ciblage de l’islam et des musulmans, de leurs pratiques culturelles et religieuses (réelles ou imputées), la désignation des immigrés et descendants d’immigrés postcoloniaux comme toujours potentiellement extérieurs au corps national-social, permet en effet d’imposer une définition implicitement ethno-raciale de la France et de l’« identité française ». Il tend en outre à durcir les frontières internes à la société française[26], en fournissant au passage des armes idéologiques employables à propos d’autres minorités (en particulier les Roms et l’ensemble des non-Blancs, qu’ils soient ou non musulmans).

On comprend ainsi que, lors d’un meeting en septembre 2016 dans le cadre des primaires de la droite, Sarkozy ait pu affirmer : « Si l’on veut devenir français, on parle français, on vit comme un Français. Nous ne nous contenterons plus d’une intégration qui ne marche plus, nous exigeons l’assimilation. Dès que vous devenez français, vos ancêtres sont gaulois. » De manière significative, cette profession de foi nationaliste était intimement associée, dans le même discours, à ce qu’il appelait l’« islam extrémiste et politique », dont le but serait de « provoquer la République ». Ainsi promettait-il de mener « une guerre impitoyable », non seulement contre le terrorisme se réclamant de l’islam mais contre les « comportements moyenâgeux qui veulent qu’un homme se baigne en maillot de bain quand les femmes sont enfermées dans des burkinis ». Dénonçant ce qu’il appelait alors « la tyrannie des minorités », il assurait qu’il serait « le président de la communauté nationale car en France, la seule communauté qui vaille est la communauté française ».

Notes

[1] Sur ce dernier point, Voir S. Brun et Juliette Galonnier, « Devenir(s) minoritaire(s). La conversion des Blanc‑he‑s à l’islam en France et aux États-Unis comme expérience de la minoration », Tracés. Revue de science humaine, 2016, n°30.

[2] Sur la rhétorique du « communautarisme » et sa fonction idéologique, Voir F. Dhume-Sonzogni, Le communautarisme. Enquête sur une chimère du nationalisme français, Paris, Demopolis, 2016.

[3] Pour une exploration de cette notion de « racisme respectable » appliquée à l’islamophobie, Voir Rachad Antonius, 2002, « Un racisme “respectable” », in J. Renaud, L. Pietrantonio, et G. Bourgeault (dir.), Les relations ethniques en question : ce qui a changé depuis le 11 septembre 2001, Montréal, Les Presse de l’Université de Montréal, pp. 253-271 ; S. Bouamama, L’affaire du foulard islamique: la production d’un racisme respectable, Roubaix, Geai Bleu, 2004 ; P. Tevanian, La mécanique raciste, op. cit.

[4] Sur ce point, voir notamment : J. W. Scott, La Politique du voile, Paris, Éditions Amsterdam, 2017 [2007].

[5] Voir J. Baubérot, La Laïcité falsifiée, La Découverte, 2012.

[6] Sur le concept de racialisation, Voir D. Fassin, « Ni race ni racisme. Ce que racialiser veut dire », in D. Fassin (dir.), Les Nouvelles frontières de la société française, Paris, La Découverte, 2012 [2010].

[7] S’il est souvent fait référence aux « valeurs judéo-chrétiennes », c’est qu’elles seules autoriseraient la séparation du politique et du religieux (quand bien même les configurations en Europe sont très disparates en la matière). On pourrait également rappeler à quelle point l’Église catholique fut hostile à la laïcité et la combattit violemment.

[8] L’expression « nouvelle laïcité » est issue d’un rapport rendu en 2003 par un dirigeant de la droite, François Baroin. Elle souligne explicitement la rupture entre la laïcité de 1905 et ce qui s’impose sous ce label à partir des années 2000.

[9] Selon l’expression de Pierre Tevanian. Voir Dévoilements. Du hijab à la burqa : les dessous d’une obsession française, Paris, Éditions Libertalia, 2012.

[10] Voir F. Durupt, « Voile, “islamisme”… de Mennel à Maryam Pougetoux, des polémiques et des méthodes qui se répètent », Libération, 14 mai 2018, http://www.liberation.fr/france/2018/05/14/voile-islamisme-de-mennel-a-maryam-pougetoux-des-polemiques-et-des-methodes-qui-se-repetent_1649900.

[11] « Huée à l’Assemblée nationale, Latifa Ibn Ziaten va porter plainte », BFM-TV.com, 22 décembre 2015, http://www.bfmtv.com/societe/huee-a-l-assemblee-nationale-latifa-ibn-ziaten-va-porter-plainte-938887.html.

[12] Voir P. Bourdieu, Interventions, 1961-2001. Science sociale et action politique. Textes choisis et présentés par F. Poupeau et T. Discepolo, Marseille, Agone, 2002. Sources : archives du Collège de France. Texte daté de novembre 1989.

[13] M. Battaglia et L. Cédelle, « Signes religieux, dispenses de cours, enseignements contestés : l’école se dote d’un nouveau guide de la laïcité », Le Monde, 29 mai 2018, https://www.lemonde.fr/education/article/2018/05/29/signes-religieux-dispenses-de-cours-enseignements-contestes-l-ecole-se-dote-d-un-nouveau-guide-de-la-laicite_5306552_1473685.html.

[14] Voir A. Hajjat et M. Mohammed, Islamophobie. Comment les élites françaises fabriquent le « problème musulman », Paris, La Découverte, 2013, p. 143-162.

[15] Voir J.-B. Jacquin, « Europe : les entreprises peuvent interdire le voile sous conditions », Le Monde, 14 mars 2017, http://www.lemonde.fr/emploi/article/2017/03/14/la-justice-europeenne-se-penche-sur-le-port-du-voile-islamique-au-travail_5093936_1698637.html.

[16] Une enquête a pu, par exemple, montrer que les hommes musulmans ont quatre fois moins de chances d’être convoqués à un entretien d’embauche que leurs homologues catholiques. Voir M.-A. Valfort, Discriminations religieuses à l’embauche : une réalité. Antisémitisme et islamophobie sur le marché du travail français, Rapport pour l’Institut Montaigne, octobre 2015. Plus largement, voir la synthèse proposée sur les discriminations islamophobes par A. Hajjat et M. Mohammed : Islamophobie, op. cit., p. 25-70.

[17] Voir C. Serfati, Le Militaire. Une histoire française, Paris, Éditions Amsterdam, 2017.

[18] Dans ses cours au Collège de France sur l’État.

[19] Voir notamment : R. Galissot, « Lutte de classes et État national social », L’Homme et la société, 1995, n°117-118.

[20] Sur ce point, voir l’analyse nuancée d’Étienne Balibar : « Racisme et nationalisme », in E. Balibar et I. Wallerstein, Race, nation, classe, op. cit.

[21] L’expression est de Cédric Durand. Voir notamment : En finir avec l’Europe, op. cit.

[22] Voir S. Chauvin et B. Cousin, « Vers une hyper-bourgeoisie globalisée ? », in B. Badie et D. Vidal, Un monde d’inégalités, Paris, La Découverte, 2017.

[23] Voir également les travaux d’Anne-Marie Thiesse, en particulier : La Création des identités nationales. Europe, 18e-20e siècle, Paris, Éditions du Seuil, 1999.

[24] Voir E. Hobsbawm, Nations et nationalisme depuis 1780 : programme, mythe, réalité, Paris, Gallimard, 1992.

[25] Sur cette initiative sarkozyste, Voir Gérard Noiriel, À quoi sert « l’identité nationale » ?, Marseille, Agone, 2007. Voir également : L. De Cock (dir.), Comment Nicolas Sarkozy écrit l’histoire de France, Marseille, Agone, 2008.

[26] Voir D. Fassin (dir.), Les Nouvelles frontières de la société française, op. cit

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