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Depuis une dizaine d’années, le Rassemblement National de Marine Le Pen, à travers sa stratégie de « dédiabolisation », tente d’effacer des pans entiers de son histoire, en particulier de ses origines. Dans une série de plusieurs articles, Jean-Paul Gautier revient sur différents épisodes et aspects de l’histoire du Front national (devenu Rassemblement national en 2018 sans que rien ne change de son profil politique, stratégique et programmatique). Ce retour propose ainsi une plongée détaillée dans l’histoire du fascisme français, du début des années 1960 à nos jours. 

Jean-Paul Gautier est historien des extrêmes droites, et l’auteur notamment du livre Les extrêmes droites en France, de 1945 à nos jours (Syllepse, 2017). 

D’Occident à Ordre Nouveau : rassembler les extrêmes droites

Lorsqu’en 1984 Jean-Marie Le Pen publie son livre « Les Français d’abord », dans lequel il brosse son autoportrait, il omet de parler de la naissance du Front national (FN). En effet, il n’est pas à l’origine de la création du Front national. Ce sont les responsables du mouvement néofasciste Ordre Nouveau qui ont pris l’initiative de constituer le Front national. Le 1er novembre 1968, Occident est dissout, sans poursuite judiciaire, après une énième action violente : le plasticage de la librairie maoïste rue Gît-le-Cœur. Occident ne représente plus aucun intérêt pour le pouvoir.

À la rentrée universitaire, des anciens d’Occident, Jack Marchal, Gérard Ecorcheville, Marie-France David, Hugues Leclère, Jean-Noël Prade réunis autour d’Alain Robert (« la bande à Robert ») créent le Groupe Union Droit qui va devenir le Groupe Union Défense (GUD). Sa base opérationnelle se situe à la faculté d’Assas qui recrutait une population étudiante assez aisée plutôt à droite, et en tant que faculté de droit, elle attirait plutôt des partisans de l’ordre. Son but est de lutter contre « la contamination marxiste » de créer un « nid de résistance », une sorte de Nanterre inversée, « un Censier nationaliste ».

L’appel va être entendu, comme le note Jack Marchal :

« Occident venait d’être dissous, Alain Robert voulait éviter la dispersion des militants. Il s’agissait de se replier sur une faculté en attendant de créer une nouvelle organisation politique : Ordre Nouveau (ON). »

Comme chez son ancêtre, l’utilisation de la barre de fer prime sur la réflexion théorique. Le GUD va servir de base à la création d’un mouvement capable d’attirer la jeunesse nationaliste au-delà du cadre étroit de l’Université, mais surtout d’aller plus loin en attirant des générations déjà installées dans la société et la vie professionnelle pour s’inscrire dans la durée à l’image du MSI (« Mouvement social italien », en fait mouvement néofasciste italien qui a su regrouper après-guerre l’extrême droite mussolinienne et une partie de la droite conservatrice dont les monarchistes et qui a remporté un certain succès électoral).

Du côté de la Place Beauvau, ce type de mouvement est bien vu à condition de rester relativement dans les clous pour ne pas choquer une partie des gaullistes issue de la Résistance. En mai 1970, le mouvement Ordre Nouveau est créé (ses statuts ont été déposés à la préfecture de Nanterre le 15 décembre 1969), dirigé par l’avocat Jean-François Galvaire accompagnée de la « bande à Robert », de François Duprat, de Philippe Asselin, de Gabriel Jeantet.

François Brigneau, membre du mouvement, futur dirigeant du Front National et ancien milicien revient sur la formation d’Ordre Nouveau : « Un mouvement de jeunes qui, par son sérieux, suscite un mouvement d’adultes : le cas est peu commun et mérite qu’on s’y arrête » En juin 1972, lors du deuxième congrès d’Ordre Nouveau, le mouvement retrace l’historique de sa création et ses perspectives :

« En novembre 1969, une équipe de militants nationalistes provenant de mouvements sabordés par les anciens dirigeants (FEN, MNP), dissous par le pouvoir (Occident) ou trahis par leurs chefs (ARLP de Tixier-Vignancour), a créé Ordre Nouveau et a permis de devenir, en un peu plus de deux ans, l’unique parti politique constitué et structuré de l’opposition nationale […] Regrouper, unifier, faire un puissant parti. Nous serons un rassemblement sur des points précis qui constitueront le moteur de notre combat. Nous voulons acquérir une dimension autre que celle d’une secte ou d’un groupuscule. Nous voulons construire un grand parti comme le MSI que nous nous donnons comme modèle »[1].

Héritier d’Occident, Ordre Nouveau adopte la croix celtique et la nature reprend vite le dessus. Sa première apparition publique sent le soufre. Une réunion publique est annoncée pour le 10 décembre 1969 au cinéma Saint-Lambert dans le quinzième arrondissement de Paris. Mission impossible car la salle a été plastiquée. Une nouvelle réunion est annoncée pour le 26 février, avec la présence d’orateurs du MSI, du NPD allemand et des Suédois. Face à la mobilisation de l’extrême gauche, le meeting est interdit. Un nouveau meeting est appelé le 13 mai 1970 sur le thème : « Pour un 13 mai nationaliste ». Le 13 mai est une date phare pour l’extrême droite en référence au 13 mai 1958 à Alger. Le Monde rend compte du meeting et souligne l’idéologie néofasciste d’Ordre Nouveau :

« On cita beaucoup les grands anciens : Primo de Rivera, Brasillach, et les héros de l’OAS […]. On offrit à l’auditoire l’énumération d’une liste de dirigeants gauchistes dont les noms, comme par hasard, avaient une consonance étrangère. On cria ”la France aux Français”. La salle réclama que “Sartre soit fusillé”[2]. Le délégué du MSI fut accueilli bras tendu, comme au bon vieux temps du Duce. L’objectif d’Ordre Nouveau est la création d’un parti révolutionnaire, car “pour faire la Révolution, il faut un parti révolutionnaire” ».

Le mouvement se spécialise dans les actions de commando sur les campus universitaires. Chacune de ses réunions se veut une démonstration de force. Au lendemain des affrontements avec les antifascistes, lors du meeting d’Ordre Nouveau au Palais des Sports, le 9 mars 1971 (en vue des élections municipales), France Soir titre : « Atmosphère néo-nazie au meeting d’Ordre Nouveau ». Parmi les orateurs, François Duprat invite à voter « pour la propreté, pour nettoyer Paris, pour que la France revienne aux Français, c’est-à-dire à voter Ordre Nouveau », François Brigneau dénonce « l’invasion algérienne ».

D’Ordre Nouveau au Front national 

Même si le mouvement ne veut pas apparaitre « comme les casseurs de droite », son image devient vite un handicap par rapport aux législatives de 1973. Pour la direction, il apparait nécessaire de lisser l’image d’Ordre Nouveau, à la recherche de respectabilité, et donc de créer, en parallèle une structure de rassemblement : le Front national. Il faut « sortir l’opposition nationale de son ghetto et permettre la construction d’une troisième force capable d’affronter réellement le régime actuel et un éventuel Front Populaire » et mettre sur pied une organisation ayant une apparence légaliste et respectable.

La boussole d’Ordre Nouveau est donc le Mouvement Social Italien (MSI). Le mimétisme est tel que le Front national va prendre comme sigle la flamme tricolore du grand frère transalpin [qui, dans sa version italienne, symbolise l’âme de Mussolini montant au ciel]. Le MSI va par ailleurs lui donner un coup de pouce financier (affiches, matériel de propagande).

La création de cette nouvelle structure a posé débat à l’intérieur d’Ordre Nouveau (ON). Une position défend l’appellation « Front national pour un Ordre Nouveau ». Cette proposition est rejetée car trop marquée. Soit il s’agit d’une opération purement Ordre Nouveau et il est inutile d’utiliser une nouvelle référence, soit c’est une opération plus large regroupant des tendances voisines et Ordre Nouveau doit masquer sa présence. Les minoritaires craignent de voir éventuellement ce Front National échapper au contrôle d’Ordre Nouveau et qu’il se fonde dans une formation plus modérée. Face au mécontentement des jeunes adhérents, la direction majoritaire doit naviguer. Ordre Nouveau doit continuer de revendiquer le rôle dirigeant :

« Être révolutionnaire, ce n’est certainement pas vivre casqué et botté […], être révolutionnaire, c’est vouloir faire aboutir ses idées quelles que soient les voies employées. Un tel projet, impensable sans création d’un courant d’opinion en notre faveur, […] doit redonner au nationalisme l’audience qui devrait être la sienne. Le devoir de chaque jeune militant est de s’intégrer au Front national […]. Le Front national sera pour nous une chance de sortir du ghetto »[3].

François Brigneau précise qu’Ordre Nouveau doit patronner et investir les candidats Front National. Reste à trouver une locomotive. On va rechercher Le Pen, alors en hibernation depuis l’échec du poujadisme, de l’Algérie française et de la campagne de Tixier-Vignancour de 1965. Redoutant d’être pris en otage, il hésite et finalement donne son accord :

« Nous avions besoin les uns des autres. Les nationalistes-révolutionnaires cherchaient une façade présentable et moi, la façade présentable, je cherchais des troupes : nous finîmes par trouver un accord »[4].

Jean-Marie Le Pen définit les ambitions du Front national. Il s’agit de rassembler « la droite nationale, sociale et populaire. Il faut redonner à la France une droite digne d’elle, une droite qui ose dire son nom et se battre sous ses couleurs […]. Rassembler les différents courants qui, jusqu’ici la dispersent, la divisent et l’affaiblissent ; donner aux Français un moyen d’expression et d’action politique »[5].

Le 5 octobre 1972 voit le jour le Front national – de son vrai nom le Front national pour l’Unité française (FNUF). Son bureau politique est composé de Le Pen (président) de François Brigneau (Ordre Nouveau, vice-président), d’Alain Robert (Ordre Nouveau, secrétaire général), Roger Holeindre (Front uni de soutien du Sud Vietnam, secrétaire général-adjoint), Pierre Bousquet (ex Waffen-SS, trésorier) et Pierre Durand (trésorier-adjoint).

Certains personnages au passé sulfureux participent aux instances : Gabriel Jeantet, ex-secrétaire général des étudiants d’Action Française, membre de la Cagoule, chargé de mission au cabinet de Pétain de 1940 à 1944 et membre du conseil national d’Ordre Nouveau ; Pierre Clémenti, ex-dirigeant du Parti National Collectiviste et de l’organisation collaborationniste la Ligue des Volontaires Français contre le bolchevisme ; et François Duprat.

Le 7 novembre 1972, se tient, à la Mutualité, le premier meeting du Front national. Changement d’ambiance : casques et barres de fer sont remisés au vestiaire, le service d’ordre est discret, le public plus âgé[6]. La tactique du Front national pour les élections s’articule autour des trois axes, les « 3 A » : « abaisser les communistes, abaisser l’UDR, abaisser la majorité », avec comme mot d’ordre : « Chassons les voleurs du pouvoir », vieux refrain emprunté aux ligues d’extrême droite des années 1930, et : « sortons les sortants ! » emprunté à Poujade ; et comme slogans : « Barrons la route au Front populaire », « Avec nous avant qu’il ne soit trop tard » (emprunté au MSI).

À la tribune, Roger Holeindre déclare : « Nous rendrons à l’armée son honneur et sa foi ». Alain Robert s’adresse à la jeunesse : « Il faut lui redonner des héros dignes de notre Occident […]. Nos parachutistes qui se sont illustrés en Indochine ». Quant à Jean-Marie Le Pen : « Dans ce combat, nous n’irons pas seuls, il y aura ceux qui sont tombés dans les rizières, dans les djebels et face au poteau d’exécution » (allusion aux tueurs de l’OAS : Dovecar, Degueldre, Bastien-Thiry). La cible principale est la majorité de droite responsable pour Le Pen de tous les maux et qui « a réalisé en grande partie le programme du Parti communiste en Indochine et en Afrique du Nord […], qui a aligné la politique de la France sur l’URSS ». L’UDR lui apparait incapable de résoudre les problèmes économiques et sociaux, d’assurer l’ordre et le respect de la loi :

« C’est la majorité qui laisse envahir le pays par une immigration incontrôlée (qui) menace l’emploi, la sécurité, la santé des Français. C’est la majorité qui a livré l’université et les lycées à la gabegie, l’anarchie et le désordre. C’est la majorité qui ne gouverne plus que la décadence sous les bravos hystériques de l’intelligentsia de gauche ».

Tensions internes et divergences stratégiques

Aux élections législatives de 1973, là où le Front national ne présente pas de candidat, Le Pen se résout à voter pour les candidats de la majorité pour « barrer la route au communisme ». Les résultats ne sont pas à la hauteur : le FN n’est en capacité que de présenter 104 candidats, dont les deux tiers issus d’Ordre Nouveau, chiffre très éloigné des 700 annoncés. Le 4 mars, le Front national récolte en moyenne moins de 2% (Le Pen 5% à Paris dans le 15e arrondissement). C’est une véritable contre-performance, un désastre électoral pour l’extrême droite. N’est pas le MSI qui veut.

Le Front national tient un congrès extraordinaire les 28 et 29 avril où se joue le rapport de force pour la direction du mouvement. Pour Le Pen, « trois possibilités existent : ou chacun reprend ses billes et c’est le retour aux activités groupusculaires, ou bien c’est le statu quo, autrement dit une sorte de fédération, ou bien, c’est la fusion totale »[7]. Ordre Nouveau refuse la fusion, Le Pen refuse de remanier le bureau politique. En conséquence le congrès est incapable de trancher, c’est le statu quo : même bureau politique, mêmes responsabilités.

Le Pen arrive à raccrocher les wagons en dénonçant « la déferlante migratoire » et la responsabilité du pouvoir, mais le ver est dans le fruit. Le 25 mai, le Front national tient meeting à la Mutualité. Devant une salle clairsemée, Le Pen s’adresse à Ordre Nouveau qui est aux abonnés absents : « Faisons ensemble le serment de nous tolérer les uns les autres. Le temps est venu, de réunir toutes les forces nationales en faisceaux pour faire entendre librement la voix de la France ». Dans ses « Mémoires », il précise : « J’avais employé le mot faisceau pour les amadouer, il rappelait l’Italie de Mussolini. Peine perdue »[8].

De son côté, Ordre Nouveau se réunit en congrès les 9, 10, 11 juin. Le mouvement traverse une crise interne. Le secteur jeune craint une dissolution dans le Front national et certains discours apparaissent trop électoralistes et modérés. La base défend l’autonomie et François Brigneau la fusion dans le Front national. Un compromis est trouvé qui repose sur une double stratégie : en interne, un renforcement d’Ordre Nouveau sur « une conscience révolutionnaire, une base doctrinale inébranlable », et en externe, une réaffirmation pleine et entière au Front national.

Le mouvement d’Alain Robert garde donc son indépendance. Il lui apparait « hors de question de considérer le Front national comme le futur grand parti. Il doit rester une structure d’accueil qui privilégie le combat politique de type classique, telles les campagnes électorales ». Alain Robert précise : « Le Front national doit être la réunion de toutes les familles, des maurrassiens, des nationaux, des intégristes pour instaurer le nouvel ordre »[9].

La direction d’Ordre Nouveau, qualifiée par Le Pen de « gauchiste de droite » relance l’activisme, la violence et « la voie révolutionnaire » pour enrayer d’éventuels départs. Le congrès vote une campagne contre « l’immigration sauvage [qui] menace notre civilisation » ». Le 21 juin 1973, Ordre Nouveau tient meeting à la Mutualité sur le thème : « Halte à l’immigration sauvage ! » qui donne lieu à une forte mobilisation antifasciste et à des affrontements avec la police. Le gouvernement dissout la Ligue communiste (à l’initiative de la manifestation antifasciste) et Ordre Nouveau.

Déjà la crise du FN et première scission

S’appuyant sur la loi de 1936 concernant les groupes de combat et les milices privées, le gouvernement « estime que cette organisation (ON) entretient des relations étroites avec les partis néofascistes ou néonazis étrangers ». Après la dissolution d’Ordre Nouveau, les tensions s’accélèrent avec Le Pen. Ordre Nouveau lui reproche de faire du Front national une machine électorale à son profit et de s’opposer à augmenter le nombre de ses membres à sa direction. Tout compromis semble exclu[10]. La crise éclate.

L’ex-Ordre Nouveau crée Faire Face puis Faire Front et appelle le Front national à entrer dans les Comités Faire Front. Faire Front tire les conséquences de la dissolution d’Ordre Nouveau et de la crise du Front national :

« Il est évident que la dissolution d’ON a modifié les rapports de force. Avant cette dissolution, ON pouvait accepter de voir ses représentants être minoritaires au sein du bureau politique du FN ».

À la base, la force de ses militants compensait cette infériorité au sommet. Suite à la dissolution, les problèmes devenaient différents :

« ON n’est pas le Front, mais le FN n’était pas non plus le parti de Le Pen. Il n’avait pas été créé pour permettre à l’ancien secrétaire général du mouvement Tixier de faire des opérations électorales. En conséquence, l’équilibre entre les tendances, les militants, devait comprendre la nécessité d’élargir et Le Pen admettre qu’une autorité collégiale soit préférée à son despotisme pas toujours bien éclairé »[11].

Le Pen considère Faire Front comme un groupuscule de provocateurs. En novembre 1974, les Comités Faire Front vont donner naissance au Parti des Forces nouvelles (PFN) et Le Pen garde le contrôle du Front national. Jean-Marie Le Pen tire une double leçon de l’échec de la collaboration avec Ordre Nouveau : un parti comme le FN ne peut réussir à conquérir le pouvoir que s’il évacue de son programme les points susceptibles de heurter l’électorat de la droite modérée, et sa propagande doit être axée autour de quelques points sélectionnés. De son côté, Maurice Bardèche constate, une fois de plus les tares récurrentes de l’extrême droite :

« Depuis une vingtaine d’années, l’histoire de ces partisans d’un Ordre Nouveau est une litanie d’échecs et de désillusions, d’espoirs sans cesse déçus […]. L’extrême droite ne s’est jamais fait une place dans le jeu politique de notre pays […]. Ses divisions internes (idéologiques ou stratégiques), ses querelles de personnes, sa pénurie de leaders et des thèmes mobilisateurs font que l’extrême droite […] est politiquement fantomatique ».

Pas plus qu’Occident, Ordre Nouveau n’a pu échapper au piège de l’activisme, passé oblige, pour conserver ses militants. Échec pour construire une structure unitaire, un parti nationaliste. En raison de divergences politiques, de choix stratégiques différents et de querelle de chefs, le Front national de Le Pen n’a pas pu servir de structure d’accueil. Rapidement la situation va évoluer de la rupture aux rivalités. François Brigneau tire les raisons de cet échec :

« Le mariage se faisant mal entre le courant de la droite parlementaire de Jean-Marie le Pen, l’activisme révolutionnaire d’Alain Robert et de Pascal Gauchon. Ce fut la scission ».

Jean-Marie Le Pen résume d’une formule « l’enfance du Front national […] Il est le fruit d’un rassemblement et d’une scission »[12].

Le Front national va entreprendre une longue traversée du désert : hémorragie de militants, caisses vides. Il va tenter de remplir les places laissées vacantes. L’espace va être occupé par François Duprat et ses groupes nationalistes révolutionnaires (GNR). Les seules actions publiques du Front National sont les élections et ainsi la possibilité d’accéder aux médias. Sous la direction de Le Pen, le Front national va poursuivre sa tentative de constituer la force de l’« opposition nationale » en organisant sa propagande autour de quelques thèmes porteurs, notamment l’immigration et l’insécurité. Le mouvement reprend à son compte la devise des parachutistes : « Être et Durer ». Si le parti des Forces nouvelles veut apparaitre comme l’extrême droite relookée, Le Pen, lui, entend lui donner une respectabilité et une crédibilité.

Notes

[1] Textes du deuxième congrès d’Ordre Nouveau, juin 1972, p 73 et p. 143, Ordre Nouveau, n° 1 et 8. Le premier congrès s’est tenu à l’hôtel Lutétia, le 14 mai 1970.

[2] Le Monde, 15 mai 1970.

[3] ON-Hebdo, n° 5.

[4] Jean-Marie Le Pen, Mémoires, tome 2, « Jean-Marie Le Pen, Tribun du Peuple », éditions Muller, 2019, p 24.

[5] Jean-Marie Le Pen, tribune libre, Le Monde, 27 février 1972.

[6] Le Monde, 7 novembre 1972.

[7] Bulletin Militant, n°4, mai 1973. Jean-Marie le Pen, Mémoires, tome 2, p 34-35.

[8] Op cité, p 35.

[9] Le Monde, 31 mai 1973, Pour un Ordre Nouveau, n° 20, juin 1973.

[10] Alain Robert exige 2/3 des sièges au Bureau politique et le contrôle des postes clefs de l’appareil. Il va se retrouver marginalisé par Le Pen et son équipe.

[11] Faire Front, n°3, décembre 1973. Le n° 2, en novembre, titrait : « Pas de nouveau Tixier à droite ».

[12] Jean-Marie Le Pen, op cité, p 18.

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