(Re)contextualiser la Palestine : Israël, les pays du Golfe et la puissance US au Moyen-Orient
Adam Hanieh analyse la façon dont le capitalisme fossile a configuré les rapports de force et les relations entre États au Moyen orient, sous la férule des États-Unis. Il peut alors situer le colonialisme israélien en Palestine dans une perspective régionale plus large, explicitant les stratégies états-uniennes vis-à-vis d’Israël et des pays du Golfe.
Adam Hanieh est professeur d’économie politique et de développement international à l’Institut d’études arabes et islamiques de l’université d’Exeter. Ses travaux portent sur le rôle des États du Golfe dans le capitalisme mondial, ainsi que sur la manière dont l’accumulation de capital dans le Golfe influe sur les questions plus générales de développement au Moyen-Orient.
Cet article a été d’abord publié en anglais sur le site du Transnational Institute.
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Au cours des sept derniers mois, la guerre génocidaire menée par Israël à Gaza a suscité une vague sans précédent de protestations et de sensibilisation à la cause palestinienne. Des millions de personnes sont descendues dans la rue, des campements ont surgi sur les campus des universités du monde entier, des militant·e∙s ont bloqué des ports et des usines d’armement, et la nécessité d’une campagne mondiale de boycott, de désinvestissement et de sanctions à l’encontre d’Israël semble faire plus que jamais consensus. La plainte déposée par l’Afrique du Sud contre Israël à la Cour internationale de justice (CIJ) a renforcé l’ardeur de ces mouvements populaires. Cette affaire a non seulement mis en lumière non seulement la réalité du génocide perpétré par Israël, mais aussi le soutien indéfectible des principaux États occidentaux à l’État hébreu, malgré ses agissements dans la bande de Gaza et au-delà.
Néanmoins, malgré cette vague mondiale de solidarité avec la Palestine, certaines idées fausses ont la peau dure dans les débats et les analyses au sujet de la Palestine. Trop souvent, la dimension politique de la question palestinienne n’est considérée qu’à travers le prisme d’Israël, de la Cisjordanie et de Gaza, en omettant la dynamique régionale plus large du Moyen-Orient et le contexte international dans lequel se déploie le colonialisme israélien. D’autre part, la solidarité avec la Palestine est souvent réduite à la contestation des graves violations de droits humains commises par Israël, ainsi que ses violations incessantes du droit international, à savoir les meurtres, les arrestations et la dépossession que les Palestinien·nes subissent depuis près de huit décennies. Cette conception des droits humains est problématique en ce qu’elle dépolitise la lutte des Palestinien·nes, et n’explique pas pourquoi les États occidentaux continuent d’offrir leur soutien inconditionnel à Israël. Et, lorsque la question centrale du soutien occidental est soulevée, beaucoup en attribuent la cause à un « lobby pro-israélien » opérant en Amérique du Nord et en Europe occidentale. Cette perception est erronée et politiquement dangereuse, car elle occulte profondément la relation entre les États occidentaux et Israël.
L’objectif de cet article est de proposer une approche alternative pour comprendre les enjeux autour de la question palestinienne, une approche replacée dans son contexte régional, prenant en compte le rôle central du Moyen-Orient dans un monde dominé par les combustibles fossiles. L’argument principal ici est que l’on ne peut comprendre le soutien indéfectible des États-Unis et des principaux États européens à Israël sans considérer ce contexte. En tant que colonie de peuplement, Israël a joué un rôle de premier plan dans le maintien des intérêts impérialistes occidentaux, notamment des États-Unis, au Moyen-Orient. L’État hébreu a endossé ce rôle aux côtés des monarchies arabes du Golfe riches en pétrole, lesquelles constituent l’autre pilier majeur des intérêts américains dans la région, avec l’Arabie saoudite à leur tête. L’évolution rapide des relations entre les pays du Golfe, Israël et les États-Unis est essentielle pour comprendre la situation actuelle, en particulier du fait de l’affaiblissement relatif des États-Unis en tant que puissance mondiale.
Les mutations de l’après-guerre et le Moyen-Orient[1]
Deux transformations majeures ont façonné l’évolution de l’ordre mondial dans les années qui ont immédiatement suivi la Seconde Guerre mondiale. La première a été une révolution du système énergétique mondial, avec l’émergence du pétrole en tant que principal combustible fossile, remplaçant le charbon et d’autres sources d’énergie pour les grandes puissances industrialisées. Cette transition vers les combustibles fossiles s’est d’abord produite aux États-Unis, où la consommation de pétrole a dépassé celle du charbon en 1950, puis en Europe occidentale et au Japon dans les années 1960. Dans les pays riches représentés au sein de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le pétrole représentait moins de 28 % de la consommation totale de combustibles fossiles en 1950 ; à la fin des années 1960, sa part dépassait les 50%. Grâce à sa plus grande densité énergétique, sa plasticité et sa facilité de transport, le pétrole a alimenté le capitalisme florissant de l’après-guerre, soutenant le développement de toute une série de nouvelles technologies, industries et infrastructures. Ce fut le début de ce que les scientifiques décriront plus tard comme la « grande accélération », à savoir l’expansion considérable et continue de la consommation de combustibles fossiles débutée au milieu du 20ᵉ siècle, et qui a irrémédiablement mené à la situation d’urgence climatique que l’on connaît aujourd’hui.
Cette transition globale vers le pétrole est étroitement liée à une deuxième transformation majeure de l’après-guerre, à savoir l’avènement des États-Unis comme première puissance économique et politique mondiale. L’ascension économique des États-Unis a commencé dans les premières décennies du 20ᵉ siècle, mais c’est la Seconde Guerre mondiale qui a permis leur émergence en tant que première puissance incontestable du capitalisme mondial, à laquelle ne s’opposaient alors que l’Union soviétique et son bloc allié. La puissance américaine est née de la destruction de l’Europe occidentale pendant la guerre et de l’affaiblissement de la domination coloniale européenne sur une grande partie de ce que l’on a appelé le tiers-monde. Tandis que la Grande-Bretagne et la France se fragilisaient, les États-Unis ont joué un rôle de premier plan dans l’architecture politique et économique de l’après-guerre, notamment au moyen d’un nouveau système financier mondial centré sur le dollar américain. Au milieu des années 1950, les États-Unis détenaient 60 % de la production manufacturière mondiale et un peu plus d’un quart du PIB mondial, et 42 des 50 premières entreprises industrielles du monde étaient américaines.
Ces deux tournants mondiaux majeurs, la transition vers le pétrole et l’affirmation de la toute puissance américaine, ont eu de profondes répercussions au Moyen-Orient. D’une part, la région a joué un rôle décisif dans la transition mondiale vers le pétrole. Elle disposait en effet de ressources pétrolières abondantes, représentant près de 40 % des réserves mondiales avérées au milieu des années 1950. En outre, le pétrole du Moyen-Orient était situé à proximité de nombreux pays européens, et les coûts de production y étaient bien plus bas que partout ailleurs dans le monde. Des quantités apparemment illimitées de pétrole pouvaient ainsi être vendues à l’Europe à des prix inférieurs à ceux du charbon, tout en garantissant que les marchés pétroliers américains restent à l’abri des effets de l’augmentation de la demande européenne. Le recentrage de l’approvisionnement pétrolier de l’Europe sur le Moyen-Orient a été extrêmement rapide : entre 1947 et 1960, la part du pétrole européen provenant de cette région a doublé, passant de 43 % à 85 %. Cela a permis non seulement l’émergence de nouvelles industries, comme la pétrochimie, mais aussi le développement de nouvelles techniques de transport, et de guerre. Ainsi, sans le Moyen-Orient, la transition pétrolière en Europe occidentale n’aurait peut-être jamais eu lieu.
La majorité des réserves pétrolières du Moyen-Orient se trouve dans la région du Golfe, principalement en Arabie saoudite et dans les petits États arabes du Golfe, ainsi qu’en Iran et en Irak. Pendant la première moitié du 20ᵉ siècle, ces pays ont été gouvernés par des monarchies autocratiques soutenues par l’Empire britannique (à l’exception de l’Arabie saoudite, qui restait théoriquement non soumise au colonialisme anglais). La production de pétrole dans la région était contrôlée par une poignée de grandes compagnies pétrolières occidentales, qui payaient des loyers et des redevances aux dirigeants de ces États pour pouvoir y extraire le pétrole. Ces sociétés pétrolières étaient intégrées verticalement, ce qui signifie qu’elles contrôlaient non seulement l’extraction du pétrole brut, mais aussi le raffinage, le transport et la vente du pétrole dans le monde entier. Le pouvoir de ces entreprises était immense, le contrôle des infrastructures de circulation du pétrole leur permettant d’en exclure tout concurrent potentiel. La concentration de la propriété dans l’industrie pétrolière dépassait de loin celle observée dans toute autre industrie ; en effet, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, plus de 80 % de toutes les réserves pétrolières mondiales en dehors des États-Unis et de l’URSS étaient contrôlées par seulement sept grandes entreprises américaines et européennes, baptisées les « Sept Sœurs ».
Israël et les révoltes anticoloniales
Malgré leur immense pouvoir, ces compagnies pétrolières ont été confrontées à un défi de taille lorsqu’au cours des années 1950 et 1960, le Moyen-Orient est devenu le centre des marchés pétroliers mondiaux. Comme ailleurs dans le monde, une série de puissants mouvements nationalistes, communistes et autres mouvements de gauche ont commencé à contester les dirigeants soutenus par les colonialismes britannique et français, menaçant de bouleverser l’ordre régional soigneusement établi. C’est en Égypte que ce phénomène s’est manifesté avec le plus d’ardeur, lorsque le roi Farouk, monarque soutenu par les Britanniques, a été renversé en 1952 par un coup d’État militaire mené par un officier apprécié de la population, Gamal Abdel Nasser. L’arrivée au pouvoir de Nasser a entraîné le retrait des troupes britanniques d’Égypte et permis au Soudan d’obtenir son indépendance en 1956. La souveraineté nouvellement acquise de l’Égypte s’est vue couronnée cette même année par la nationalisation du canal de Suez, jusqu’alors contrôlé par les Britanniques et les Français. Célébrée par des millions de personnes dans tout le Moyen-Orient, cette mesure a provoqué l’invasion ratée de l’Égypte par les Britanniques, les Français et les Israéliens. Tandis que Nasser s’engageait dans la voie de la nationalisation, les luttes anticoloniales ont pris de l’ampleur ailleurs dans la région, notamment en Algérie, où une guérilla pour l’indépendance a débuté en 1954 contre l’occupation française.
Bien qu’on l’ignore encore souvent de nos jours, ces menaces contre une domination coloniale de longue date ont eu des répercussions dans les pétromonarchies du Golfe. En Arabie saoudite et dans les petits États du Golfe, le soutien à Nasser était significatif et divers mouvements de gauche ont protesté contre la vénalité, la corruption et la position pro-occidentale des monarchies au pouvoir. Les conséquences potentielles de ces contestations se sont matérialisées non loin de là, en Iran, où un leader national populaire, Mohammed Mossadegh, est arrivé au pouvoir en 1951. L’une des premières mesures mises en place par Mossadegh a été de prendre le contrôle de l’Anglo-Iranian Oil Company (prédécesseur de l’actuelle BP), compagnie pétrolière contrôlée jusqu’alors par les Britanniques. Ce qui constituait le premier cas de nationalisation du pétrole au Moyen-Orient a eu une forte résonance dans les États arabes voisins, où le slogan « Le pétrole arabe pour les Arabes » a gagné en popularité dans un climat général anticolonialiste.
En réponse à la nationalisation du pétrole iranien, les services secrets américains et britanniques ont orchestré un coup d’État contre Mossadegh en 1953, portant au pouvoir un gouvernement pro-occidental fidèle au monarque iranien, Mohammad Reza Shah Pahlavi. Ce coup d’État a été le point de départ d’une vague contre-révolutionnaire dirigée contre tous les mouvements radicaux et nationalistes de la région. Le renversement de Mossadegh a également mis en évidence un changement majeur dans l’ordre régional : si la Grande-Bretagne a joué un rôle important dans le coup d’État, ce sont les États-Unis qui ont pris la tête de la planification et de l’exécution de l’opération. C’était la première fois que le gouvernement américain déposait un dirigeant étranger en temps de paix, et l’implication de la CIA dans le coup d’État a été déterminante pour les interventions américaines ultérieures, telles que le coup d’État de 1954 au Guatemala et le renversement du président chilien Salvador Allende en 1973.
C’est dans ce contexte qu’Israël est devenu un rempart majeur pour la sauvegarde des intérêts américains au Moyen-Orient. Au tout début du 20ᵉ siècle, la Grande-Bretagne avait été le principal soutien de la colonisation sioniste de la Palestine et, après la création d’Israël en 1948, les Britanniques ont continué à soutenir le projet sioniste de construction d’un État juif. Mais lorsque les États-Unis ont supplanté la domination coloniale britannique et française au Moyen-Orient pendant l’après-guerre, le soutien américain à Israël est apparu comme la clé de voûte d’un nouvel ordre sécuritaire régional. La guerre de 1967 entre Israël et les principaux États arabes a constitué un tournant majeur, après que l’armée israélienne a détruit les forces aériennes égyptiennes et syriennes et lancé l’occupation de la Cisjordanie, de la bande de Gaza, de la péninsule du Sinaï en Égypte et du plateau du Golan en Syrie. La victoire d’Israël a brisé les mouvements panarabes, d’indépendance et de résistance anticoloniale qui s’étaient cristallisés le plus fortement dans l’Égypte de Nasser. Cette victoire a également encouragé les États-Unis à supplanter la Grande-Bretagne en tant que principal mécène du pays. À partir de ce moment, les États-Unis ont commencé à fournir chaque année à Israël du matériel militaire et un soutien financier d’une valeur de plusieurs milliards de dollars.
Le colonialisme de peuplement, un facteur décisif
La guerre de 1967 a démontré qu’Israël était une entité suffisamment puissante pour être utilisée contre toute menace pesant sur les intérêts américains dans la région. Mais il faut souligner ici un élément crucial qui passe souvent inaperçu, à savoir que la place particulière qu’occupe Israël dans le soutien à la puissance américaine est directement liée à son caractère intrinsèque de colonie de peuplement, fondée sur la dépossession croissante de la population palestinienne. Les colonies de peuplement doivent continuellement s’efforcer de renforcer leurs structures d’oppression raciale, d’exploitation de classe et de dépossession. En conséquence, il s’agit généralement de sociétés hautement militarisées et violentes, qui ont tendance à dépendre d’un soutien extérieur leur permettant de maintenir leurs privilèges matériels dans un environnement régional hostile. Dans ce type de société, une proportion importante de la population profite de l’oppression de la population autochtone et considère ses privilèges dans une perspective raciale et militariste. C’est pourquoi les colonies de peuplement sont des partenaires beaucoup plus sûrs pour les intérêts impérialistes occidentaux que les États clients « normaux ».[2] C’est aussi la raison pour laquelle le colonialisme britannique a soutenu le sionisme en tant que mouvement politique au début du 20ᵉ siècle, et que les États-Unis ont embrassé Israël après 1967.
Bien sûr, cela ne signifie pas que les États-Unis « contrôlent » Israël, ou qu’il n’y ait jamais de divergences d’opinion entre les gouvernements américain et israélien sur la manière dont cette relation doit se maintenir. Mais la capacité d’Israël à imposer un état permanent de guerre, d’occupation et d’oppression serait profondément mise en péril sans le soutien continu des États-Unis, tant sur le plan matériel que politique. En retour, Israël est un partenaire fidèle et un bouclier contre les menaces qui pèsent sur les intérêts américains dans la région. Le pays est également intervenu à l’échelle mondiale en apportant son soutien à des régimes répressifs appuyés par les États-Unis, de l’Afrique du Sud au temps de l’apartheid aux dictatures militaires d’Amérique latine. Alexander Haig, secrétaire d’État américain sous Richard Nixon, a affirmé sans détour qu’ « Israël est le plus grand porte-avions américain au monde qui ne peut être coulé, qui ne transporte pas un seul soldat américain et qui est situé dans une région hautement stratégique pour la sécurité nationale américaine. »[3]
Le lien entre les caractéristiques intrinsèques de l’État israélien et la place particulière qu’il occupe dans la stratégie américaine s’apparente au rôle que l’apartheid sud-africain a joué pour soutenir les intérêts occidentaux sur l’ensemble du continent africain. Il existe des différences importantes entre l’apartheid sud-africain et l’apartheid israélien – notamment la part prépondérante des populations noires d’Afrique du Sud dans la classe ouvrière du pays, contrairement aux Palestinien·nes en Israël – mais en tant que colonies de peuplement, les deux États sont devenus largement structurants pour le pouvoir occidental dans leurs voisinages respectifs. Si nous examinons l’histoire du soutien occidental à l’apartheid sud-africain, nous constatons que ses justifications relevaient du même ordre que celles que nous entendons aujourd’hui à propos d’Israël, et nous observons les mêmes tentatives pour bloquer les sanctions internationales et criminaliser les mouvements de protestation. Ces parallèles se retrouvent dans le rôle joué par certains individus. Un exemple peu connu est le voyage qu’un jeune membre du parti conservateur britannique a effectué en Afrique du Sud en 1989, au cours duquel il a plaidé contre les sanctions internationales à l’encontre de l’Afrique du Sud et expliqué pourquoi la Grande-Bretagne devait continuer à soutenir le régime d’apartheid. Des décennies plus tard, ce jeune conservateur, David Cameron, occupe aujourd’hui le poste de ministre britannique des affaires étrangères et est l’un des premiers dirigeants du monde à encourager le génocide israélien à Gaza.
Le rôle central que détient le Moyen-Orient dans l’économie mondiale du pétrole confère à Israël une place plus importante dans le pouvoir impérialiste occidental que celle qu’occupait l’Afrique du Sud de l’apartheid. Mais les deux cas démontrent pourquoi il est si important de réfléchir à la manière dont les facteurs régionaux et mondiaux se conjuguent aux dynamiques internes de classe et de race qui caractérisent les colonies de peuplement.
L’intégration économique d’Israël au Moyen-Orient
Le Moyen-Orient est devenu d’autant plus important pour le pouvoir américain après la nationalisation des réserves de pétrole brut un peu partout dans la région – et ailleurs – au cours des années 1970 et 1980. La nationalisation a mis fin au contrôle occidental historique direct sur les approvisionnements en pétrole brut au Moyen-Orient, bien que les entreprises américaines et européennes aient continué à contrôler la majeure partie du raffinage, du transport et de la vente de ce pétrole à l’échelle mondiale. Dans ce contexte, les intérêts américains dans la région consistaient à garantir un approvisionnement stable du marché mondial en pétrole – libellé en dollars américains – et à s’assurer que le pétrole ne serait pas utilisé comme une « arme » pour déstabiliser un système mondial centré sur les États-Unis. En outre, les producteurs de pétrole du Golfe ayant commencé à gagner des billions de dollars grâce à l’exportation de pétrole brut, les États-Unis étaient très préoccupés par la manière dont ces « pétrodollars » circulaient dans le système financier mondial, avec une incidence directe sur la prédominance du dollar américain.
Dans la poursuite de ses intérêts, la stratégie américaine s’est entièrement consacrée à maintenir en place les monarchies du Golfe, dirigées par l’Arabie saoudite, car elles s’avéraient être des alliées régionales indispensables, particulièrement après le renversement de la monarchie iranienne des Pahlavi en 1979, qui constituait un autre pilier des intérêts américains dans le Golfe depuis le coup d’État de 1953. Le soutien des États-Unis aux monarques du Golfe s’est manifesté de diverses manières, notamment par la vente d’énormes quantités de matériel militaire, qui a fait de la région du Golfe le plus grand marché d’armes au monde, ainsi que par des mesures économiques qui ont canalisé l’afflux des pétrodollars du Golfe vers les marchés financiers américains, et par une présence militaire américaine permanente, laquelle continue d’être le meilleur garant du pouvoir monarchique. La guerre Iran-Irak, qui a duré de 1980 à 1988 et qui est considérée comme l’un des conflits les plus destructeurs du 20ᵉ siècle (près d’un demi-million de morts), a marqué un tournant dans les relations entre les États-Unis et les pays du Golfe. Pendant cette guerre, les États-Unis ont fourni des armes, des fonds et des renseignements aux deux parties, considérant qu’il s’agissait d’un moyen d’affaiblir la puissance de ces deux grands pays voisins et d’assurer la sécurité des monarques du Golfe.
C’est ainsi que la puissance américaine au Moyen-Orient a fini par reposer sur deux piliers essentiels : Israël d’une part, les monarchies du Golfe de l’autre. Ces deux piliers restent aujourd’hui la clé de voûte de la puissance américaine dans la région ; toutefois, la manière dont ils sont liés l’un à l’autre a sensiblement évolué. Depuis les années 1990 et jusqu’à aujourd’hui, le gouvernement américain a cherché à réunir ces deux pôles stratégiques – ainsi que d’autres États arabes importants, tels que la Jordanie et l’Égypte – au sein d’une sphère unique liée à la puissance économique et politique des États-Unis. Pour y parvenir, il fallait intégrer Israël au Moyen-Orient élargi en normalisant ses relations économiques, politiques et diplomatiques avec les États arabes. Plus important encore, il s’agissait d’en finir avec les boycotts arabes officiels d’Israël qui ont perduré pendant des décennies.
Du point de vue d’Israël, la normalisation ne consistait pas simplement à permettre le développement du commerce avec les États arabes et les investissements dans les économies de ces derniers. Après une récession majeure au milieu des années 1980, l’économie israélienne s’est détournée de secteurs tels que la construction et l’agriculture pour mettre davantage l’accent sur la haute technologie, la finance et les exportations militaires. Toutefois, de nombreuses grandes entreprises internationales hésitaient à faire des affaires avec des entreprises israéliennes (ou en Israël même) en raison des « boycotts secondaires » imposés par les gouvernements arabes.[4] Mettre fin à ces boycotts était essentiel pour attirer les grandes entreprises occidentales en Israël, et pour permettre aux sociétés israéliennes d’accéder aux marchés étrangers aux États-Unis et ailleurs. En d’autres termes, la normalisation économique visait tout autant à garantir la place du capitalisme israélien dans l’économie mondiale qu’à permettre à Israël d’accéder aux marchés du Moyen-Orient.
À cette fin, les États-Unis et leurs alliés européens ont eu recours, à partir des années 1990, à divers mécanismes visant à favoriser l’intégration économique d’Israël dans le Moyen-Orient élargi. L’un de ces mécanismes a été l’intensification des réformes économiques, à savoir une ouverture aux investissements étrangers et aux flux commerciaux qui se sont rapidement déployés dans la région. Dans ce contexte, les États-Unis ont proposé une série de mesures économiques visant à connecter les marchés israéliens et arabes les uns aux autres, puis à l’économie américaine. L’un des principaux projets concernait les « Qualifying Industrial Zones » (QIZ), des zones franches de production à bas salaires créées en Jordanie et en Égypte à la fin des années 1990. Les marchandises produites dans les QIZ (principalement des textiles et des vêtements) bénéficiaient d’un accès en franchise de droits aux États-Unis, à condition qu’une certaine proportion des intrants pour leur fabrication provienne d’Israël. Les QIZ ont joué un rôle précoce et décisif en rassemblant des capitaux israéliens, jordaniens et égyptiens dans des structures de propriété conjointe, normalisant ainsi les relations économiques entre deux des États arabes voisins d’Israël. En 2007, le gouvernement américain signalait que plus de 70 % des exportations jordaniennes vers les États-Unis provenaient des QIZ ; pour l’Égypte, 30 % des exportations vers les États-Unis étaient produites dans les QIZ en 2008.[5]
Conjointement au programme des QIZ, les États-Unis ont également proposé le projet de zone de libre-échange du Moyen-Orient (Middle East Free Trade Area – MEFTA) en 2003. La MEFTA visait à établir une zone de libre-échange couvrant l’ensemble de la région d’ici 2013. La stratégie américaine consistait à négocier individuellement avec des pays « amis » en suivant un processus graduel en six étapes, qui devait aboutir à un véritable accord de libre-échange (ALE) entre les États-Unis et le pays en question. Ces accords ont été conçus de manière à ce que les pays puissent associer leurs propres accords bilatéraux de libre-échange avec les États-Unis aux accords bilatéraux signés avec d’autres pays, établissant ainsi des accords au niveau sous-régional dans l’ensemble du Moyen-Orient. Ces accords sous-régionaux pourraient être rattachés au fil du temps, jusqu’à ce qu’ils couvrent l’ensemble de la région. Il est important de noter que ces accords de libre-échange seraient également utilisés pour encourager l’intégration d’Israël dans les marchés arabes, chaque accord contenant une clause engageant le signataire à normaliser ses relations avec Israël et interdisant tout boycott des relations commerciales. Bien que les États-Unis n’aient pas atteint l’objectif qu’ils s’étaient fixé en 2013 pour la mise en place du MEFTA, cette politique a permis d’étendre l’influence économique américaine dans la région, grâce à la normalisation entre Israël et les principaux États arabes. Il est frappant de constater qu’aujourd’hui, les États-Unis ont conclu 14 accords de libre-échange avec des pays du monde entier, dont cinq avec des États du Moyen-Orient (Israël, Bahreïn, Maroc, Jordanie et Oman).
Les accords d’Oslo
Toutefois, le succès de la normalisation économique allait dépendre avant tout d’un changement de conjoncture politique qui donnerait le « feu vert » de la Palestine à l’intégration économique d’Israël dans l’ensemble de la région. À cet égard, les accords d’Oslo, signés entre Israël et l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) sous les auspices du gouvernement américain sur la pelouse de la Maison Blanche en 1993 ont constitué un tournant décisif. Ces accords se sont fortement appuyés sur les pratiques coloniales établies au cours des décennies précédentes. Depuis les années 1970, Israël avait tenté de trouver une force palestinienne capable d’administrer la Cisjordanie et la bande de Gaza en son nom, c’est-à-dire un mandataire palestinien de l’occupation israélienne qui pourrait minimiser les contacts quotidiens entre la population palestinienne et l’armée israélienne. Les premières tentatives avaient échoué lors de la première Intifada, un soulèvement populaire de grande ampleur déclenché dans la bande de Gaza en 1987. Les accords d’Oslo ont mis fin à cette première Intifada.
Dans le cadre de ces accords, l’OLP a accepté de constituer une nouvelle entité politique, appelée Autorité palestinienne (AP), qui se verrait accorder des pouvoirs limités sur des zones fragmentées de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. L’AP dépendrait entièrement des financements extérieurs pour sa survie, en particulier des prêts, de l’aide et des taxes à l’importation perçues par Israël et qui seraient ensuite reversées à l’AP. Puisque la plupart de ses sources de financement provenaient en fin de compte des États occidentaux et d’Israël, l’Autorité palestinienne s’est rapidement trouvée subordonnée sur le plan politique. En outre, Israël a conservé un contrôle total sur l’économie et les ressources palestiniennes, ainsi que sur la circulation des personnes et des biens. Après la division territoriale de Gaza et de la Cisjordanie en 2007, l’AP a établi son siège à Ramallah, en Cisjordanie. Elle est dirigée aujourd’hui par Mahmoud Abbas.[6]
Malgré la façon dont les accords d’Oslo et les négociations qui ont suivi sont généralement dépeints, il n’a jamais été question de paix ni d’un quelconque processus de libération de la Palestine. C’est au lendemain de ces accords que l’expansion des colonies israéliennes a explosé en Cisjordanie, que le mur de l’apartheid a été construit, et qu’ont été instaurées les inextricables restrictions de mouvement qui régissent depuis lors la vie des Palestinien·nes. Les accords d’Oslo ont permis d’exclure des composantes essentielles de la population palestinienne – les réfugié·es et les citoyen·nes palestinien·nes d’Israël – de la lutte politique, réduisant la question de la Palestine à des négociations autour de portions de territoire en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Plus important encore, les accords ont apporté la bénédiction palestinienne à l’intégration d’Israël dans le Moyen-Orient élargi, ouvrant la voie aux gouvernements arabes, menés par la Jordanie et l’Égypte, vers une normalisation avec Israël sous l’égide des États-Unis.
C’est après ces accords que sont apparues les restrictions de circulation, les barrières, les checkpoints et les zones militaires qui cernent aujourd’hui Gaza. En ce sens, la prison à ciel ouvert qu’est devenue la bande de Gaza est elle-même une création du processus d’Oslo ; un lien direct relie les négociations d’Oslo au génocide actuel. Ce point est fondamental aux discussions en cours sur les scénarios possibles de l’après-guerre. La stratégie israélienne a toujours consisté à recourir périodiquement à une violence extrême, assortie de fausses promesses de négociations soutenues par la communauté internationale. Ces deux outils servent la même stratégie qui consiste à intensifier la fragmentation territoriale et la dépossession continues du peuple palestinien. Toute négociation d’après-guerre dirigée par les États-Unis verra certainement des tentatives similaires d’assurer la domination pérenne d’Israël sur les vies et les terres palestiniennes.
Penser l’avenir
Le rôle stratégique que joue le Moyen-Orient, riche en pétrole, pour la puissance mondiale américaine explique pourquoi Israël est aujourd’hui le plus grand bénéficiaire cumulé de l’aide étrangère américaine dans le monde, bien que le pays se classe au 13ᵉ rang des économies les plus riches du monde en termes de PIB par habitant·e (plus que le Royaume-Uni, l’Allemagne ou le Japon). Cela explique également le soutien sans faille apporté à Israël par les élites politiques américaines (et britanniques). En 2021, sous la présidence Trump et avant la guerre actuelle, Israël a reçu plus de financement militaire de la part des États-Unis que tous les autres pays du monde réunis. Ce facteur est primordial car, comme les huit derniers mois l’ont démontré, le soutien américain va bien au-delà du soutien financier et matériel, puisque les États-Unis endossent le rôle d’ultime défenseur politique d’Israël sur la scène internationale.[7]
Comme nous l’avons vu, cette alliance américaine avec Israël n’est pas sans rapport avec la dépossession du peuple palestinien ; elle s’ancre même dans cette dépossession. C’est la nature coloniale de l’État d’Israël qui explique son rôle prépondérant dans le renforcement de la puissance américaine dans la région. On comprend ainsi pourquoi la lutte des Palestiniens est un élément essentiel des mutations politiques au Moyen-Orient, la région aujourd’hui la plus polarisée socialement, la plus inégale économiquement et la plus touchée par les conflits dans le monde. Inversement, cela explique aussi pourquoi la lutte pour la libération de la Palestine est intimement liée aux succès (et aux échecs) d’autres luttes sociales progressistes dans la région.
L’axe central de cette dynamique interrégionale reste le lien entre Israël et les États du Golfe. Au cours des deux décennies qui ont suivi les accords d’Oslo, la stratégie américaine au Moyen-Orient a continué à favoriser l’intégration économique et politique d’Israël avec les États du Golfe. Dans le cadre des accords d’Abraham en 2020, les Émirats arabes unis (EAU) et Bahreïn ont accepté de normaliser leurs relations avec Israël, ce qui a constitué une avancée majeure dans ce processus.
Ces accords ont ouvert la voie à un accord de libre-échange entre les Émirats arabes unis et Israël. Signé en 2022, il a été le premier accord de libre-échange liant Israël à un État arabe. La valeur des échanges commerciaux entre Israël et les Émirats arabes unis a dépassé les 2,5 milliards de dollars en 2022, alors qu’elle n’était que de 150 millions de dollars en 2020. Le Soudan et le Maroc ont également conclu des accords similaires avec Israël, répondant ainsi à de fortes incitations de la part des États-Unis.[8]
Après les accords d’Abraham, cinq États arabes entretiennent désormais des relations diplomatiques officielles avec Israël. Ces pays représentent environ 40 % de la population du monde arabe et comptent parmi les principales puissances politiques et économiques de la région. Mais une question reste déterminante : quand l’Arabie saoudite rejoindra-t-elle ce club ? S’il est impossible que les Émirats arabes unis et Bahreïn aient pu accepter les accords d’Abraham sans le consentement de l’Arabie saoudite, le Royaume saoudien n’a jusqu’à présent pas officiellement normalisé ses liens avec Israël, malgré la multitude de réunions et de relations informelles qui se sont tenues entre les deux États ces dernières années.
Dans le contexte actuel du génocide en cours, un accord de normalisation entre l’Arabie saoudite et Israël constitue sans aucun doute l’objectif principal de la stratégie américaine pour l’après-guerre. Il est très probable que le gouvernement saoudien accepterait un tel accord, ce qui a potentiellement déjà été confirmé à l’administration Biden, à condition qu’il obtienne une sorte de feu vert de la part de l’Autorité palestinienne à Ramallah. Cette approbation pourrait possiblement être obtenue dans le cas d’une reconnaissance internationale d’un pseudo-État palestinien dans certaines parties de la Cisjordanie. Ce scénario se heurte évidemment à des obstacles de taille, notamment le refus persistant des Palestinien·nes de Gaza de se soumettre, et la question des modalités d’administration du territoire de Gaza après la guerre. Mais le projet américain de créer une puissance arabe conjointe multi-États pour assurer le contrôle de la bande de Gaza, dirigée par certains des principaux États normalisateurs comme les Émirats arabes unis, l’Égypte et le Maroc, dépendrait probablement d’une normalisation israélo-saoudienne.
Le rapprochement entre les États du Golfe et Israël s’avère de plus en plus crucial pour les intérêts américains dans la région, en raison des fortes rivalités et des tensions géopolitiques qui émergent à l’échelle mondiale, en particulier avec la Chine. Bien qu’aucune autre « grande puissance » ne soit prête à remplacer la domination américaine au Moyen-Orient, l’influence politique, économique et militaire des États-Unis dans la région a connu un déclin relatif au cours des dernières années. Preuve en sont les interdépendances croissantes entre les États du Golfe d’une part et la Chine et l’Asie de l’Est de l’autre, interdépendances qui vont désormais bien au-delà de l’exportation du pétrole brut du Moyen-Orient. Dans ce contexte et compte tenu de la place qu’occupe depuis longtemps Israël dans le maintien de la puissance américaine dans la région, tout processus de normalisation piloté par les États-Unis contribuerait à réaffirmer le pouvoir américain au Moyen-Orient et pourrait contrer l’influence de la Chine dans la région.
Néanmoins, malgré les débats actuels sur les scénarios d’après-guerre, les 76 dernières années ont démontré à maintes reprises que les tentatives visant à éradiquer la détermination et la résistance des Palestinien·nes continueront d’échouer. La Palestine se trouve aujourd’hui sur le front d’un réveil politique mondial qui dépasse tout ce qui a pu être observé depuis les années 1960. Dans ce contexte de prise de conscience globale de la condition palestinienne, notre analyse doit aller au-delà de l’opposition formelle aux violences perpétrées par Israël dans la bande de Gaza. La lutte pour la libération de la Palestine est au cœur de toute tentative sérieuse de contestation des intérêts impérialistes au Moyen-Orient, et ces mouvements de résistance nécessitent un meilleur ancrage dans une dynamique régionale plus large, en particulier vis-à-vis du rôle central joué par les monarchies du Golfe. Nous devons également mieux comprendre comment le Moyen-Orient s’inscrit dans l’histoire du capitalisme fossile, et dans les luttes contemporaines pour la justice climatique. La question de la Palestine est indissociable de ces réalités. En ce sens, l’extraordinaire combat pour la survie que mène aujourd’hui la population palestinienne dans la bande de Gaza représente l’avant-garde de la lutte pour l’avenir de la planète.
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Traduit de l’anglais par Johanne Fontaine. Révisé par Nellie Epinat.
Notes
[1] Pour plus de précisions sur les enjeux soulevés dans cette partie, voir le prochain livre de l’auteur, Crude Capitalism : Oil, Corporate Power, and the Making of the World Market, à paraître aux éditions Verso Books en septembre 2024.
[2] Les régimes arabes clients des États-Unis, tels que l’Égypte, la Jordanie et désormais le Maroc, doivent faire face à la persistance des mouvements politiques de contestation à l’intérieur de leurs propres frontières, et sont toujours obligés de s’adapter et de répondre aux pressions exercées par certains segments de leurs populations.
[3] Fait révélateur, la source de cette citation figure dans un article écrit en 2011 par l’ancien ambassadeur d’Israël aux États-Unis, Michael Oren, intitulé « The Ultimate Ally » (L’allié suprême).
[4] Les « boycotts secondaires » signifiaient qu’une entreprise installée en Israël, comme Microsoft par exemple, prenait le risque d’être exclue des marchés arabes.
[5] Pour une analyse plus approfondie des QIZ, du MEFTA et de l’économie politique autour de la normalisation d’Israël, voir Adam Hanieh, Lineages of Revolt : Issues of Contemporary Capitalism in the Middle East, Haymarket Books, 2013. Voir surtout pp. 36-38 [En anglais].
[6] En 2006, le Hamas avait largement remporté les élections du Conseil législatif palestinien avec 74 des 132 sièges contestés. Un gouvernement d’unité nationale avait été constitué, réunissant des membres du Hamas et du Fatah, le parti palestinien majoritaire contrôlant l’Autorité palestinienne. Mais ce gouvernement a été dissous par le Fatah après que le Hamas a pris le contrôle de la bande de Gaza en 2007. Depuis lors, Gaza et la Cisjordanie sont sous le contrôle de deux autorités distinctes.
[7] Au-delà de l’aide militaire et financière directe, le soutien des États-Unis s’exprime par de nombreux autres moyens. Le gouvernement américain fournit par exemple des milliards de dollars en garanties de prêt à Israël, ce qui permet à ce dernier d’emprunter à moindre coût sur le marché mondial. Israël est l’un des six pays au monde à avoir reçu de telles garanties au cours des dix dernières années, avec l’Ukraine, l’Irak, la Jordanie, la Tunisie et l’Égypte.
[8] Dans le cas du Soudan, les États-Unis ont accepté d’accorder un prêt de 1,2 milliard de dollars et de retirer le pays de la liste des États soutenant le terrorisme, bien que l’accord de normalisation n’ait pas encore été ratifié. Pour le Maroc, les États-Unis ont reconnu la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental en échange de la normalisation des relations avec Israël.