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À l’occasion des 150 ans de la Commune de Paris, Contretemps va publier du 18 mars au 4 juin une lettre quotidienne rédigée par Patrick Le Moal, donnant à voir ce que fut la Commune au jour le jour

***

L’essentiel de la journée

Situation militaire

Journée sans affrontements importants.

 

A l’ouest

La canonnade est intense, à Asnières la Maison Blanche est en feu.

 

Au sud

Les forts de Vanves et Issy sont toujours bombardés, les travaux des Versaillais se poursuivent pour isoler le fort d’Issy.

 

La réorganisation militaire continue

Les échanges entre le comité de salut public et le délégué à la guerre Rossel sont destinés à être publiés dans le Journal Officiel, comme s’il fallait officialiser de manière indiscutable des demandes et des réponses.

La datation selon le calendrier républicain réapparaît.

En vertu de l’arrêté du Comité de salut public, en date du 15 floréal an 79, le colonel Rossel, délégué à la direction et au commandement général des opérations militaires, est invité à faire, dans le plus bref délai, la répartition des différents commandements militaires.

Le Comité de salut public :

ANT. ARNAUD, GERARDIN, L. MEILLET, G. RANVIER.

*

En exécution de l’arrêté du Comité de salut public en date du 15 floréal an 79.

Le délégué à la guerre arrête ainsi qu’il suit la répartition des différents commandements militaires :

Le général Dombrowski se tiendra de sa personne à Neuilly, et dirigera directement les opérations sur la rive droite.

Le général La Cécilia dirigera les opérations entre la Seine et la rive gauche de la Bièvre. Il prendra le titre de général commandant le centre.

Le général Wroblewski conservera le commandement de l’aile gauche.

Le général Bergeret commandera la 1re brigade de réserve ; le général Eudes commandera la 2e brigade active de réserve.

Chacun des généraux ci-dessus désignés conservera un quartier à

l’intérieur de la ville ainsi qu’il suit :

1° Le général Dombrowski, à la place Vendôme ;

2° Le général La Cécilia, à l’École militaire ;

3° Le général Wroblewski, à l’Élysée ;

4° Le général Bergeret, au Corps législatif ;

5° Le général Eudes, à la Légion d’honneur.

Un ordre ultérieur déterminera les troupes que le ministère de la

guerre mettra à leur disposition.

Le délégué à la guerre, ROSSEL.

Paris, le 5 mai 1871.

Le Comité de salut Public valide l’accord passé entre Rossel et le Comité central de la garde nationale tel qu’il a été annoncé par Rossel hier. Au délégué à la guerre l’initiative et la direction des opérations militaires, au comité central l’administration de la guerre. Le Comité de salut public n’a plus de rôle en cette matière.

Paris, le 5 mai 1871.

Le comité de salut public

ARRÊTE :

Art. 1er. La délégation à la guerre comprend deux divisions

Direction militaire.

Administration.

Art. 2. Le colonel Rossel est chargé de  de l’initiative et de la direction des opérations militaires.

Art. 3. Le Comité central de la garde nationale est chargé des différents services de l’administration de la guerre, sous le contrôle direct de la commission militaire communale.

Le Comité de salut public :

ANT. ARNAUD, CH. GERARDIN, FELIX PYAT, LEO MEILLET, G. RANVIER

 

Témoignage

Louise Milliet à Félix Milliet

Le fort d’Issy … est en triste état. Il se fera probablement sauter mais la position ne sera pas plus tenable pour les Versaillais que pour les fédérés. J’espère que tu ne crois pas un mot de tous les mensonges dans les journaux de Versailles. Il est impossible d’avoir plus de mauvaise foi. Comprend-on ce gouvernement qui s’obstine à considérer la révolution de Paris comme le fait d’une poignée de factieux. Une poignée de factieux qui a fait faire le gouvernement, une poignée de factieux qui tient en échec la plus belle armée que l’on ait jamais vue, et cela depuis six semaines et ils n’ont pas fini. Il devraient comprendre qu’il y a quelque chose au fond, une idée qui vaut la peine d’être discutée, mais non, ils sont aveugles comme tout ce qui est vieux et tout ce qui est destiné à tomber. Pour moi je crois que c’est l’enfantement laborieux d’une ère nouvelle et non l’agonie de la France. Aussi je regarde et j’écoute, le grand malheur c’est que les hommes manquent, d’un côté il n’y a que les vieux rogatons de 1830 et de l’autre des fruits verts pas mûrs du tout. Les révolutions mûrissent vite les hommes mais pas assez encore pour nos besoins pressants. Voici ma conviction, c’est que quand même l’Assemblée vaincrait Paris elle sera obligé de lui accorder les franchises municipales. L’idée est bien plantée et arrosée de trop de sang pour qu’elle ne pousse pas. Autant vaudrait s’exécuter tout de suite.

*

Élie Reclus, 44 ans, journaliste

D’une affiche officielle collée sur les murs, j’extrais les chiffres suivants :

Effectif de la garde nationale.

Bataillons de marche : 99 980 hommes

Présents :                           Absents :

Troupe     84 986                        Troupe          11 389

Officiers     3 413                        Officiers             242

_____________                          ________________

Présents   88 399                        Absents        11 681

Bataillons sédentaires : 97 852 hommes

Présents :                        Absents :

Troupe     77 665                        Troupe          16 435

Officiers     3 094                        Officiers             658

_______________                       ________________

Présents   80 759                        Absents        17 093

Un chiffre général de 197 832 hommes, sur lesquels 12,6 % sont absents dans les compagnies de marche et 17,5 % sont absents dans les compagnies sédentaires

 

Encore sur la place du Comité de salut public !

La Commune reprend la discussion sur les responsabilités de certains membres du Comité de salut public, car si des décisions militaires ont été prises sans en référer à Rossel, cela pose problème. Contrairement à ce que dit ce dernier, cela n’a rien à voir avec la trahison au Moulin Saquet et aux difficultés du côté d’Issy, mais si l’on envoie des ordres soit pour les vivres, pour les mouvements militaires, soit pour d’autres mesures à prendre, cela peut vite devenir le chaos comme le dit un membre.

Intervention – Auguste Viard, 35 ans, employé de commerce, marchand de couleurs

… que la lumière soit faite sur tous les faits dont il a été question ; il faut que nous sachions qui a menti ; car on a menti ; c’est incontestable. Cette nuit, j’ai couché chez moi pour la première fois, et il m’a été de toute impossibilité de reposer ; sous mes fenêtres, des conversations à haute voix avaient lieu ; l’on parlait de bataillons qui avaient été entourés, qui avaient été décimés, de l’incapacité des chefs, etc. Tout ce que j’ai entendu m’a causé, une émotion telle que je n’ai pu y résister ; et je suis descendu pour faire taire toutes ces calomnies, toutes ces exagérations, toutes ces plaintes qui circulent partout. Je demande donc, je le répète, que l’on fasse venir les quatre parties intéressées, afin que tout le monde soit parfaitement éclairé à tous égards. … Ayons la conscience, c’est un devoir, pour nous, de laisser toutes personnalités de côté ; soyons parlementaires, et arrivons enfin à connaître la vérité, toute la vérité.

Le débat s’envenime, Tridon dit que les électeurs doivent savoir « si, parmi nous, il y a des menteurs et des traîtres ; il faut qu’ils connaissent aussi les hommes qui ont pris les mesures dont ils ont été victimes. »  D’autres insistent à nouveau pour que les attributions du Comité de salut public soient parfaitement délimitées. Le cordonnier Simon Dereure, membre de l’Internationale affirme avec raison : « On vous parle de trahison ; mais la trahison n’a rien à faire ici. Tout ce que nous voulons savoir c’est si le Comité de salut public a le droit de donner des ordres à la Guerre. » C’est bien la discussion importante, savoir si le Comité de salut public est compétent dans les questions militaires. Si oui, il n’y a pas besoin de délégué à la Guerre ; mais, s’il y a un homme capable de sauver la situation militaire de Paris, il faut que lui seul soit délégué aux opérations militaires sous le contrôle du Comité, de la Commission et de la Commune. Mais, alors, il ne faut pas que le Comité aille donner des ordres.

Petit à petit il est confirmé qu’un membre du Comité de salut public, Félix Pyat, a bien signé un ordre commandant à Wroblewski de se porter à Issy. Tous sont d’accord pour dire que le Comité de salut public a eu tort de donner cet ordre sans en prévenir la Guerre.

Félix Pyat annonce une nouvelle fois qu’il donne sa démission.

Témoignage – Adolphe de Balathier-Braguelonne, 60 ans, journaliste hostile à la Commune, Directeur de La Petite Presse

Pour celui qui étudie les transformations que Paris subit chaque jour, Paris s’éteint. Sa physionomie ne ressemble en rien à celle qu’elle avait pendant le siège.

Dès neuf heures du soir, la ligne du boulevard ne présente plus, des deux côtés, qu’une longue façade sombre et noire, quelque chose comme un catafalque devant lequel les lanternes du gaz se dressent çà et là comme des cierges funéraires.
De la Madeleine à l’Opéra, un marchand de tabac, seul, proteste par sa porte mi entr’ouverte. Le restaurant Peters essaie d’éclairer sa façade basse.
De là à Tortoni, qui allume trois becs de gaz, rien. Puis le café Riche où les héroïques s’assoient encore, puis rien jusqu’au Café de Madrid, qui brille comme un phare.

On sent que le café de Madrid est le centre de l’action ; les képis aux mille galons y foisonnent. À chaque instant, un officier à ceinture rouge arrive galopant de son mieux et portant des nouvelles de victoires. Les chevaux hennissent, les nouvelles se font et se débitent, les bocks se vident et se remplissent. C’est le café Helder de la Commune.
De là au Gymnase, rien que du sombre et de la nuit. Au-delà, plus rien du tout que quelques débits de vin et quelques marchands de tabac.

*

Observation sur cet article

Le Café de Madrid a  été très fréquenté. Massenet de MarancourBarral de MontaudRazoua, HumbertMaroteauVermerschSecondignéVermorelPierre DenisCourbetMiot,  CavalierJ.-B. ClémentPilotell étaient parmi les habitués. Mais le propriétaire, qui serait un agent versaillais, a fermé son établissement vers le 25 avril[1]. … peut-être que le journaliste de La Petite Presse a oublié ce détail !

 

Les chansons des communeux/ses

Loin des cafés huppés, dans les quartiers populaires, on chante ensemble, en toute fraternité. Que ce soit en famille, avec des amis, dans les goguettes ou les sociétés chantantes, dans les salles de spectacles ou les cafés-concerts.

On reprend les chants traditionnels de la Révolution française, La Carmagnole, La Marseillaise ou Le Chant du Départ, avec des couplets rajoutés, inventés par les chansonniers et les ouvrier-es. Ils répondent à la situation, prennent pour cible Thiers et les Versaillais.

Rosalie Bordas, 30 ans, chanteuse populaire

Née dans une famille de tradition montagnarde, qui tenait le café « rouge » de sa petite ville. Elle y fit ses débuts de chanteuse populaire, fut remarquée par les jeunes poètes, et connut le succès dans les cafés chantants du Midi, où elle incarnait avec passion la Marianne républicaine.

Au début de 1870 elle vint chanter à Paris, « excitant la sympathie des adversaires de l’Empire par les tendances démocratiques de son répertoire. » Elle s’est rendue célèbre en chantant « La Canaille », après le meurtre de Victor Noir, puis « La Marseillaise », après la déclaration de guerre.

Voici une des chansons populaires, « Le drapeau rouge » :

Enquête sur Blanchet, membre de la Commune

Pour ajouter à l’ambiance, il apparaît qu’un membre élu de la Commune, connu sous le nom de Blanchet s’appelle en fait Stanislas Pourille, qu’il a été, à Lyon, secrétaire de commissaire de police et condamné à six jours de prison pour banqueroute. Les délégués de la Sûreté générale, informés par deux citoyens, ont enquêté, se sont fait délivrer un extrait du casier judiciaire, ont arrêté et interrogé l’individu, qui a reconnu tous ces faits. Il démissionne de la Commune.
Les francs-maçons parisiens lancent un appel à leurs frères de France et du monde entier

Il y relatent les vaines démarches de conciliation et appellent aux armes : « … Attendu que les efforts des francs-maçons ont été trois fois repoussés par ceux-là mêmes qui ont la prétention de représenter l’ordre et que leur longue patience est épuisée, tous les francs-maçons et compagnons doivent prendre l’arme vengeresse et crier : Frères, debout ! que les traîtres et les hypocrites soient châtiés ! … Les francs-maçons et les compagnons de Paris, fédérés à la date du 2 mai, s’adressent à tous ceux qui les connaissent. Frères en maçonnerie et frères compagnons, nous n’avons plus à prendre d’autre résolution que celle de combattre et de couvrir de notre égide sacrée le côté du droit. Armons-nous pour la défense ! Sauvons Paris ! Sauvons la France ! Sauvons l’humanité ! Paris, à la tète du progrès humain, dans une crise suprême, fait son appel à la Maçonnerie universelle, aux compagnons de toutes les corporations, il crie : À moi les enfants de la veuve ! Cet appel sera entendu par tous les francs-maçons et compagnons ; tous s’uniront pour l’action commune, en protestant contre la guerre civile que fomentent les souteneurs des monarchies. Tous comprendront que ce que veulent leurs frères de Paris, c’est que la justice passe de la théorie à la pratique, que l’amour des uns pour les autres devienne la règle générale, et que l’épée n’est tirée du fourreau, à Paris, que pour la légitime défense de l’humanité. … »

 

De nouvelles interdictions de journaux

Elles sont prises pendant la durée de la guerre, et aussi longtemps que la Commune de Paris aura à combattre les bandes de Versailles qui l’assiègent et répandent le sang des citoyens, car selon le délégué à la sûreté générale, il n’est pas possible de tolérer les manœuvres coupables des auxiliaires de l’ennemi. Il place au nombre de ces manœuvres les attaques calomnieuses dirigées par certains journaux contre la population de Paris et la Commune. Ces attaques sont « une insulte permanente au courage, au dévouement et au patriotisme de nos concitoyens ; Qu’il serait contraire à la moralité publique de laisser continuellement déverser par ces journaux la diffamation et l’outrage sur les défenseurs de nos droits qui versent leur sang pour sauvegarder les libertés de la Commune et de la France ».

Considérant que le gouvernement de fait qui siège à Versailles interdit dans toutes les parties de la France, qu’il trompe, la publication et la distribution des journaux qui défendent les principes de la révolution représentés par la Commune ;

Considérant que les journaux Le Petit Moniteur, Le Petit National, Le Bon Sens, La Petite Presse, Le Petit Journal, La France, Le Temps excitent dans chacun de leurs numéros à la guerre civile, et qu’ils sont les auxiliaires les plus actifs des ennemis de Paris et de la République.

ARRÊTE :

Art. 1er. Les journaux Le Petit Moniteur, Le Petit National, Le Bon Sens, La Petite Presse, Le Petit Journal, La France, Le Temps sont supprimés.

Art. 2. Notification du présent arrêté sera faite à chacun des susdits journaux et à leurs imprimeurs, responsables de toutes publications ultérieures, par les soins du citoyen Le Moussu, commissaire aux délégations, chargé de l’exécution du présent arrêté.

Le membre de la Commune délégué à la sûreté générale. F. COURNET.

Paris le 5 mai 1871.

Décision de démolition de la chapelle expiatoire de Louis XVI

Le Comité de salut public,

Considérant que l’immeuble connu sous le nom de chapelle expiatoire de Louis XVI est une insulte permanente à la première Révolution et une protestation perpétuelle de la réaction contre la justice du peuple,

ARRÊTE :

Art. 1er. La chapelle dite expiatoire de Louis XVI sera détruite.

Art. 2. Les matériaux en seront vendus aux enchères publiques au profit de l’administration des domaines.

Art. 3. Le directeur des domaines fera procéder, dans les huit jours, à l’exécution du présent arrêté.

Le Comité de salut public :

ANT. ARNAUD, CH. GERARDIN, FELIX PYAT, LEO MEILLET, G. RANVIER

Paris, le 16 floréal an 79

Il est évident que cette chapelle construite par Louis XVIII qui s’élève dans le VIIIème arrondissement, à l’emplacement de l’ancien cimetière de la Madeleine où avaient été placés les corps de Louis XVI et Marie-Antoinette avant d’être transférés à la basilique de Saint-Denis, où sont enterrés des gardes suisses tués lors de la prise du palais des Tuileries, est une insulte à la première Révolution.

On parle aussi vaguement de faire tomber les statues équestres de Henri IV, Louis XIII, Louis XIV, qui existent à Paris. N’y a-t-il pas plus urgent et important que de passer du temps à ces décisions ?

 

Du côté des Clubs

Club Central, club Saint-Eustache

Notification a été faite au curé hier de mettre son église à la disposition d’un club, destiné à être le Club Central de Paris, où sont invités les délégués de tous les clubs de Paris.

L’ouverture a lieu ce soir. L’église a été immédiatement envahie par la foule, à majorité féminine.

Le curé célèbre chaque jour la messe devant un grand nombre de fidèles, la célébration du mois de Marie a lieu tous les soirs à 16 heures dans la chapelle de la Vierge.
Le club fonctionnera chaque soir sans dégrader ni profaner l’édifice.

Maitron

 

En bref

■  La télégraphie privée a été suspendue pour assurer la télégraphie militaire. Aujourd’hui, celle-ci est assurée. Des bureaux de la télégraphie privée seront très prochainement rouverts. En conséquence, la délégation au télégraphe invite les nouveaux employés qui se sont retirés depuis la fermeture de ces bureaux, et qui voudraient du service dans l’administration, à se présenter lundi, mardi ou mercredi prochain, de deux heures à quatre heures, pour subir un examen succinct, et s’ils sont admis, recevoir une commission et une destination.

■  La saisie des pains frais a été opérée dès ce matin chez quelques boulangers de paris.

■  Le Comité de salut public annonce que toutes les exemptions du service de la garde nationale délivrées jusqu’à ce jour aux employés et à tous les agents de chemin de fer, commissionnés ou non, sont et demeurent annulées, et qu’à l’avenir, ne pourront être exemptés du service de la garde nationale, les employés et tous les agents de chemin de fer dont la présence sera reconnue indispensable aux besoins de l’exploitation ou de l’administration, et délivrées par le contrôleur général des chemins de fer, et revêtues de l’approbation d’un délégué spécial du Comité central de la garde nationale. Tout employé des chemins de fer faisant son service de garde national continuera à recevoir son traitement.

■  L’intervention directe des conseils de légion dans les gares, bureaux ou administrations de chemin de fer est absolument interdite.

 

En débat – Quelle lutte à outrance ?

Les élans qui se multiplient pour la recherche des traîtres, sous le coup de l’émotion de vraies traîtrises, comme celle du Moulin Saquet et des morts des combattants sont-ils le moyen le plus efficace de faire face à la situation ?

Or il y a besoin de réfléchir à la meilleure solution à prendre pour gagner.

La seule réponse militaire ne démontre pas son efficacité. Les troupes fédérées subissent de lourdes pertes, il y a des milliers de morts, de blessés de prisonniers. Les meilleurs bataillons qui sont au feu depuis des semaines commencent à fatiguer.

Les diverses conciliations tentées par des élus républicains, les industriels, les francs-maçons, se sont heurtées à un refus obstiné de Thiers de lâcher quoique ce soit. On sait maintenant que son objectif est l’écrasement du peuple ouvrier de Paris en révolution.

Y a-t-il la possibilité de prendre des décisions qui attaquant économiquement et politiquement Versailles d’une manière tellement forte qu’elle déplace le rapport des forces ?

Pourquoi ne débat-on pas de la banque de France, de la Bourse, des grandes entreprises ?

Est-il possible de trouver des alliés et sur quel terrain ?
L’assemblée versaillaise vient de connaître une défaite électorale lors des municipales qui viennent de se dérouler. La majorité monarchiste des élections du 8 février, des élections pour la paix, contre la lutte à outrance que voulait Paris, a disparu lors de ces élections, fragilisant le pouvoir réactionnaire et assassin. Comment utiliser cette nouvelle situation politique à l’avantage de la révolution ?

Or la recherche de traîtres dès qu’un débat s’ouvre interdit toute réflexion collective dans la Commune pour répondre efficacement à ces nouvelles coordonnées politiques.
Avoir comme seule réponse la défense militaire à outrance, déterminée, courageuse, est-ce le plus efficace ?

N’y a-t-il pas d’autres formes de la lutte à outrance qui redonneraient à la lutte militaire des moyens qu’elle ne peut obtenir seule dans Paris isolé ?

 

Note

[1]Maîtron

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