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Pour justifier leur soutien inconditionnel à Israël et leurs critiques adressées à la gauche, les dirigeants occidentaux n’ont de cesse d’évoquer les otages israélien-nes – dissimulant au passage la question des milliers de Palestinien-nes enfermé-es dans les prisons israéliennes depuis tant d’années et dans des conditions terrifiantes, sans droits ni procès. Mais qui est responsable de l’échec d’un retour des otages israéliens sains et saufs, par le refus de tout accord incluant un cessez-le-feu durable et un retrait des trouples israéliennes de Gaza ? Nul autre que le chef de l’État israélien : Benjamin Netanyahou.

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Avec la mort de six otages israéliens, dont un citoyen américain, et les manifestations israéliennes massives contre le Premier ministre Benjamin Netanyahou qui font rage dans le pays, le débat public sur la désignation des coupables est engagé. Interrogé lundi sur la question de savoir si M. Netanyahou en faisait assez pour obtenir la libération des otages encore détenus par le Hamas, le président Joe Biden a répondu sèchement : « Non ».

Piqué au vif, Netanyahou a répliqué par sa propre déclaration publique, en lisant des déclarations récentes de responsables américains qui ont félicité Israël pour son travail constructif en vue d’un accord et qui ont mis à la charge du Hamas l’obligation d’accepter ses conditions, en insistant sur le fait que le Hamas était le véritable obstacle à un cessez-le-feu et à un accord sur la libération des otages. Qui faut-il croire ?

L’une des réponses consiste à écouter les sources haut placées dans le gouvernement ou impliquées dans les pourparlers avec des pays médiateurs comme l’Égypte, les États-Unis, voire Israël lui-même. Pendant des mois, ces voix n’ont cessé de répéter aux médias – souvent des organes de presse israéliens et des journaux de l’establishment américain extrêmement favorables à Israël – que le principal obstacle à un accord de cessez-le-feu est Netanyahou lui-même, et qu’il n’a cessé de mettre des bâtons dans les roues dans les pourparlers pour saboter les négociations afin de se maintenir au pouvoir.

« Tout faire pour empêcher un accord »

Ces derniers jours, la découverte samedi dernier des corps des six otages israéliens a déclenché la colère des Israéliens qui reprochent à M. Netanyahu de ne pas les avoir ramenés chez eux.

Alors que les représentants des pays médiateurs se sont de nouveau téléphonés pour tenter de parvenir à un accord, CNN a rapporté qu’une « source familière avec les discussions » a déclaré à la chaîne que M. Netanyahou avait « tout torpillé en un seul discours », dans lequel il a réitéré sa demande d’occupation permanente par Israël du corridor de Philadelphie, une mince bande de terre le long de la frontière entre Gaza et l’Égypte. Cette demande est devenue le principal point d’achoppement des pourparlers au cours du dernier mois et demi. Curieusement, la citation a fait la une des principaux médias israéliens, tels que le Times of IsraelHaaretz et Yedioth Ahronoth (mieux connu sous le nom de Ynet dans son édition en ligne), mais a été enterrée au vingt-quatrième paragraphe de l’article original de CNN dont elle est tirée.

Le même jour, Ynet a publié son propre rapport sur les changements que Netanyahou a personnellement apportés à une proposition de cessez-le-feu antérieure qui, comme il l’a souligné, avait « reçu l’accord du Hamas sur la plupart des conditions ». La nouvelle proposition de M. Netanyahou, qui avait été présentée aux médiateurs le 27 juillet, comportait « des changements et des ajouts spectaculaires » qui « ont complètement changé le cours des négociations », selon le journal. 

Ces propos s’inscrivent dans le prolongement d’un rapport distinct publié par le journal deux jours plus tôt. Il contenait un verdict accablant sur cette proposition modifiée d’accord de la part d’une personne décrite par Ynet comme « un haut responsable de la sécurité qui a été cité ici à de nombreuses reprises, et qui avait si sombrement et tragiquement raison dans toutes ses prédictions » :

« L’histoire jugera un jour ce document très sévèrement… En haut du document, il est écrit qu’il s’agit d’un « document de clarification », mais à mon avis, le surnom le plus approprié pour ce document est « document sanglant » – parce que ses pages sont tachées du sang des six personnes enlevées qui ont été assassinées dans un tunnel à Rafah. S’il n’y avait pas eu le sabotage délibéré contenu dans ce document pour empêcher un accord, il y a de fortes chances qu’elles aient été libérées il y a déjà un mois et qu’elles soient ici avec nous en vie ».

La source poursuivait en qualifiant le document de « tentative de [Netanyahou] de torpiller le moment positif des négociations » et en affirmant qu’il avait été « créé spécifiquement pour empêcher » un accord de libération d’otages – une accusation, selon le journal, qui a été « renforcée de manière significative dans les conversations avec d’autres responsables liés aux négociations » et dans d’autres documents de négociation.

Sur la base de ces sources, Ynet a décrit la demande de Netanyahou sur le couloir de Philadelphie comme étant à l’origine de l’impasse actuelle des négociations, et a rapporté que les négociateurs israéliens sont extrêmement mécontents du document, « qui, à leur avis, détruit toute chance d’un accord ».

Quelques jours plus tôt, lorsque les corps des otages ont été découverts, le même haut responsable de la sécurité israélienne (d’après la description identique utilisée par le journal) a déclaré à Ynet que Netanyahu et d’autres négociaient délibérément de manière à s’assurer que la guerre ne se termine pas. Si le Hamas est évidemment le plus directement responsable de la mort des otages, a déclaré le haut fonctionnaire au journal, « en vérité ce qui conduit à la mort de nombreuses personnes enlevées . . . [c’est] le refus israélien, en pratique, il n’y a pas d’autre façon de l’appeler, de signer un accord qui ramènerait tous les survivants chez eux et mettrait fin à la guerre dans la bande de Gaza ».

L’ensemble de l’establishment militaire et sécuritaire israélien ne voyait aucun inconvénient à se retirer du corridor de Philadelphie, a déclaré la source au journal. Au lieu de cela, la source a déclaré que l’accord était entièrement entre les mains de Netanyahou, mais qu’il « ferait tout pour empêcher un accord ».

Avant cela, il y avait eu deux rapports distincts sur la réunion du cabinet de sécurité israélien du 29 août, l’un du Times of Israel, l’autre d’Axios, rédigé par le bien informé journaliste israélien Barak Ravid. Les deux rapports offraient un compte-rendu étonnamment détaillé de la réunion qui racontait la même histoire : une discussion animée entre Netanyahou et son ministre de la Défense, Yoav Gallant, qui accusait Netanyahou d’avoir imposé la demande de Philadelphie à une armée qui ne pensait pas que c’était nécessaire, et qu’Israël devait choisir entre rester dans Philadelphie et récupérer les otages – une position du ministre qui sera mise en minorité par Netanyahou. 

Le rapport du Times of Israel est particulièrement accablant. Par exemple, lorsque M. Gallant a demandé à M. Netanyahou ce qu’il dirait si le Hamas dans un ultimatum le sommait de choisir entre rester dans Philadelphie ou ramener les otages, le rapport notait : « M. Netanyahou a répondu que l’impératif de maintenir les [Forces de défense israéliennes] dans le corridor était d’une importance cruciale pour l’État ». En d’autres termes, comme l’indique le titre du journal, Netanyahu a explicitement indiqué qu’il « donnait la priorité à Philadelphie plutôt qu’aux otages ».

Les lecteurs attentifs qui parcourront les deux rapports ne trouveront pas le cabinet israélien en train de mentionner le Hamas, ni d’énumérer les obstacles qu’il a dressés sur la voie d’un accord – seulement une discussion sur la question de savoir si Israël doit accepter l’accord et ramener les siens chez eux, ou faire pression pour obtenir davantage de concessions de la part du Hamas, cette dernière opinion l’ayant emporté. 

Il n’y a tout simplement pas d’autre conclusion que l’on puisse tirer de la lecture des propos de hauts fonctionnaires contenus dans ces rapports récents : Netanyahou pourrait conclure un accord sur le retour des otages quand il le souhaite, mais fait tout ce qu’il peut pour éviter de le faire. Pourtant, la plupart de ces informations n’ont pas été rapportées dans les médias américains, et peu d’Américains consomment la presse israélienne.

« Netanyahou ne veut pas la paix »

Il serait erroné de penser que tout cela est récent. Nous pouvons revenir en arrière et voir des affirmations presque identiques de la part de sources de haut niveau dans des reportages datant de plusieurs mois également presque identiques. Prenons les travaux de cette « ancienne source de renseignement de haut niveau » qui fait partie de l’équipe de l’un des négociateurs israéliens, citée dans un rapport de Haaretz du 28 mars :

« Il y a de plus en plus de signes que [Netanyahou] fait presque tout ce qui est possible pour repousser, retarder et ruiner les chances d’un accord de libération des otages en échange de terroristes ».

Ce rapport révélait les diverses actions entreprises par M. Netanyahou pour saper les négociations, notamment en évitant ou en retardant la convocation du cabinet de guerre, en faisant diverses déclarations publiques visant à entacher une discussion productive et en excluant les négociateurs de la participation aux pourparlers, sans compter sur le fait même que la position de M. Netanyahou s’opposait à celles des chefs militaires israéliens.  

Voici ce que le New York Times rapportait le 5 mai d’une conversation entre un fonctionnaire israélien ayant requis l’anonymat et son journaliste à propos de l’insistance absurde de M. Netanyahou sur le fait que, dans le cadre de tout accord de cessez-le-feu, Israël aurait le droit de reprendre les tirs après une courte pause, ce que le journal avait alors qualifié de « principal obstacle aux pourparlers » :

« Israël et le Hamas étaient plus proches d’un accord il y a quelques jours, mais les déclarations de M. Netanyahou sur Rafah ont contraint le Hamas à durcir ses exigences afin de s’assurer que les forces israéliennes n’entreraient pas dans la ville ».

Quant à l’ancien négociateur israélien Gershon Baskin, voilà ce qu’il déclarait un jour plus tard, lorsque M. Netanyahou a ordonné l’invasion de Rafah, dont le monde entier avait correctement prévenu qu’elle serait un désastre :

« Il semble que Netanyahou tente de saboter l’accord avant même que le cabinet n’en reçoive les détails et ne le vote. L’opération militaire israélienne en cours (près de 23 heures, heure d’Israël) vise clairement à pousser le Hamas à revenir sur son accord de cessez-le-feu. Il semble que Netanyahou fasse une fois de plus passer ses propres intérêts politiques avant ceux du pays et des otages israéliens ».

Regardez ce que Biden lui-même disait le 4 juin lorsqu’on lui demandait si Netanyahou prolongeait la guerre pour ses propres raisons politiques – non pas dans une conversation privée qui a été divulguée par la suite, mais dans une interview de politique étrangère très médiatisée dans le magazine Time : « Il y a toutes les raisons de tirer cette conclusion ».

Regardez encore ce que divers responsables ont déclaré à propos des quatre exigences « non négociables » formulées par M. Netanyahou le 7 juillet, qui comprenaient notamment le refus de restituer ceux qu’Israël détenait comme prisonniers (une disposition qui faisait pourtant partie des versions précédentes de l’accord) et une clause qui permettrait à Israël de « reprendre le combat jusqu’à ce que ses objectifs de guerre soient atteints ».

Ces exigences ont été formulées juste au moment où les pourparlers devaient reprendre et juste après que le Hamas eut fait une concession majeure, à savoir qu’il accepterait un accord sans qu’Israël s’engage d’emblée à un « cessez-le-feu complet et permanent » au cours de la première phase de libération des otages, ce que même l’administration Biden avait qualifié d’« ajustement significatif » de la part du groupe.   

Voici, par exemple, ce que rapportait le Times of Israel :

« Un haut fonctionnaire de l’un des pays assurant la médiation entre Israël et le Hamas a également accusé M. Netanyahou d’essayer de saboter l’accord. . . . [déclarant] que la demande non négociable de reprise des combats après la première phase du cessez-le-feu et de l’accord de libération des otages rendue publique par le bureau de M. Netanyahu avait frappé à l’aspect le plus sensible des négociations en cours ».

Voici ce que rapportait Haaretz :

« Une autre source a averti que les nouvelles exigences d’Israël devraient retarder l’achèvement des négociations, et qu’il n’était pas certain que le Hamas accède à ces nouvelles exigences. « Le Hamas a déjà accepté la dernière position présentée par Israël. Mais lors de la réunion de vendredi, Israël a présenté de nouveaux points qu’il demande au Hamas d’accepter », a déclaré une source au fait des détails ».

Voici comment une autre « source sécuritaire »  décrivait la démarche de M. Netanyahou à Ynet :

« Une conduite inappropriée qui nuira aux chances de retour des personnes enlevées chez elles. Il y a également une question de timing…Avec ce comportement, les personnes enlevées ne reviendront pas ».

Un responsable israélien de la sécurité, dont le nom n’a pas été révélé, s’était, lui exprimé à ce sujet sur la chaîne israélienne Channel 12 : « Netanyahou fait semblant de vouloir un accord mais s’efforce de le torpiller ».

Regardez également les diverses réactions à l’annonce faite par Netanyahou le 11 juillet, qui introduisait pour la première fois au cours des pourparlers l’idée qu’Israël devrait occuper de manière permanente le corridor Philadelphie dans tout accord final, qualifiée par de nombreux rapports israéliens de « durcissement » de la position d’Israël dans les pourparlers. Voilà ce que déclarait à Channel 12 une source proche des négociations :

« Il s’agit d’une exigence qui empêchera la conclusion d’un accord. Dans le meilleur des cas, il s’agit d’un obstacle qui rendra la poursuite [des pourparlers] plus difficile, et dans le pire des cas, elle vise à mettre des bâtons dans les roues des négociations et à éliminer la possibilité de parvenir à un accord…Le Premier ministre Netanyahu a ajouté des exigences qui s’écartent des accords conclus avec les médiateurs ».

Voilà ce que déclarait au Washington Post un « ancien haut fonctionnaire égyptien au fait des négociations » : « Netanyahou ne veut pas la paix. C’est tout. Il trouvera des excuses […] pour prolonger cette guerre jusqu’au 5 novembre [date de l’élection américaine] ».    

Reuters en se basant sur « deux sources de sécurité égyptiennes » rapportait  au même moment :

« Selon certaines sources, la délégation israélienne approuvait plusieurs conditions en cours de discussion, mais revenait ensuite avec des amendements ou introduisait de nouvelles conditions qui risquaient de faire échouer les négociations. Ces mêmes sources ont déclaré que les médiateurs considéraient les « contradictions, les retards dans les réponses et l’introduction de nouvelles conditions contraires à ce qui avait été convenu précédemment » comme des signes que la partie israélienne considérait les pourparlers comme une formalité destinée à influencer l’opinion publique ».

Même le quotidien de droite Jerusalem Post abondait dans ce sens, rapportant que des sources anonymes lui avaient confié que « Netanyahou sabote activement la possibilité d’un accord sur les otages, afin d’éviter l’effondrement de son gouvernement », en introduisant la demande de corridor Philadelphie à la dernière minute.

Ces sources ont également « ridiculisé » ces nouvelles exigences « qui ne sont pas pertinentes du point de vue de la sécurité », estimant que le premier ministre était « confiant dans la réélection de [Donald] Trump et ressentait ainsi moins de pression » pour se conformer aux exigences de M. Biden. Elles ont également estimé que « l’énorme concession du Hamas aurait pu conduire à la conclusion de l’accord cette semaine ou la suivante, et qu’un grand nombre d’otages auraient de ce fait pu déjà rentrer chez eux ».

Ces propos ont été confirmés par un rapport publié plus tard, le 28 juillet, par le New York Times, qui a été informé par six responsables israéliens que :

« M. Netanyahou était la principale raison du durcissement de la position d’Israël lors des négociations de Rome, et que les principaux responsables de la sécurité faisaient pression pour que le premier ministre fasse preuve d’une plus grande souplesse afin de parvenir à un accord. La marge de manœuvre de M. Netanyahou est limitée par les membres de sa coalition gouvernementale de droite ; certains d’entre eux s’opposent à une trêve qui permettrait au Hamas de survivre à la guerre et ont menacé de faire tomber le gouvernement si leurs souhaits n’étaient pas satisfaits ».

« Les obstacles viennent de Netanyahou »

Quelques jours plus tard, l’assassinat du négociateur qui se trouvait en face de lui, Ismail Haniyeh a probablement été la preuve la plus évidente du manque de sérieux de M. Netanyahou à l’égard des pourparlers.

Cet acte irréfléchi et totalement illégal a été largement dénoncé, y compris par des responsables de pays participant aux pourparlers. Le premier ministre qatari, Mohammed bin Abdulrahman bin Jassim al-Thani, s’est notamment interrogé à ce propos : « Comment la médiation peut-elle réussir lorsqu’une partie assassine le négociateur de l’autre côté ? ». Ainsi que le ministère égyptien des affaires étrangères, qui, dans un communiqué, a déclaré que : 

« La coïncidence de cette escalade régionale avec l’absence de progrès dans les négociations sur le cessez-le-feu à Gaza accroît la complexité de la situation et indique l’absence de volonté politique israélienne de la calmer ».

Et même M. Biden lui-même. Selon un fonctionnaire américain dans Axios, le président américain s’est plaint auprès de Netanyahou qu’il ait procédé à l’assassinat alors qu’ils s’étaient entretenus une semaine plus tôt sur la possibilité de conclure un accord, et il lui a dit :

« Nous sommes à un point d’inflexion : […] nous devons tout faire pour mettre fin à la guerre et parvenir à la stabilité régionale, même si l’accord n’est pas parfait. Le Hamas veut l’accord maintenant. Cela pourrait changer. »

Il n’est pas étonnant que « trois responsables de pays médiateurs » aient déclaré au Times of Israel, début août, que l’équipe de négociation israélienne avait perdu toute crédibilité. L’un des responsables, un diplomate, avait alors déclaré au journal :

« Il est clair qu’il s’agit de tactiques dilatoires ; chaque fois que nous nous rapprochons d’un accord, d’autres attentats se produisent. Haniyeh était quelqu’un qui voulait un accord. Pour l’instant, les obstacles viennent de Netanyahou ».

Ce même diplomate déclarait également que « les négociateurs israéliens disaient une chose aux médiateurs dans la salle et que Netanyahou disait le contraire en public », ce qui retardait les pourparlers, tandis qu’un autre fonctionnaire affirmait que les négociateurs israéliens assuraient à plusieurs reprises aux médiateurs les conditions que le gouvernement israélien était prêt à accepter, pour ensuite revenir sur ces conditions après s’être entretenu avec Netanyahou. Un autre diplomate a révélé, lui, que Netanyahou avait rejeté une offre du Hamas faite quelques jours après le 7 octobre de libérer tous les otages civils en échange d’une pause d’une semaine dans les combats.

En raison de ce comportement, Channel 12 a rapporté que lorsque M. Netanyahou s’est disputé avec ses propres chefs de la sécurité, qui se sont demandé s’il voulait réellement conclure un accord et l’ont exhorté à accepter celui qui était sur la table, le premier ministre israélien leur a répondu en les traitant de « faibles » et leur intimant de faire pression sur le Hamas plutôt que sur lui-même. Cela a conduit les chefs de la sécurité à conclure que M. Netanyahou ne voulait pas d’un accord, selon Channel 12, une source anonyme ayant déclaré à la chaîne : « Il a renoncé aux otages ».

Des récits de ce type se sont poursuivis tout au long de la fin du mois d’août concernant la demande de M. Netanyahou à Philadelphie, jusqu’à la découverte, samedi dernier, des otages exécutés.

Un rapport de Haaretz du 20 août, par exemple, citait deux sources qui affirmaient que Netanyahou « sabotait une fois de plus les pourparlers » et « sapait constamment les négociations et retardait la conclusion d’un accord », rejetant même les propositions de l’establishment de la défense israélienne sur la manière de se retirer de Philadelphie. Un haut fonctionnaire américain voyageant avec le secrétaire d’État Antony Blinken s’est alors plaint « que des déclarations maximalistes comme celles-ci ne sont pas constructives pour faire passer la ligne d’arrivée à un accord de cessez-le-feu et qu’elles risquent certainement de compromettre la capacité » d’avancer dans les négociations.

La semaine dernière, le 28 août, « une source impliquée dans l’accord » a déclaré à Haaretz qu’« à moins d’une certaine flexibilité sur ces questions » – y compris l’insistance de Netanyahou sur une présence israélienne continue dans le corridor de Philadelphie – « il est peu probable que nous soyons en mesure d’obtenir la libération des otages ».

Cela s’est poursuivi jusqu’à hier, lorsque le Washington Post a rapporté que neuf actuels et anciens négociateurs des pays médiateurs étaient d’accord pour dire que la demande de Philadelphie de Netanyahou était le principal obstacle à un accord sur les otages. Un fonctionnaire israélien « se défoulant » dans le journal a ainsi déclaré :

« Nous aurions pu les sauver. Le Hamas a commis le crime et doit être tenu pour responsable, mais mon gouvernement avait la responsabilité de faire tout ce qu’il fallait pour les sauver, et il a failli à ses devoirs envers eux et leurs familles. Nous leur devons des excuses ».

Absurdité meurtrière

Il ne s’agit pas d’un, de deux ou même de trois rapports. Il s’agit de plus de deux douzaines d’entre eux, au cours des six derniers mois, émanant de divers organes de l’establishment israélien et américain, qui disent tous la même chose : Netanyahou est le principal obstacle à un accord de cessez-le-feu. Il a systématiquement saboté toute perspective de paix et se soucie bien plus de maintenir sa coalition gouvernementale – et donc de s’accrocher au pouvoir politique – que de ramener les otages chez eux, persuadé qu’il peut simplement s’accrocher jusqu’à ce que les démocrates perdent face à Trump en novembre.    

Il est difficile de dire ce qui est le plus absurde : qu’il subsiste un doute sur les raisons pour lesquelles un accord de cessez-le-feu à Gaza, que l’administration Biden appelle de ses vœux, ne peut être conclu, ou que l’administration Biden continue de soutenir et d’armer volontairement l’homme dont tout le monde sait qu’il est son principal saboteur.

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Cet article a d’abord été publié en anglais par Jacobin. Traduction par Contretemps.

Illustration : Wikimedia Commons.

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