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À l’occasion des 150 ans de la Commune de Paris, Contretemps publie du 18 mars au 4 juin une lettre quotidienne rédigée par Patrick Le Moal, donnant à voir ce que fut la Commune au jour le jour

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L’essentiel de la journée

Situation militaire

À l’ouest

La situation militaire devient chaque jour plus périlleuse. De Vaugirard à Neuilly, le rempart est la seule protection des fédérés ; sur les points les plus menacés de ce vaste périmètre, l’intensité du bombardement ne leur permet pas d’y demeurer. L’enceinte du Point du jour est devenue intenable. A Auteuil, une brèche est faite dans les fortifications. A la porte Maillot, la canonnade est furieuse, les obus tombent jusqu’à l’arc de triomphe.

 

Au sud

C’est maintenant le fort de Montrouge qui est criblé d’obus. Les versaillais ont attaqué le séminaire d’Issy. Depuis cinq jours, Brunel s’efforçait de mettre un peu d’ordre dans la défense de ce village. Il avait demandé de l’artillerie (il n’y avait que quatre pièces) et de nouveaux bataillons pour remplacer les 2000 hommes qui se tenaient là depuis quarante et un jours. On ne lui a envoyé que deux ou trois cents hommes. Le séminaire a été fortifié mais les fédérés, accablés d’obus, ne peuvent y tenir.

Le principe d’une suspension d’armes pour permettre aux populations de Montrouge, de Vanves et d’Issy de quitter leurs maisons, a été accepté par le gouvernement et par la Commune. Mais une visite dans les localités a montré que les habitants de ces villages ont pu trouver un refuge.

La Commune fait monter une batterie sur l’arc de triomphe.

A la suite de la manifestation des femmes hier, le commandant de la 12ème légion organise une compagnie de citoyennes volontaires :

12ème Légion, aux gardes nationaux

Citoyens,

Un grand exemple vous est donné : des citoyennes, des femmes héroïques, pénétrées de la sainteté de notre cause, ont demandé des armes au Comité de salut public pour défendre, comme nous tous, la Commune et la République.

Ce noble sentiment ranimera, je l’espère, le courage de certains hommes.

Le colonel commandant la douzième légion, heureux et fier d’avoir à enregistrer un pareil dévouement, a pris la décision suivante :

La 1ère compagnie des Citoyennes volontaires sera immédiatement organisée et armée.

Ces citoyennes marcheront à l’ennemi avec la légion. Et, afin de stimuler l’amour-propre de quelques lâches, le colonel arrête :

1° Tous les réfractaires seront désarmés publiquement, devant le front de leur bataillon, par les citoyennes volontaires ;

2° Après avoir été désarmés, ces hommes, indignes de servir la République, seront conduits en prison par les citoyennes qui les auront désarmés.

La prochaine exécution de ce genre aura lieu prochainement, avenue Daumesnil.

Vive la Commune ! Vive la République !

Le colonel commandant la 12ème légion, Jules Montels

Le délégué à la guerre interdit aux officiers de tout grade de paraître à leurs bataillons avec des fusils. Il estime que pour le plaisir de tirer sur les Versaillais, ils négligent ainsi d’exercer sur les hommes qu’ils commandent l’action que leur réserve leur grade, avec les risque qu’abandonnés à eux-mêmes, les gardes nationaux se battent à l’aventure.

 

Publication au Journal Officiel du traité de paix signé avec Bismark

Les termes du traité définitif de paix sont connus. Il confirme les territoires conquis par l’Allemagne. Nombre de dispositions sont liées à l’issue de la bataille engagée par Versailles contre Paris.

Le payement de 500 millions aura lieu dans les trente jours qui suivront le rétablissement de l’autorité du gouvernement français dans la ville de Paris. Le reste sera payé par étapes jusqu’au 2 mars 1874.

Après le payement du premier demi-milliard, les départements de la Somme, de la Seine Inférieure et de l’Eure seront évacués. L’évacuation des départements de l’Oise, de Seine-et-Oise, de Seine-et-Marne et de la Seine, ainsi que celle des forts de Paris, aura lieu aussitôt que le gouvernement allemand jugera le rétablissement de l’ordre, tant en France que dans Paris, suffisant pour assurer l’exécution des engagements contractés par la France.

Le gouvernement allemand continuera à faire rentrer les prisonniers de guerre, pour fournir à Versailles le nombre d’hommes nécessaires à l’attaque contre Paris. En outre, pour combattre l’insurrection kabyle, vingt mille prisonniers seront dirigés sans délai sur Lyon, pour être expédiés immédiatement en Algérie pour être « employés » dans la colonie.

 

Les agents versaillais dans Paris

Il est aujourd’hui certain que les Versaillais, dans le but de s’assurer une diversion intérieure dans le cas d’une attaque sur les bastions, ont fait s’introduire dans Paris, sous des déguisements divers, un certain nombre de gendarmes et de sergents de ville.

A quatre heures de l’après-midi, dans la cour d’une maison sise boulevard Voltaire, 71, sont sortis par une bouche d’égout quatre hommes portant l’uniforme des gardes nationaux, et armés de chassepots. Des citoyens se mirent à la poursuite des faux gardes nationaux et en arrêtèrent trois. Interrogés et fouillés, ces hommes ont déclaré appartenir à la gendarmerie. Ils sont apparus sur le boulevard Voltaire parce qu’ils se sont perdus dans les égouts et se sont trompés de sortie. De ces faits résulte la nécessité d’assurer une surveillance toute spéciale sur les galeries d’égout qui font communiquer Paris avec l’extérieur.

 

Changements dans la Commission militaire

La commission militaire sera désormais composée de sept membres au lieu de cinq, les citoyens Bergeret, Cournet, Géresme, Ledroit, Lonclas, Sicard et Urbain.
Ils remplacent les citoyens Arnold, Avrial, Johannard, Tridon et Varlin, c’est-à-dire que les membres de la minorité hostile à la mise en place du Comité de salut public (dont trois membres de l’Internationale, Avril, Johannard et Varlin) sont exclus de cette commission.

En outre, elle intègre des membres actifs du Comité central de la garde nationale qui depuis des semaines contestent le pouvoir de la Commune, comme Geresme et Lonclas. Ce dernier était l’organisateur du « comité de la rue d’Aligre » avec lequel plusieurs membres de la Commune ont eu des difficultés. Eux fondent l’avenir de la révolution sur la Garde nationale. Ils ont obtenu ce qu’ils désiraient et peu leur importe que cette heure soit la dernière, celle de la résistance de Paris.

Cette nouvelle place de la Fédération de la garde nationale dans la gestion de la situation se traduit dans une autre décision. Pour centraliser, autant que possible, la direction du mouvement des troupes, le service de la place de Paris est transféré dans les bureaux du ministère de la guerre.

Le citoyen Gaillard père, chargé de la construction des barricades et commandant des barricadiers, démissionne. Ce bataillon des barricadiers, qui est composé de 800 hommes et 40 officiers est mis à la disposition du génie militaire. Le Comité de salut public fait à nouveau appel l’enrôlement et l’embrigadement de tous les travailleurs, terrassiers, charpentiers, maçons, mécaniciens âgés de plus de quarante ans, pour une paye de 3 fr.75.

 

Des armes chimiques secrètes ?

La délégation scientifique, dirigée par Parisel, forme quatre équipes de fuséens pour le maniement des fusées de guerre.

Des recherches actives sont en cours pour une arme secrète qui fait naître des espoirs. Le citoyen Parisel, invite « tous les détenteurs de soufre, phosphore et produits de cette nature à en faire la déclaration, sous trois jours, à la délégation scientifique. »

Dans Le cri du peuple

On nous avait donné, depuis quelques jours, des renseignements de la plus haute gravité dont nous sommes aujourd’hui parfaitement sûrs.

On a pris toutes les mesures pour qu’il n’entre dans Paris aucun soldat ennemi.

Les forts peuvent être pris l’un après l’autre. Les remparts peuvent tomber. Aucun soldat n’entrera dans Paris.

Si M. Thiers est chimiste, il nous comprendra.

Que l’armée de Versailles sache bien que Paris est décidé à tout plutôt que de se rendre.

Le délégué aux relations extérieures ajoute dans une note que l’adhésion de la Commune à la convention de Genève n’a pas pour résultat de proscrire l’usage des nouveaux engins de guerre dont dispose la Révolution. En effet la convention de Genève n’a pour but et pour effet que de garantir la neutralité des édifices et du personnel des ambulances militaires. Il affirme que « les forces terribles que la science met au service de la Révolution », la convention de Genève n’en réglemente pas l’usage.

 

Le courant jacobino-blanquiste accentue son emprise

Les attaques du Père Duchêne contre le Comité de salut public continuent. Un des derniers articles (n° 59 du 24 floréal an 79) écrit :

Voilà ce que vous n’osez pas faire, citoyens membres du comité de salut public. Voulez-vous que le Père Duchêne vous dise ? Vous êtes des lâcheurs, comme on dit. DES LACHEURS! Et si vous n’aviez pas peur qu’on vous foute la réciproque, il y a longtemps que vous auriez fait table rase du vieil ordre des choses, et que vous auriez donné à la Révolution les satisfactions qu’elle demande. Mais VOUS AVEZ PEUR […] Fusillez, guillotinez, et que la révolution soit sauvée. La terreur, dira-t-on? Oui, La terreur! Imbéciles que vous êtes, qui veut la fin veut les moyens. Et il suffisait de cinq cent têtes pour sauver cinq cent mille âmes ! Mais vous, vous avez peur, et vous ne ferez rien […] Tu pouvais, toi Clément, rester teinturier, toi Pindy, rester menuisier, toi Amouroux, rester chapelier, toi Arnould, rester imbécile…

Ce climat politique a des effets dans les décisions du Comité de salut public. Ce sont des blanquistes ou des citoyens proches d’eux qui sont nommés aux postes de procureur de la Commune et aux postes d’adjoints.

 

La crise de la Commune éclate

L’autonomisation du Comité de salut est de plus en plus importante public, ce qui tend à remplacer la Commune dans toute l’activité et les décisions de ces derniers jours, tout en éliminant la minorité des postes de responsabilité. La décision relative à la Commission militaire s’ajoute à l’éviction de Vermorel qui contrôlait jusqu’alors les activités de la préfecture de police, à l’éviction de Longuet de la direction du Journal Officiel, et même à l’élection de Billoray contre Varlin lors de la deuxième élection du Comité de salut public à laquelle la minorité a participé.

La Commune avait une réunion prévue aujourd’hui. Les membres appartenant à la minorité de la Commune avaient prévu de lire une déclaration. Mais la plupart des élus de la majorité n’étaient pas là, montrant en pratique l’importance qu’ils accordaient à cette assemblée en se concertant pour ne pas y assister : la séance ne put se tenir!

Les membres présents Arthur Arnould, Ostyn, Ch. Longuet, Arnold, Lefrançais, Serraillier, Jules Vallès, G. Courbet, Victor Clément, Jourde, Varlin, Vermorel, décident quand même de rendre publique cette déclaration, estimant de leur devoir d’éclairer l’opinion publique sur leur attitude, pour faire connaître les points qui les séparent de la majorité.

Déclaration

Par un vote spécial et précis la Commune de Paris a abdiqué son pouvoir entre les mains d’une dictature, à laquelle elle a donné le nom de Comité de salut public.
La majorité de la Commune s’est déclarée irresponsable par son vote, et a abandonné à ce Comité toutes les responsabilités de la situation.
La minorité à laquelle nous appartenons affirme, au contraire, cette idée, que la Commune doit au mouvement révolutionnaire politique et social, d’accepter toutes les responsabilités et de n’en décliner aucune, quelques dignes que soient les mains à qui on voudrait les abandonner.
Quant à nous, nous voulons, comme la majorité, l’accomplissement révolutionnaire de la rénovation, politique et sociale ; mais contrairement à sa pensée, nous revendiquons, au nom des suffrages que nous représentons, le droit de répondre seuls de nos actes devant nos électeurs, sans nous abriter derrière une suprême dictature que notre mandat ne nous permet pas de reconnaître.
Nous ne nous présenterons donc plus à l’Assemblée que le jour où elle se constituerait en cour de justice pour juger un de ses membres.
Dévoués à notre grande cause communale, pour laquelle tant de citoyens meurent tous les jours, nous nous retirons dans nos arrondissements, trop négligés peut-être.
Convaincus, d’ailleurs, que la question de la guerre prime en ce moment toutes les autres, le temps que nos fonctions municipales nous laisseront, nous irons le passer au milieu de nos frères de la garde nationale, et nous prendrons notre part de cette lutte décisive, soutenue au nom des droits du peuple.
Là encore, nous servirons utilement nos convictions, et nous éviterons de créer dans la Commune des déchirements que nous réprouvons tous, car nous sommes persuadés que, majorité ou minorité, malgré nos divergences politiques, nous poursuivons tous le même but :
la liberté politique, l’émancipation des travailleurs.
Vive la République sociale!
Vive la Commune!

Ch. Beslay; Jourde; Theisz; Lefrançais; Eugéne Gérardin; Vermorel; Clémence; Andrieux; Serraillier; Ch. Longuet; Arthur Arnould; Victor Clément; Avrial; Ostyn; Fränkel; Pindy; Arnold; Jules Vallès; Tridon; Varlin, Gustave Courbet.

S’ajoutent deux autres prises de positions :

En votant pour le Comité de salut, je me suis réservé le droit de le juger. J’use de ce droit en me ralliant à la “Déclaration de la minorité de la Commune”. Je veux avant tout le salut de la Commune.

Léo Fränkel.

Si j’avais pu assister à la séance du 15 mai, j’aurais signé la “Déclaration de la minorité de la Commune”. J’en accepte tous les termes. Après avoir vu fonctionner le Comité de salut public, contre l’établissement duquel j’ai voté ainsi que mes collègues, je reste convaincu que les réminiscences de 93 n’auraient jamais dû entrer dans la Révolution sociale et prolétarienne inaugurée le 18 mars.
Salut et fraternité.

Le membre de la Commune, délégué au XVIIe arrondissement, B. Malon.

Arnould, Ostyn, Longuet, Theisz, Jourde, Arnold, Lefrançais, Vallès, Courbet, Fränkel, Andrieu, Avrial, Tridon, Vermorel, Pindy  © Eloi Valat

C’est une scission politique majeure puisque ces 22 membres annoncent ne plus se présenter à l’Assemblée que le jour où elle se constituerait en cour de justice pour juger un de ses membres, se retirer dans leurs arrondissements.

Est-ce que cette scission est en mesure de faire réfléchir les membres de la majorité, de l’arrêter dans la voie où elle s’était engagée ? Trop nombreux sont ceux qui, emportés par la passion, exaspérés par les événements, déstabilisés par le sentiment d’impuissance peuvent encore débattre des difficultés dans lesquelles se trouve la Commune. Pourtant le débat avec ceux qui ne sont pas en accord avec les tendances actuelles de la Commune, mais continuent à la soutenir face aux menées réactionnaires est essentiel. Dans ces conditions, la Commune n’est plus un pouvoir collectif ; elle est livrée à toutes les volontés individuelles.

 

Les ouvriers boulangers reconnaissants

La corporation a tenu une réunion au Cirque national, avenue des Champs Elysées[1], convoquée au motif «  Quand on a fait triompher la justice, manifester en masse sa satisfaction est un devoir ». Elle est arrivée en cortège, précédée de la musique d’une des légions de la garde nationale, un membre tenant une bannière rouge frangée d’or sur laquelle était inscrit : « Chambre syndicale des ouvriers boulangers – organisation du travail par l’association- 1871 – République sociale – Vive le travail de jour – Suppression de l’exploitation de l’homme par l’homme ».

Il y avait entre 1800 et 2000 participants, tous ouvriers, qui après la réunion se sont rendus à l’Hôtel de Ville pour exprimer leur gratitude à la Commune et l’assurer de leur dévouement. Ils y ont été reçus par les citoyens Frankel, Fortuné et Longuet qui ont prononcé quelques paroles vivement applaudies.

La manifestation s’est retirée en criant Vive la République, Vive le Commune !

 

La commission d’enquête sur les ateliers abandonnés entre en fonction

Une première assemblée générale de la commission d’enquête s’est réunie aujourd’hui pour mettre en œuvre le décret du 16 avril, avec les tailleurs, les métallos, les serruriers, les bijoutiers. Elle a mis en place un bureau de sept membres, le recensement va commencer, la prochaine réunion est programmée jeudi prochain.

Les membres connus de ce bureau, en plus de Faron, Aline Jacquier, L. Martin, et Petit sont : Victor Delahaye, 33 ans, ouvrier mécanicien ; Nathalie Le Mel, 50 ans, relieuse, membre de l’internationale,  caissière de la Marmite, secrétaire de la Commission dite d’initiative pour la fédération des sociétés d’alimentation, de consommation et de production ; Jules Minet, 36 ans, peintre sur porcelaine, secrétaire de la section de l’Internationale « Hôpital Saint-Louis », membre de la Chambre syndicale des ouvriers de la céramique, adhérente de l’Internationale.

 

Du côté des Clubs

Club de l’Ecole de médecine

Le citoyen Voyeux :

1/ Faire cesser la prostitution. Demande à ce sujet l’arrestation de toute femme de mœurs suspectes.

2/ Également arrestation de tous les ivrognes. Fermeture des cafés à 11 heures. Interdiction de ce que l’on appelle vulgairement les goguettes.

Au club Ambroise

La « matelassière » demande « qu’on fusille dans les 24 heures tous les gens d’église, depuis le donneur d’eau bénite jusqu’au curé.

Club Nicolas des champs

(6 000 citoyens présents)

Les propositions suivantes, votées avant-hier par le club Eustache, ont été présentées au club Nicolas-des-Champs, qui les a adoptées à l’unanimité.

1/ Considérant que les travaux des barricades exigent en ce moment une grande rapidité, propose le décret suivant :

Tous les bataillons de la garde nationale sédentaire, les bataillons de guerre comptant au moins deux jours de repos, doivent achever dans les quarante-huit heures toutes les barricades en voie de construction ; ils doivent dans trois jours fortifier, à un kilomètre des remparts, toute la partie qui s’étend de la porte Saint-Ouen jusqu’à la porte de Montrouge.

Tous les jeunes citoyens de douze à dix-huit ans prendront part à ces travaux.

2/ Toutes les femmes des sergents de ville, gendarmes, employés des différentes administrations qui ont fui, sont déclarées bouches inutiles et expulsées dans les vingt-quatre heures.

3/ Demander aux Versaillais un état nominatif des prisonniers, avec indication de l’endroit où ils sont détenus, et des blessés morts des suites de leurs blessures à Versailles.

4/ Tous les propriétaires ou leurs représentants doivent délivrer dans les vingt-quatre heures quittance des termes échus, des termes de juillet et d’octobre prochain. Remise entière est faite aux locataire dont le loyer est inférieur à 500 fr. ; au-dessus de cette somme, remise d’un tiers.

Un des citoyens délégués au XIe arrondissement a proposé la formation d’un comité central des clubs de Paris, qui réunirait les propositions faites dans les différentes assemblées, pour les discuter et les soumettre à la Commune. Cette fédération des clubs amènerait des communications plus rapides entre les diverses réunions, et établirait un lien qui donnerait une force encore plus imposante à ces manifestations des sentiments du peuple.

Club de la Fraternité (ou de la Solidarité)

Ouvre aujourd’hui pour « l’instruction politique et sociale du peuple ».

Maîtron

 

En bref

Sont nommés juge de paix, le citoyen Pinon (Martin) et greffier le citoyen Jacquemin (Joseph)

Les compagnies d’assurances sont tenues désormais de payer trimestriellement à la Commune les droits de timbre.

Les bouchers de Paris qui ont des cuirs en dépôt à la halle de la rue Censier sont convoqués au ministère du commerce.

A dater de mardi 16 mai courant, pour circuler dans les abattoirs de la Villette, il faudra être muni d’une carte spéciale, revêtue du cachet de la direction.

La bibliothèque du Muséum d’histoire naturelle restera ouverte pendant toute la saison d’été, de neuf heures du matin à cinq heures du soir.

 

En province

A Lyon, les journaux la République et le Vengeur Lyonnais sont poursuivis.

A Nevers, la Tribune nivernaise a été saisie pour avoir reproduit l’adresse intitulée : le Travailleur de Paris au Travailleur des campagnes.

 

En débat

Appel aux grandes villes

Après deux mois d’une bataille de toutes les heures, Paris n’est ni las ni entamé.

Paris lutte toujours, sans trêve et sans repos, infatigable, héroïque, invaincu.

Paris a fait un pacte avec la mort. Derrière ses forts, il a ses murs ; derrière ses murs, ses barricades ; derrière ses barricades, ses maisons, qu’il faudrait lui arracher une à une, et qu’il ferait sauter, au besoin, plutôt que de se rendre à merci.

Grandes villes de France, assisterez-vous immobiles et impassibles à ce duel à mort de l’Avenir contre le Passé, de la République contre la Monarchie ?

Ou verrez-vous enfin que Paris est le champion de la France et du monde, et que ne pas l’aider, c’est la trahir ?

Vous voulez la République, ou vos votes n’ont aucun sens ; vous voulez la Commune, car la repousser, ce serait abdiquer votre part de souveraineté nationale ; vous voulez la liberté politique et l’égalité sociale, puisque vous l’écrivez sur vos programmes ; vous voyez clairement que l’armée de Versailles est l’armée du bonapartisme, du centralisme monarchique, du despotisme et du privilège, car vous connaissez ses chefs et vous vous rappelez leur passé.

Qu’attendez-vous donc pour vous lever ? Qu’attendez-vous pour chasser de votre sein les infâmes agents de ce gouvernement de capitulation et de honte qui mendie et achète, à cette heure même, de l’armée prussienne, les moyens de bombarder Paris par tous les côtés à la fois ?

Attendez-vous que les soldats du droit soient tombés jusqu’au dernier sous les balles empoisonnées de Versailles ?

Attendez-vous que Paris soit transformé en cimetière et chacune de ses maisons en tombeau ?

Grandes villes, vous lui avez envoyé votre adhésion fraternelle ; vous lui avez dit : « De cœur, je suis avec toi ! »

Grandes villes, le temps n’est plus aux manifestes : le temps est aux actes, quand la parole est au canon.

Assez de sympathies platoniques. Vous avez des fusils et des munitions : Aux armes ! Debout, les villes de France !

Paris vous regarde, Paris attend que votre cercle se serre autour des lâches bombardeurs et les empêche d’échapper au châtiment qu’il leur réserve.

Paris fera son devoir et le fera jusqu’au bout.

Mais ne l’oubliez pas, Lyon, Marseille, Lille, Toulouse, Nantes, Bordeaux et les autres…

Si Paris succombait pour la liberté dans le monde, l’histoire vengeresse aurait le droit de dire que Paris a été égorgé parce que vous avez laissé s’accomplir l’assassinat.

Le délégué de la commune aux relations extérieures, PASCHAL GROUSSET.

 

Notes

[1] Témoignage de Maurice Choury.

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